Série/ Boardwalk Empire (l’intégrale): critique

Publié par Guillaume Ménard le 11 décembre 2014

Synopsis : La chronique sombre et violente du développement d’Atlantic City dans les années 20, lors de l’émergence des premiers casinos dans un climat de Prohibition, qui donnera naissance à la Pègre. Nucky Thompson, le trésorier du parti Républicain -qui dirige la ville- est en réalité celui qui tire toutes les ficelles et qui joue sur plus d’un tableau à la fois pour arriver à ses fins. Argent sale et corruption sont au rendez-vous, en passant par Chicago et New York…

 

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Boardwalk Empire - Nucky Thompson (Steve Buscemi)

Boardwalk Empire – Nucky Thompson (Steve Buscemi)

En 2010, HBO lançait une nouvelle série, Boardwalk Empire créée par Terence Winter, scénariste renommé des Soprano, qui s’intéressait au devenir du crime organisé dans les années 2000. Avec cette nouvelle création originale, il décide de revenir sur les origines de la mafia pendant la prohibition, basée sur le roman Boardwalk Empire : The Birth,High Times and the Corruption of Atlantic City de Nelson Johnson. Le décor est planté à Atlantic City, sur la côte Est en 1920. On y suit Enoch Thompson, dit « Nucky » (Steve Buscemi), trésorier de la ville, qui mène clandestinement des affaires illégales, dont un trafic d’alcool particulièrement lucratif. Martin Scorsese réalise le pilote de la série, avec un épisode totalement maîtrisé – lui valant de remporter un Emmy Award du meilleur réalisateur – qui a propulsé immédiatement Boardwalk Empire au rang de spectacle incontournable. L’introduction expéditive possède la marque du réalisateur des Affranchis avec ses travellings avant succincts et ses images figées portant ici le récit vers une narration antérieure, sans la voix off affectionnée par le maître italo-américain. La scène, menée tambour battant, présente des contrebandiers se faisant braquer en pleine forêt par une escouade masquée, dirigée par un Al Capone dans ses débuts (Stephen Graham). La suite de l’épisode, long flashback nous amenant à cette situation problématique, expose le personnage principal, Nucky Thompson. Basé sur Enoch Lewis Johnson, homme politique ayant tiré profit de la prohibition, son prestige et sa manière de diriger son entreprise lui valent un pouvoir sur Atlantic City considérable qui le conduit à traiter avec les premiers chefs de bande dispersés sur la côte Atlantique, de Chicago à New York.

 

Boardwalk Empire

Boardwalk Empire

 

L’intérêt premier qui provoque fascination et curiosité historique réside dans les acteurs, presque tous basés sur des personnes réelles. On y retrouve Al Capone et son chef, Johnny Torrio (Greg Antonacci) pour Chicago, Arnold Rothstein (Michael Stuhlbarg), Meyer Lansky (Anatol Yusef) et Lucky Luciano (Vincent Piazza) régnant sur la grosse Pomme. Boardwalk Empire nous offre une galerie de protagonistes très riche. Le parti pris des scénaristes prend donc une tournure intéressante, car il se focalise non pas sur les heures les plus connues de ces gangsters, mais sur leurs origines. Ainsi, Al Capone et Lucky Luciano ont à peine vingt-cinq ans et évoluent en tant qu’hommes de main dans une hiérarchie mafieuse encore balbutiante. La connaissance historique de leurs débuts étant limitée, la liberté narrative dans Boardwalk Empire est large, mais s’organise cependant autour d’évènements-clés. Par le prisme de Nucky Thomson, les épisodes vont suivre les alliances et rivalités entre ces familles mafieuses dans une Amérique en plein bouleversement. En effet, la société américaine sombre littéralement dans la consommation d’alcool dès le début du XXème siècle. Le gouvernement décide donc d’adopter en 1919 le Volstead Act, texte de loi interdisant la vente des boissons alcoolisées dans les lieux publics, restaurants et bars compris. Cette loi, souvent citée dans la série, va conduire Nucky à prendre des mesures drastiques afin de mener à bien son empire grandissant.

 

Michael Pitt (Jim Darmody) et Stephen Graham (Al Capone) dans Boardwalk Empire - HBO

Michael Pitt (Jim Darmody) et Stephen Graham (Al Capone) dans Boardwalk Empire – HBO

 

On découvre ainsi dans la première saison les ressorts de cette entreprise, des entrepôts clandestins stockant les caisses de Whisky jusqu’en haut de la chaîne de production. Cette recrudescence de la criminalité va déclencher l’apparition d’escouades policières, spécialement mandatées pour endiguer ce trafic, mais aussi celui des armes. C’est l’agent Van Alden (Michael Shannon) qui va entreprendre ce combat désespéré, à une époque où les milieux de la justice et de la politique sont corrompus.  La narration est constamment découpée de façon géographique passant ainsi d’une scène se déroulant à Atlantic City à une autre située à Chicago ou à New York. Le rythme est soutenu et alterne entre les séquences d’action surgissant de manière inattendue dans une vague de violence inouïe, et les moments plongés dans l’intimité des protagonistes. La rencontre entre Nucky et la jeune immigrée Margaret Schroeder (Kelly MacDonald) en est un parfait exemple, multipliant les enjeux aux niveaux humains qui viennent étoffer le discours criminel de la série. Tous les échelons de la société sont représentés, des plus hauts dirigeants politiques, comme avec le personnage du Commodore, vieil homme acariâtre et opulent à la tête d’Atlantic City, jusqu’à celui de Jim Darmody (Michael Pitt), homme de main et fils spirituel de Nucky de retour de la Grande Guerre.

 

Michael Shannon (Agent Van Alden) dans Boardwalk Empire - HBO

Michael Shannon (Agent Van Alden) dans Boardwalk Empire – HBO

 

Le traumatisme des tranchées est d’ailleurs aussi exploré dans Boardwalk Empire, soulignant les stigmates psychologiques et les séquelles physiques, avec Jim et son acolyte Richard Harrow (Jack Huston), ancien soldat au visage mutilé, reconverti en homme de main. Les non-dits sont ainsi nombreux, renforcés par une caméra saisissante de vérité, davantage dans ses plans d’ensemble que dans ses plans serrés. Cette dernière oppose dans son cadre l’individu et son environnement, de l’habitat à la jetée d’Atlantic City, renfermant dans leur immobilisme les démons des personnages. Le découpage technique se revendique en outre d’un classicisme évident, citant Le Parrain de Coppola dans ses montages alternés pour les règlements de compte, et ses plans en amorce de Nucky qui renvoie à l’évolution de la solitude chez Michael Corleone. Les plans larges sont donc préférés au cœur de l’action, prenant la forme de longs travellings menaçants, à l’exemple de la violence dépeinte. L’image très expressive accompagne ainsi les protagonistes et embarque par la même occasion le spectateur. Le danger du milieu prend la forme de plans de coupes extrêmement incisifs. La mort est à chaque coin de rue, derrière une porte ou dans la réflexion tardive d’un regard. Les rapports de force entre les bandes rivales s’expriment via des plongées et des contre-plongées éloquentes, transformant une simple conversation en un duel épique, qui configure l’héroïsation des personnages.

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Source: CBO Box office

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