Synopsis : Turin, 1969. Massimo, un jeune garçon de 9 ans, perd sa mère dans des circonstances mystérieuses. Quelques jours après, son père le conduit auprès d’un prêtre qui lui explique qu’elle est désormais au paradis. Massimo refuse d’accepter cette disparition brutale. 1990. Massimo est devenu un journaliste accompli, mais son passé le hante. Alors qu’il doit vendre l’appartement de ses parents, les blessures de son enfance tournent à l’obsession…
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En ouverture de la dernière 48e Quinzaine des Réalisateurs, Marco Bellocchio signe avec Fais de beaux rêves une œuvre gorgée d’émotions et de tendresse, mais aussi de douleurs et de fatalisme. Le cinéaste italien a retrouvé le Festival de Cannes après avoir présenté notamment dans cette section Le Diable au corps en 1986, ou encore plusieurs films en compétition officielle, comme Le Saut dans le vide (1980) et Vincere (2009). Le récit s’ouvre sur les péripéties du jeune Massimo (Nicolo Cabras) et de sa mère (Barbara Ronchi). Rapidement, l’enfant est confronté à la disparition aussi soudaine qu’intrigante de cette figure maternelle avec laquelle il nouait une relation profonde et fusionnelle. Les séquences de danse, de rire et de visionnage de Belphegor (version de Claude Barma, 1965) confirment la puissance du lien qui les unit. Bellocchio exploite, diégétiquement, l’apparition de plans tirés de ce feuilleton classique qui se transforment en véritable leitmotiv, rythmant la peine incurable de Massimo. Au fil de son récit, on découvre ce personnage sur trois périodes de son existence : l’enfance donc, mais aussi le début de l’adolescence et l’âge adulte. Soulignons d’ailleurs l’excellente performance du petit Nicolo Cabras qui incarne la première période de ce garçon, dévoilant une palette d’émotions saisissante. En développant les différentes étapes de la vie de ce jeune homme, le réalisateur évite de s’embarquer dans une narration linéaire et multiplie les allers-retours entre les époques. Ce choix narratif permet astucieusement d’approfondir l’instabilité de Massimo et les troubles qui découlent de sa perplexité envers les conditions du décès de sa mère.
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Bien que le protagoniste semble atteindre un certain degré de réussite professionnelle grâce à son statut au sein d’un grand journal italien, la moralité de ses agissements pèse sous le poids du doute et de la remise en question. Il faut voir comment il participe à la manipulation d’images alors qu’il est envoyé comme reporter lors du siège de Sarajevo en 1994, ou encore lorsqu’il est chargé de rédiger un papier sur le suicide d’un richissime homme d’affaires italien. Si la fascination de Massimo pour le fantôme de Belphegor s’avère être un exutoire psychologique, c’est par le biais d’une relation sentimentale pour l’infirmière Elisa, incarnée par Bérénice Bejo dans une partition assez sobre, qu’il va retrouver une forme d’assurance et d’estime de soi. Ce nouvel état d’esprit amène le personnage à élucider les réelles circonstances du décès de sa mère, sans que sa découverte ne révèle une véritable surprise. La relation neutre exploitée avec son père (Guido Caprino) laissait présager une issue inévitablement tragique. Sur la base d’une mise en scène épurée et sans revendiquer une démarche outrancière, Marco Bellocchio s’écarte d’un style plus théâtralisé qui lui est propre. Cet angle d’approche lui permet de livrer une œuvre intense explorant la puissance des émotions liées aux motifs de l’amour et du deuil.
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- FAIS DE BEAUX RÊVES (Fai bei sogni) de Marco Bellocchio en salles le 28 décembre 2016.
- Avec : Valerio Mastandrea, Bérénice Bejo, Guido Caprino, Nicolo Cabras, Dario Dal Pero, Barbara Ronchi, Linda Messerklinger, Ferdinando Vetere, Lorenzo Monti…
- Scénario : Marco Bellocchio, Valia Santella et Edoardo Albinati d’après l’oeuvre d eMAssimo Gramellini
- Production : Beppe Caschetto
- Photographie : Daniele Ciprì
- Montage : Francesca Calvelli
- Décors : Marco Dentici
- Costumes : Daria Calvelli
- Son : Gaetnao Carito
- Musique : Carlo Crivelli
- Distribution : Ad Vitam
- Durée : 2h11
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