L’Idéal de Frédéric Beigbeder : critique

Publié par Erwin Haye le 16 juin 2016

Synopsis : L’ancien concepteur-rédacteur Octave Parango de « 99 francs » s’est reconverti dans le « model scouting » à Moscou. Cet hédoniste cynique mène une vie très agréable dans les bras de jeunes mannequins russes et les jets privés de ses amis oligarques… jusqu’au jour où il est contacté par L’Idéal, la première entreprise de cosmétiques au monde, secouée par un gigantesque scandale médiatique. Notre antihéros aura sept jours pour trouver une nouvelle égérie en sillonnant les confins de la Russie post-communiste, sous les ordres de Valentine Winfeld, une directrice visuelle sèche et autoritaire. Entre les réunions de crise à Paris, les castings à Moscou, une élection de Miss en Sibérie, une fête chez un milliardaire poutinien et une quête des « new faces » aux quatre coins de l’ex-URSS, le fêtard paresseux et la workaholic frigide vont apprendre à se supporter et peut-être même à se sauver.

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L'idéal de Frédéric Beigbeder - affiche

L’idéal de Frédéric Beigbeder – affiche

Après de multiples péripéties, l’adaptation du roman Au secours pardon de Frédéric Beigbeder voit enfin le jour sous le nom de L’Idéal, avec Gaspard Proust dans la peau du mythique double de l’écrivain, Octave Parango. « Péripéties » est un faible mot, tant le projet fut repoussé à maintes reprises. Ce roman étant la suite indirecte de 99F, Jan Kounen, réalisateur du premier opus en 2007, voulait rempiler après le succès critique et public de son adaptation. Jean Dujardin devait reprendre le rôle de l’ex-publicitaire dépressif qu’il incarnait si bien. Mais le projet n’a jamais vu le jour. Presque dix ans plus tard, Beigbeder, transformé en réalisateur et rédacteur en chef de magazine, décide de ressortir les vieux cartons, de s’emparer de la caméra et de proposer sa propre adaptation de son livre. Résultat : L’Idéal est un simili-Kounen, une grossière contrefaçon. Le rapprochement entre 99 francs et L’Idéal, séparés par les années, n’avait a priori pas lieu d’être. Pourtant, la réalisation de Frédéric Beigbeder force à la comparaison. On retrouve un schéma narratif quasi identique, donc prévisible, où Octave Parango, engagé par une grande société, assiste à une réunion de crise et doit sauver l’image d’un groupe industriel. Ce dernier finit par se retourner contre le système capitaliste dont il fait partie et se venge avant d’effectuer un retour à la nature, loin du monde perverti par l’ultra-libéralisme. En ce qui concerne les choix de mise en scène, Beigbeder révise les classiques de Kounen. Le réalisateur veut choquer avec un excès de sexe, de drogue, d’alcool et d’argent, le tout mixé et rythmé par un montage épileptique sous speed. À l’image des oligarques russes qu’il dépeint, Beigbeder tente d’aller toujours plus loin, plus haut, plus fort. En s’engouffrant dans la surenchère, L’Idéal devient donc un sous 99 francs.

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Au secours pardon raconte l’histoire d’un homme entamant sa crise de la quarantaine qui erre avec mélancolie dans les paysages de la Russie post-communiste. Si le leitmotiv d’une société globalisée à outrance est présent, l’œuvre se recentre davantage sur les sentiments de son personnage. L’amour qu’entretient Octave avec la magnifique Lena, 14 ans, est impossible. Dans le roman, Beigbeder nous plonge dans les questionnements obsédants de son personnage. Une relecture de Lolita de Vladimir Nabokov qui a son charme et qui pouvait faire l’objet d’une belle adaptation cinématographique. Cependant, Beigbeder préfère trahir la trame de son roman ; il met ici en avant la satire du monde de la mode et réduit l’histoire d’amour et les interrogations d’Octave à de simples apartés sans véritable profondeur. Le film de Jan Kounen était une comédie dramatique très noire et dérangeante. L’idéal n’est qu’une comédie légère grand-guignolesque qui feint d’être bienpensante et grinçante, ce qui lui enlève au final tout crédit.

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Quant aux personnages, ils son terminés à la Vodka. En atteste la prestation de Gaspard Proust, qui enlève toute la complexité du personnage d’Octave Parango pour le présenter comme un homme emprunté et faussement cynique. Les autres personnages comme Valentine Winfeld ou Sacha, joués respectivement par Audrey Fleurot et Alekseï Guskov, n’ont pas de constance et alternent entre comportements autoritaires et doucereux d’une scène à l’autre. Seul Jonathan Lambert en patron(ne) transgenre montre que son personnage en a encore, de la verve et de la prestance. À l’origine, L’Idéal devait s’appeler 99 roubles, c’est malheureusement la valeur de ce film. Quelques rares bonnes idées de Frédéric Beigbeder ne suffisent pas pour atteindre les normes du « nombre d’or » au cinéma. En se convertissant en L’Idéal, le séduisant projet a subi une énorme dévaluation. On perd au change et on se retrouve avec le 99 francs du pauvre.

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Erwin Haye

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  • L’IDÉAL réalisé par Frédéric Beigbeder en salles depuis le 15 juin 2016.
  • Avec : Gaspard Proust, Audrey Fleurot, Jonathan Lambert, Anamaria Vartolomei, Camille Rowe, Jérôme Niel, Alekseï Guskov…
  • Scénario : Frédéric Beigbeder, Nicolas Charlet, Bruno Lavaine, Yann Le Gal et Thierry Gounaud d’après Au secours pardon de Frédéric Beigbeder
  • Production : Ilan Goldman
  • Photographie : Gilles Porte
  • Montage : Dorian Rigal-Ansous
  • Décors : Stanislas Reydellet
  • Costumes : Nadia Chmilewsky
  • Distribution : Légende Distribution
  • Durée : 1h30

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