Lulu, femme nue / Photo Solveig Anspach, Karin Viard, Bouli Lanners et Jean-Luc Gaget

Lulu, femme nue / Photo Solveig Anspach, Karin Viard, Bouli Lanners et Jean-Luc Gaget

Il aura fallu 14 ans – et une bande dessinée d’Etienne Davodeau – pour que Solveig Anspach et Karin Viard se retrouvent après Haut les CÅ“urs !, drame autobiographique qui a valu à cette dernière le César de la meilleure actrice en 1999. Lulu, femme nue se présente comme une parenthèse revigorante pour l’héroïne qui décide de s’occuper d’elle laissant mari et enfants le temps de mieux se retrouver. CineChronicle a rencontré la réalisatrice, la comédienne, le coscénariste Jean-Luc Gaget, l’acteur Bouli Lanners et l’auteur de la BD Etienne Davodeau. Voyages et personnages sont évidemment au cÅ“ur de la conversation.

 

 

 

Lulu femme nue afficheCineChronicle : Etienne, aviez-vous des appréhensions sur cette première adaptation cinématographique de l’une de vos bandes dessinées ?

Etienne Davodeau : Je n’avais pas vraiment de crainte. Je ne voulais pas une copie conforme et le regard de Solveig était de tout bousculer dans mon scénario. Je suis ravi du résultat et, en même temps, mon projet reste inscrit à la bande-dessiné. Nos deux Lulu pourraient être de très bonnes amies. J’ai simplement écouté ce que réécrivait Jean-Luc [Gaget] et Solveig et, petit plus, j’ai eu droit à une micro-figuration. Le plateau m’était vraiment ouvert – tout le contraire de Julie Maroh pour LA VIE D’ADÈLE (notre critique) – et j’ai vraiment senti une sorte de symbiose. Et même s’il s’agit dans mon cas d’une première adaptation, Lulu, femme nue appartient à ce phénomène récent d’adaptations de BD au cinéma. On sent que le neuvième art attire de plus en plus les réalisateurs, qu’il n’existe plus d’image préconçue de la BD. Il peut y avoir des besoins narratifs communs entre les deux domaines.

 

Solveig Anspach : L’idée de ce film est vraiment venue de Caroline Roussel, productrice du film. Elle m’a dit « Lis cela, j’adore cette BD ». Et j’ai imaginé ces personnages en la lisant. Il y a d’abord eu un rendez-vous chez Gallimard, avec Etienne et son éditeur. Je l’ai vécu comme un oral en exposant mes idées et ma vision du film mais il fallait que je donne mon point de vue. J’ai dit ce que j’aimais et ce que je voulais changer, pour des raisons narratives et personnelles, notamment cette voix-off de Lulu, afin d’être plus en empathie avec le personnage et d’être plus avec elle qu’à propos d’elle. Etienne nous a fait confiance sur ce point, sans doute parce que nous avions tous envie que Lulu connaisse une victoire.

 

Jean-Luc Gaget : Et ce même si on souhaitait une fin différente par rapport au couple formé par Lulu et Charles, qu’elle croise sur sa route.

 

SA : L’idée à laquelle j’étais opposée était le fait de remplacer un homme par un autre. Elle s’est d’abord trouvée elle-même, et je ne voulais pas d’un happy end définitif et cliché. On en a aussi beaucoup parlé avec Karin. On cherchait depuis longtemps à retravailler ensemble depuis Haut les Cœurs ! (1999) et on s’est retrouvées, une fois encore, autour d’un personnage fort. On ne voulait pas créer une Lulu misérabiliste. Ce n’est pas une SDF. Tout s’est donc fait très simplement, comme le choix de Claude Gensac. Le personnage est âgé, par conséquent je désirais une actrice de 80 ans ou plus, évidemment talentueuse et n’ayant pas eu recours à la chirurgie esthétique. Son choix est vite devenu évident.

 

Lulu fmme nue Karin ViardCC : Karin, vous-même vous jouez votre personnage sans fard. En même temps, je trouve votre Lulu un peu plus fragile et imprévisible et en même temps un peu plus décalée que celle de la BD. Vous souhaitiez la jouer ainsi ?

Karin Viard : Je ne sais pas si elle est décalée mais elle n’a en tout cas pas le même physique que moi. Je ne crois pas à tous ces effets de changement de peau de tout façon. Je la vois comme une combinaison de la projection de l’acteur, de l’élaboration d’un personnage y compris à travers les costumes, et du regard d’un metteur en scène. Et plus je vieillis, plus je prône une forme de détachement et de non contrôle. J’avais lu la BD mais je savais que je n’allais pas tourner une BD. Elle a constitué une base de travail voilà tout. C’est difficile pour moi de le dire mais je voulais que ma Lulu soit un peu banale, dans le bon sens du terme, pour finalement se révéler comme tout le monde après s’être fondue dans le décor. Ce que j’ai justement aimé retrouver de la BD, ce sont ces errances, et cette silhouette qui est à l’intérieur d’elle-même.

