Synopsis : Mélange d’interviews, d’extraits de films et de documents d’archives, Electric Boogaloo retrace l’histoire de la compagnie de production Cannon, très active dans les années 80. Cette compilation de moments cultes d’un certain cinéma redonne chair au vivier de quelques uns des plus grands nanars du cinéma sauce Hollywood. Mark Hartley dresse un portrait savoureux et sans compromis de la Cannon et donne la parole à près d’une centaine d’intervenants parmi lesquels Dolph Lundgren, Sybil Danning, Charles Bronson, Chuck Norris, Sharon Stone, Tobe Hooper, Franco Nero, Barbet Schroeder ou Luigi Cozzi qui se rappellent avec humour et sincérité de leur participation aux « œuvres » de la firme mythique. Grandeur et décadence de la Cannon et de ses têtes dirigeantes, Menahem Golan et Yoram Globus, c’est l’aventure unique d’une entreprise qui a changé à jamais l’histoire du cinéma bis.
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Après l’excellent THE GO-GO BOYS Hilla Medalia (notre critique), sorti dans les salles françaises le 22 octobre 2014, voici un deuxième documentaire consacré à l’histoire des studios Cannon fondés par les deux cousins, Menahem Golan et Yoram Globus. Il en est le parfait complément. Les deux producteurs israéliens, pris par un contrat d’exclusivité sur THE GO-GO BOYS, n’interviennent pas dans Electric Boogaloo, laissant place à d’autres commentateurs stars comme Bo Derek, Dolph Lundgren, Michael Dudikoff, le réalisateur Tobe Hooper (Massacre à la tronçonneuse, Poltergeist), la productrice Veronica Fury et bien d’autres. Cela donne au final un témoignage corrosif et cynique car les invités s’expriment sans langue de bois. Ainsi, chacun décrit les succès, les productions ratées et celles trop ambitieuses comme Superman IV et Les Maîtres de l’Univers qui ont eu raison des objectifs à la fois légitimes et mégalos de ces artisans, créateurs de séries B aujourd’hui portées disparues… Cependant, il eut été intéressant d’avoir les interventions de Chuck Norris et de Jean-Claude Van Damme pour enrichir le documentaire en anecdotes, mais le montage apporte suffisamment de matériel pour rendre compte de l’énergie et de la motivation montrées par les deux producteurs. Le film fait également le triste constat qu’aujourd’hui l’industrie hollywoodienne est en manque de producteurs francs-tireurs, aventuriers et fous de cinéma. Malgré ces faiblesses, Electric Boogaloo reste un réel plaisir, conçu en un montage qui ne laisse aucun répit. Les petites histoires et les extraits des différentes productions reflètent tout l’éclectisme des meilleures heures du cinéma d’exploitation.
On passe ainsi du film musical (The Apple, Break Street 84) au cinéma d’action et d’aventure (Over the Top, Cyborg, American Ninja, Delta Force ou encore Invasion USA). C’est l’âge d’or de productions clinquantes, au budget modeste, qui ont contribué à la renommée de la firme en plein boom du marché de la VHS et de la prolifération des vidéoclubs. A l’instar de THE GO-GO BOYS, Electric Boogaloo souligne à nouveau l’appétit des deux cousins pour tous les genres, y compris l’érotisme (L’amant de Lady Chatterley) et l’horreur (Massacre à la tronçonneuse 2 de Tobe Hooper). Ce dernier a signé également deux autres opus pour la Cannon : le sympathique mais raté L’invasion vient de Mars (1986) et surtout Lifeforce (1985) avec une splendide Mathilda May en extraterrestre dénudée. Puis la société, mue par un désir de reconnaissance artistique, s’est aventurée dans la production de grands réalisateurs comme Jean-Luc Godard (King Lear), Franco Zeffirelli (Othello) ou encore John Cassavetes (Love Streams).
Electric Boogaloo s’avère ainsi un précieux témoignage sur les coulisses du cinéma d’exploitation au sein de la machine hollywoodienne. Et dévoile surtout la passion qui animait ces deux hommes qui ont produit en un temps record une belle quantité de films de la série dite B. « Sometimes we make better films, sometimes we don’t make such good films, but we do make films » (« Parfois, nous faisons de bons films, parfois, nous en faisons de mauvais mais au moins, nous faisons des films »), telle est la devise de cet étonnant duo. Après THE GO-GO BOYS, voici un beau documentaire qui rend une nouvelle fois hommage à la mémoire de Menahem Golan, disparu en août 2014 à l’âge de 85 ans.
Thierry Carteret
- ELECTRIC BOOGALOO (Electric Boogaloo : The Wild, Untold Story of Cannon Films) de Mark Hartley, disponible en DVD à partir du 15 Janvier 2015.
- Avec : Dolph Lundgren, Bo Derek, Franco Nero, Tobe Hooper, Molly Ringwald, Robert Forster, Elliot Gould, Richard Chamberlain, Olivia d’Abo….
- Production : Brett Ratner
- Photographie : Garry Richards
- Montage : Jamie Blanks, Sara Edwards, Mark Hartley
- Musique : Jamie Blanks
- Editeur DVD : Luminor
- Durée : 1h47
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