Cine-concert de La Planete des Singes, compose par Jerry Goldsmith, au Royal Festival Hall de Southbank Centre a Londres

Cine-concert de La Planète des Singes, composé par Jerry Goldsmith, au Royal Festival Hall de Southbank Centre a Londres / Photo Jérôme Nicod pour CineChronicle

Le 28 août 2015, Le BBC Concert Orchestra a joué en direct à Londres l’intégralité de la partition de Jerry Goldsmith pour La Planète Des Singes, en accompagnement de la projection simultanée du film sorti en 1968. CinéChronicle y était, une soirée absolument fascinante.

 

 

 

La Planete des Singes - poster

La Planète des Singes – poster

La salle du Royal Festival Hall de Southbank Centre, à Londres, a été le théâtre d’un événement sans précédent avec le BBC Concert Orchestra : pouvoir entendre en continu l’extraordinaire (dé)composition musicale de Jerry Goldsmith pour la première adaptation cinématographique du roman de Pierre Boule. La Planète des Singes (Planet of the Apes) réalisé par Franklin J. Schaffner, est un film majeur, qui a donné lieu à quatre suites directes au cinéma entre 1968 et 1973, une série télévisée en 1974, un reboot par Tim Burton en 2001 et une nouvelle suite en prequels en performance capture depuis 2011.

 

Cinquième œuvre de Schaffner mais premier succès, La Planète des Singes fut l’occasion pour lui de travailler avec Jerry Goldsmith, avec lequel il signera les productions phares de sa courte carrière de cinéaste : Patton (1970), Papillon (1973) et Ces garçons qui venaient du Brésil (1978).

 

Le secret de leur réussite commune tient dans la méthode de collaboration entre les deux artistes : le réalisateur confiait le film au compositeur, lui donnant rendez-vous aux sessions d’enregistrement. Ce n’est donc pas un hasard si l’ensemble des bandes originales de ce duo artistique constitue à chaque fois un nouveau sommet dans le parcours de Goldsmith.

 

 

La Planete des Singes de Franklin J. Schaffner

La Planète des Singes de Franklin J. Schaffner

LA PLANÈTE DES SINGES, UN STATUT CULTE ENTÉRINÉ

 

Pour mieux comprendre l’importance et l’influence de cette pellicule précieuse encore aujourd’hui, il faut se situer dans le contexte de cette incroyable année 1968 : La Planète Des Singes sort sur les écrans américains le 8 février, suivi le 3 avril par 2001 L’Odyssée de l’Espace.

 

Ces deux objets cultes dans le cinéma de science-fiction, au sens littéral du terme, posent chacun la question des origines et la non-acceptation de la descendance naturelle. Pour Kubrick, l’homme ne peut accepter de descendre du singe que par intervention divine, comblant le chaînon manquant. Pour Schaffner, le singe ne peut en aucun cas accepter de descendre de l’homme. Au point de détruire toutes évidences prouvant l’inverse, car rien ne saurait exister avant la rédaction des rouleaux sacrés.

 

Ce bijou filmique n’a ainsi rien perdu de sa force ni de sa clairvoyance, à la vue des destructions actuelles de monuments symboliques au Moyen-Orient, pour des raisons d’extrême croyance. Pour affirmer son point de vue, Kubrick a tourné entièrement en studio cette histoire qui repose sur la beauté de ses effets spéciaux alors que Schaffner a tourné en décors naturels, sans quasiment aucun artifice supplémentaire. Kubrick a misé sur la musique classique pour accompagner ses images poétiques, Schaffner a demandé à Goldsmith une musique ultra-moderne pour accompagner ses plans très novateurs. Il y a une sérénité chez Kubrick tandis que la folie règne en maître chez Schaffner.

 

Musicalement enfin, l’univers autour des œuvres inspirées de La Planète des Singes est très riche. Les plus grands compositeurs ont été convoqués pour exprimer la complexité et la force de cette étonnante franchise. Ainsi, on peut citer chronologiquement Jerry Goldsmith (1968 et 1971), Leonard Rosenman (1971 et 1973), Lalo Schifrin (1974, série TV), Danny Elfman (2001), Patrick Doyle (2011) et Michaël Giacchino (2013).

 

 

Bande originale La Planete des Singes de Jerry Goldsmith

Bande originale La Planète des Singes de Jerry Goldsmith

DANS LA PEAU DE JERRY GOLDSMITH

 

Le public a répondu massivement présent lors de cette soirée du 28 août. Car à bien remarquer, finalement peu de films se prêtent intelligemment à l’expérience du ciné-concert. Son principe repose sur le fait que l’orchestre joue en direct, avec ici une formation constituée d’une soixantaine de musiciens. L’objectif est de mettre la musique au premier plan et les images au second.

 

L’occasion unique de se sentir dans la peau du compositeur lors des sessions d’enregistrement, de comprendre ses choix musicaux, la présence ou non de sa musique sur une scène. L’expérience en devient inouïe, surtout avec une partition aussi atypique que celle de La Planète des Singes. Elle est déstructurée, imprévisible, violente et folle à lier. Le tout sur une base incroyable de percussions, l’une des spécialités de Goldsmith.