 

lulu femme nue-karin viard-bouli lannersCC : Il est d’ailleurs assez rare de voir ce type de micro-voyages dans un road-movie. Les grands espaces et les grandes échappées sont plus coutumiers du genre.

ED : C’est vrai que Lulu part à seulement quelques heures de chez elle, d’Angers à Saint-Gilles-Croix-de-Vie. On n’est pas dans Thelma et Louise, c’est certain mais ce n’est pas tant le temps du micro-voyage que l’espace qui m’intéressait. En terme de temps, l’histoire n’aura peut-être pas bougé dans dix ans puisque c’est presque atemporel. Il n’y a aucune référence à l’actualité, ni aucun lien insistant à une époque. Ce n’est pas non plus sur un plan kilométrique que se fait mon travail et, en parallèle, le voyage de Lulu. Plus je vieillis, moins j’ai envie de préparer mon histoire à l’avance. Je donne donc plus d’impulsion et j’en viens à marcher devant Lulu, à côté d’elle, je la suis. C’est ce qui importait.

 

SA : Ces images de Saint-Gilles-Croix-de-Vie me rappellent l’Islande, avec cette puissance et cette idée que le vent vous rattrape et vous donne un équilibre.

 

KV : Je le trouve beau ce paysage, avec cette nature forte et présente.

 

Bouli Lanners : Cet univers est peu éloigné du mien, cette thématique sur l’errance m’est proche grâce à des films comme Eldorado [son film sorti en 2008] ou Mammuth et Aaltra de Gustave Kervern et Benoît Delépine.

 

CC : Et vous voilà avec un personnage de séducteur atypique.

BL : J’avais d’abord envie de tourner un film avec Solveig. C’est en tout cas très agréable de jouer le séducteur.

 

Lulu femme nueCC : ‘Lulu, femme nue’ met aussi en avant trois générations. La narration masculine présente dans la BD s’efface ici au profit de ces visages féminins dont cette vieille dame (Claude Gensac) et la jeune serveuse (Nina Meurisse) malmenée par sa patronne. Cela en devient surtout un film de femmes…

SA : Lors d’une précédente présentation, un type m’a accusée, sur un ton très agressif, de ne parler que des femmes. Il y a quand même des personnages masculins auxquels on s’attache, et qui présentent eux-mêmes des failles, y compris le mari. Il pense que tout va se régler sur l’oreiller, il ne la comprend pas et c’est son drame.

 

KV : Je l’aime bien ce mari, il dégage à l’écran quand même. Il n’est pas si atroce que cela.

 

BL : Il est atroce mais on voit sa fracture. Quand il la comprend, il est trop tard.

 

Lulu femme nue-karin viardCC : On a tout de même le sentiment que ‘Lulu, femme nue’ s’inscrit dans ce road movie féminin en vogue cette année, avec des films comme ‘Elle s’en va’ d’Emmanuelle Bercot et ‘Suzanne’ de Katell Quillévéré. 

KV : J’avais en fait l’image de Sandrine Bonnaire dans Sans toit ni loi d’Agnès Varda, avec le fait de fuir les choses, la précarité. J’ai pensé à cette actrice parce que même si elle y est plus jeune que Lulu, elle partage la même intensité. Je comprends leur errance. On peut se retrouver à interpréter des choses qui sont très loin de vous mais que vous comprenez. C’est cela que je trouve assez beau chez elles, ce goût d’être vivante et de ne pas avoir à prouver qui l’on doit être pour être juste dans le ressenti. Cela rejoint le métier d’actrice. Comme Lulu, j’avais de l’espace pour respirer, me déployer et être dans ce ressenti. J’ai connu cela pour Haut les Cœurs ! L’histoire est à minima mais il fallait la rendre intéressante, captivante. Au final, ce film donne le goût de vivre.

 

SA : J’ai davantage pensé à des oeuvres américaines comme Alice n’est plus ici de Martin Scorsese (1974) et L’Epouvantail de Jerry Schatzberg (1973), l’un de mes films préférés. Ils nous plongent dans l’empathie, et Lulu, femme nue parle également d’empathie.

 

CC : Solveig, pouvez-vous nous parler de vos prochains projets ?

SA : Je vais bientôt tourner l’Effet Aquatique et je suis sur d’autres projets comme La Fille de Nulle Part, adapté du roman policier éponyme écrit par Frédéric Brown. Je planche aussi sur La dernière Histoire d’Amour, une romance entre un homme de 45 ans et une femme de 79 ans, un peu à la Harold et Maude d’Hal Ashby.

 

 

>> LIRE NOTRE CRITIQUE DE LULU FEMME NUE, EN SALLES LE 22 JANVIER 2014 <<

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