Évocation de la vie des domestiques et serviteurs afro-américains chez une riche famille dans le Mississippi d’avant la lutte pour les droits civils.

 

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Après un premier long-métrage sorti en 2008 aux Etats-Unis, le cinéaste Tate Taylor, originaire de Jackson dans le Mississipi, devrait se faire rapidement connaître avec La Couleur des Sentiments (The Help), basée sur le premier roman éponyme de Kathryn Stockett, devenu bestseller et un véritable phénomène culturel. Du livre à l’adaptation cinématographique, cette comédie dramatique a déjà conquis le box-office et le cœur des critiques et du public américains, le plaçant en bonne course pour les Oscars 2012. En France, l’ouvrage a déjà commencé à séduire les lecteurs et devrait donc prendre le même chemin dans les salles obscures car La Couleur des Sentiments (The Help) est une œuvre exaltante, drôle, pleine d’espoir et de courage, qui traite des grandes valeurs humaines, sans jamais tomber dans le pathos. Le récit – qui se structure comme un magnifique film choral – suit le destin de plusieurs femmes, dont l’une est à l’origine de ces grands bouleversements en décidant d’écrire un livre sur la condition des domestiques afro-américaines dans l’état du Mississipi, au début des années 1960. Le film démarre avant que les droits civiques – défendus par le révérend Martin Luther King – ne soient instaurés, et se déroule dans la ville étriquée de Jackson, maladivement marquée par la ségrégation raciale. Entre combat, désenchantement, anecdotes et premières victoires, Tate Taylor nous livre pendant 2h20 un superbe témoignage poignant et sensible sur le statut des Noirs et sur le racisme, embourbés dans une Amérique rétrograde et arriérée, piquée par la phobie paranoïaque de voir disparaître les valeurs d’un soi-disant Nouveau Monde, prêché par la communauté WASP (White Anglo-Saxon Protestants) alors majoritaire dans les états du Sud. Si bien que Noirs et Blancs vivent séparés pour tout : habitations, écoles, restaurants, églises, hôpitaux allant jusqu’aux commodités fabriquées dans des cabanons installés dans le jardin des demeures pour éviter tout contact physique par peur de contracter des maladies.

 

 

 

La Couleur des Sentiments dresse une peinture riche des différentes personnalités de l’époque et donne la parole à ces femmes d’exception, via la jeune Skeeter (Emma Stone) de retour sur sa terre natale fraîchement diplômée d’une école de journalisme, marquant dès le départ sa différence face à ses amies bourgeoises blanches jamais sorties de Jackson. C’est ainsi que Aibeleen – calme et réfléchie – et sa meilleure amie Minny – insolente et indomptable mais véritable cordon bleu – acceptent de briser le silence au mépris des dangers et de confier leurs conditions de servitude en tant que gouvernantes en charge de l’éducation des enfants blancs, de la cuisine et du ménage. C’est par leurs anecdotes, secrets et aveux qu’elles célèbrent ainsi le courage, la force et le pouvoir de faire changer les choses. Toutes deux sont interprétées de manière magistrale et cocasse voire facétieuse, par Viola Davis (lauréate de deux Tony et nommée à l’Oscar dans Doute) et Octavia Spencer, qui retrouve Tate Taylor après Pretty Ugly People.

 

 

Tate Taylor aborde ainsi l’amitié dans ce qu’elle représente de fondamental et de solide, entre une jeune bourgeoise blanche et deux bonnes noires, qui se voit renforcée par les manœuvres malveillantes d’une véritable garce raciste (Bryce Dallas Howard) persuadée du bien-fondé de ses convictions, nourries par son ignorance et ses angoisses. Son comportement cruel n’a pas pour seule cible la communauté noire, mais également la sienne. Par sa jalousie et ses ragots, elle bannit de son entourage et de tous les cercles de la ville une voisine, à l’allure sexy et pourtant au caractère simple et généreux (Jessica Chastain), pour s’être mariée avec son ex. Tout en elle n’est alors que faille. On regrette juste au casting le trop peu de présence à l’écran de Sissy Spacek, qui interprète la mère de l’antagoniste atteinte de la maladie d’Alzheimer.

 

 

Si la part politique du film n’est qu’en toile de fond, les quelques faits historiques évoqués – à travers la télévision entre autres – servent essentiellement à faire avancer le récit et à déclencher chez ces femmes la nécessité de faire entendre leurs voix. Tate Taylor marque également sa différence en plongeant le spectateur dans des décors qui rendent compte de l’atmosphère des états du Sud, tant sur le plan social que culturel, faisant du Mississipi un personnage à part entière. Le travail est tout aussi soigné avec les costumes et les accessoires. La Couleur des Sentiments (The Help), rythmé par la bande son de Thomas Newman, apporte un nouveau regard et s’ajoute ainsi à la liste des grands films qui traitent autrement de la ségrégation tels Autant emporte le Vent, Beignets de Tomates Vertes, Malcom X, La Couleur PourpreDans la Chaleur de la NuitBird, Mississipi Burning, La Main Droite du Diable, Dans la Brume Electrique ou encore Devine qui vient dîner ?

 

 

 

 

‘La Couleur des Sentiments’ (The Help) de Tate Taylor en salles le 26 octobre 2011 avec Jessica Chastain, Emma Stone, Sissy Spacek, Viola Davis, Bryce Dallas Howard, Allison Janney, Chris Lowell, Octavia Spencer, Cecly Tyson, Mike Vogel. Scénario : Tate Taylor d’après le livre The Help de Kathryn Stockett. Production : Brunson Green, Chris Columbus, Michael Barnathan. Directeur de la Photographie : Stephen Goldblatt. Décorateur : Mark Ricker. Costumes : Sharen Davis. Accessoiriste : Chris Ubick. Distribution : Walt Disney Company. Durée : 2h20.

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