Synopsis : John, encore adolescent, rentre chez son père après avoir purgé sa peine de prison et aspire à un nouveau départ. Mais la communauté locale n’a ni oublié, ni pardonné son crime. Sa présence attire les pires pulsions chez chacun, l’atmosphère devient menaçante, proche du lynchage. Rejeté par ses anciens amis et abandonné par ses proches, John perd espoir et la violence qui l’a conduit en prison refait peu à peu surface. Dans l’impossibilité d’effacer le passé, il décide d’y faire face.
♥♥♥♥♥
Après avoir glané plusieurs prix internationaux pour ses courts métrages, Magnus von Horn passe pour la première fois au format long. Coup d’essai fructueux ; Le Lendemain, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes en 2015, a remporté le Guldbagge Award – équivalent suédois des César – du meilleur réalisateur. Il retrace ici le parcours de John, incarné avec conviction par Ulrik Munther, chanteur pop à succès qui obtient son premier rôle au cinéma. Cet adolescent retrouve la liberté et sa famille (père et petit frère) après avoir passé deux ans en prison. Son désir de réinsertion au sein de son lycée se heurte à l’hostilité de ses camarades. Ses proches ont également du mal à le comprendre et à gérer son retour à la maison. Son rejet par la communauté engendre tensions et drames. Le Lendemain évoque bien sûr Blackbird, Classe à Part, LE MONDE DE CHARLIE (notre critique) ou encore Carrie au Bal du Diable. Toutefois, Magnus von Horn réussit sans mal à renouveler le genre grâce à des choix audacieux et originaux. Il traite son sujet par le prisme de l’adolescent criminel ; option assez osée pour être soulignée. Le Lendemain nous séduit d’emblée par son ambiance pesante, qui renvoie à un univers simenonien : il pleut souvent, la campagne est grise et le drame couve en permanence. Autre atout majeur, le mystère entourant les circonstances qui ont conduit John en prison est très bien exploité. On ne découvre que par bribes la gravité et l’origine de son geste fatidique ; ce procédé ménage un suspense dense et haletant. L’étude psychologique des personnages suscite également l’intérêt ; on suit au plus près les errements et le mal-être de John dans sa tentative de réinsertion. Dans le même temps, son père se débat piteusement face à ce jeune homme perdu tout en gérant avec son propre père sénile et dépendant. Quant à son plus jeune fils, il se plie difficilement à sa discipline. Magnus von Horn étaye son propos en misant sur la distanciation ; la caméra se place fréquemment loin des protagonistes et des actions pour nous laisser respirer. Cet éloignement judicieux crée un contrepoids par rapport à l’atmosphère étouffante. Le récit soulève des questions profondes comme la capacité à pardonner, le désir de vengeance et la violence qui sommeille dans chaque être humain. Magnus von Horn nous montre avec justesse le point de vue et les réactions des deux camps face au retour de John. Il ne s’autorise aucune concession dans sa description de la brutalité. Tout est frontal et assumé. Malgré quelques baisses de rythme par moments, Le Lendemain comporte de multiples qualités d’une intensité toujours croissante.
.
Christophe Binet
.
.
.
- LE LENDEMAIN (Efterskalv) écrit et réalisé par Magnus von Horn en salles le 1er juin 2016.
- Avec : Ulrik Munther, Mats Blomgren, Alexander Nordgren, Wieslaw Komasa, Loa Ek, Ellen Jelinek, Oliver Heilmann, Felix Göransson, Inger Nilsson, Sven Ahlström, Stefan Cronwall…
- Production : Marisz Wlodarski, Madeleine Ekman
- Photographie : Lukasz Zal
- Montage : Agnieszka Glinka
- Décors : Jagna Dobesz, Henrik Ryhlander
- Costumes : Anna Karin-Cameron
- Distribution : Nour Films
- Durée : 1h41
.