 

Sous la direction de Robert Ziegler, collaborateur de Howard Shore et de Michaël Giacchino, chaleureusement accueilli par la salle, le BBC Concert Orchestra a débuté son interprétation par la fanfare du logo 20th Century Fox (qui figure sur l’album). Frissonnements démesurés de plaisir pour ce court morceau de seize secondes, absolument mythique (il est le même depuis les débuts du studio). Applaudissements nourris, le bonheur se lit alors sur tous les visages, l’acoustique de la salle sert parfaitement la couleur de chaque instrument de l’orchestre.

 

 

Scène de l'amerrissage dans La Planète des Singes de Franklin J. Schaffner

Scène de l’amerrissage dans La Planète des Singes de Franklin J. Schaffner

FOLIES CONJUGUÉES

 

Le main title est un concentré de l’ensemble de la partition, au niveau du rythme, du choix d’instruments très atypiques, des percussions, de l’absence de mélodie pure et de la force des touches de piano. Le générique pose les bases de ce qui suit, Goldsmith utilisera la même méthode pour Alien de Ridley Scott, dix ans plus tard (d’autres points communs existent entre ces deux bandes originales légendaires). Crash landing, qui accompagne l’amerrissage forcé du vaisseau, commence avec des vagues très courtes mais très intenses à la Bernard Herrmann pour se faire ensuite léger, comme les battements d’une horloge, avant que la grosse caisse ne réveille l’ensemble de l’orchestre. Dès lors, chaque instrument (tambour, caisse) joue avec force sa propre histoire sans se soucier de l’harmonie générale, puisque La Planète des Singes cherche à laisser le spectateur dans son rôle d’humain perdu au milieu d’un monde désordonné, décalé, complètement fou. Les plans azimutés de Schaffner sont sur la même longueur d’onde. La salle est hypnotisée. Ce morceau est le premier d’une intense richesse musicale. Le voir jouer en direct est un spectacle en soi. À l’écoute, l’oreille perçoit des sons dont l’œil identifie la provenance. Les instruments à vent les plus étranges se succèdent dans les mains des musiciens. Les percussions tribales sont à droite de la scène alors que la grosse caisse est au fond.

 

Il est impossible ici de citer l’ensemble des musiciens qui ont interprété avec une justesse absolument divine toute la complexité de cette musique. The Clothes Snatchers est un autre score d’une force inconsciente insensée. Goldsmith n’illustre pas l’image, il rajoute sa folie à celle de Boule et de Schaffner. Il accompagne la scène des trois survivants découvrant enfin de l’eau et un lac, alors que les autochtones leur dérobent puis détruisent leurs vêtements et équipements. Dès lors, ils sont nus, sans défense, sur une planète hostile. La folie monte d’un cran, ce n’est qu’une étape. The Hunt n’est pas une chasse anodine ; on découvre un gorille sur un cheval rabattant les autochtones dans un filet. La corne, qui rythme la chasse, est épidermique, comme un cri de folie dans la nuit. À part chez Herrmann, pas certain qu’il existe un morceau d’une aussi intense terreur. Et comme les derniers râles après la mise à mort, la fin fait écho à celle du thème de la douche de Psychose. D’une manière générale, c’est l’une des bandes originales les plus hermanniennes de Goldsmith. Ces deux morceaux avaient été d’ailleurs choisis par Laurent Petitgirard pour le formidable concert joué à Paris en mai dernier (notre article).

 

Autre moment de bravoure, No Escape, la tentative d’évasion de Taylor, incarné par Charlton Heston. La scène est entièrement accompagnée par la musique. Les variations de rythme et les évolutions dans le choix des instruments escortent à la perfection la succession des tentatives : dans les couloirs, sur les toits, dans le musée, suspendu à un filet, sur un cheval. Magistral.

 

 

Les trois sages dans La Planete des Singes de Franklin J. Schaffner

Les trois sages dans La Planète des Singes de Franklin J. Schaffner

UNE LEÇON DE CINÉMA

 

Schaffner a adopté le point de vue humain dans la mise en scène. La folie qu’il décrit est celle du regard des hommes sur les singeries dont ils sont esclaves. Mais il intervient aussi au second degré. Ainsi, dans la scène du jugement, où les trois sages doivent écouter le témoignage de cet humain parlant, l’un se cache les yeux, l’autre les oreilles et le troisième la bouche. Des trois sages aux trois singes, le pas cocasse est franchi. Goldsmith rajoute à ce second degré de moquerie, ce simulacre de procès, avec une musique qui condamne par avance le prévenu : une cloche au rythme lent préempte la sentence. Elle est beaucoup plus présente avec l’orchestre qu’en écoute sur l’album, son effet est décuplé.

 

La salle a débuté ses applaudissements dès la dernière image, pendant le générique de fin, puis, s’est levé le long-métrage terminé. Robert Ziegler a spécialement fait saluer certaines performances, au piano (Ben Dawson, brillant), aux cornes (Mark Johnson, envoûtant) et aux percussions (Alasdair Malloy, inspiré). Un peu déboussolé par ce formidable spectacle, il a fallu revenir sur Terre. Ce fût une soirée magique.

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