Concert inoubliable Elmer Bernstein au Royal Albert Hall à Londres

Publié par Jérôme Nicod le 12 juillet 2017
Elmer Bernstein - concert Royal Albert Hall - presentation John Landis

Elmer Bernstein Рconcert Royal Albert Hall Рpr̩sentation John Landis / Cr̩dit photo J̩r̫me Nicod pour CineChronicle

Elmer Bernstein aurait eu 95 ans cette année. Pour l’occasion, son fils Peter lui a rendu un vibrant hommage, pendant près de deux heures d’une pure magie hollywoodienne. Un régal absolu.

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Le cinéma et le public d’aujourd’hui semble avoir un peu oublié les grands compositeurs des années 1950-70. Mis à part quelques dinosaures que le génie a maintenu en vie et en activité (John Williams, Ennio Morricone, Lalo Schifrin et Philippe Sarde), les autres nous ont laissés une oeuvre en héritage. Elmer Bernstein est contemporain de Bernard Herrmann, Dimitri Tiomkin, Alex North, Nino Rota, Jerry Goldsmith, Maurice Jarre, Henry Mancini ou encore John Barry. Les concerts de l’oeuvre de Bernstein sont extrêmement rares, d’autant plus ici, ce 18 juin dernier au Royal Albert Hall à Londres, avec son fils Peter, dirigeant le Royal Philharmonic Orchestra, et l’indispensable John Landis à la présentation.

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LE SYMBOLE D’HOLLYWOOD

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Sur scène, John Landis cite alors quelques cinéastes avec lesquels Bernstein a collaboré : Otto Preminger, Cecil B. DeMille, Anthony Mann, Delmer Daves, Vincente Minnelli, Robert Mulligan, John Sturges, Michael Curtiz, John Frankenheimer, Henry Hathaway, John Ford, George Roy Hill, Sydney Pollack, William Wyler, Don Siegel, Richard Fleischer, Stanley Donen, Fred Zinnemann, Stephen Frears, Martin Scorcese, Francis Ford Coppola… et moi, conclut-il en souriant, sous un tonnerre d’applaudissements. Une sacrée carrière, peut-être la plus riche qu’aucun compositeur n’ait jamais connu. 230 compositions, dont 80 pour la télévision. Une institution. Peter Bernstein, face à l’orchestre, écoute religieusement les paroles de Landis, qui situent chaque morceau et lui donnent une émotion pré-musicale.

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Le premier temps fort est monumental, la suite musicale des Dix Commandements. Avec humour, Landis précise que DeMille a convoqué Bernstein pour lui demander de composer de la musique comme au temps des Égyptiens : mais personne ne savait à quoi elle ressemblait, maintenant tout le monde sait à quoi elle ressemble. Plus encore que sur n’importe quel CD, c’est le souffle des cuivres qui emporte la salle. Cors, trombones, l’aspect massif et profond de la suite musicale recèle bien des émotions. Bernstein a en commun avec Goldsmith l’utilisation des cuivres. Il compose de la musique qui s’écoute avec les yeux, et les images, absentes de la salle, sont dans tous les esprits. Rupture totale de style ensuite avec le génial générique de Hawaï (1966). À l’inverse, ici ce sont les percussions qui font le travail introductif. C’est assez cocasse de voir un orchestre symphonique jouer cette première partie exotique.

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Elmer Bernstein - concert Royal Albert Hall - direction Peter Bernstein

Elmer Bernstein Рconcert Royal Albert Hall Рsous la direction de Peter Bernstein / Cr̩dit photo J̩r̫me Nicod pour CineChronicle

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BERNSTEIN PÈRE ET FILS À LEUR MEILLEUR

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Habilement, la sélection se poursuit avec L’Homme au Bras d’Or, un chef-d’oeuvre partagé entre Otto Preminger et Elmer Bernstein. Indissociable, indémodable, insurmontable. Pour l’occasion, de grands jazzmen ont rejoint l’orchestre. L’interprétation est magistrale. Un peu plus lente que les versions d’albums. La composition orchestrale lui donne une majesté, que le soliste trompette ramène au jazz. Une perfection. Au premier rang de l’orchestre, les quatre femmes violoncellistes ont le sourire. Un mouvement d’épaule, un clin d’oeil complice. Et puis les sourires deviennent une démesure, elles vivent l’instant auquel elles participent. Elles ne jouent plus la musique, elles sont devenues la musique. C’est tout le Royal Albert Hall qui frémit, de ce jazz emblématique. Le noir et blanc a remplacé la couleur, Sinatra hante les lieux. Quatre minutes éblouissantes, inoubliables.

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Le fragile piano qui lance le morceau suivant réussit le pari de la subtilité, et puis la conclusion du premier acte est déjà arrivée : une suite musicale de six minutes des Sept Mercenaires. Un nouveau cadeau d’interprétation, remarquablement fidèles aux versions dirigées par Elmer Bernstein. Il n’était pas possible de terminer le premier acte sans une musique de western, le genre dans lequel Bernstein est sans conteste le meilleur de sa catégorie. Il a inventé la musique de western, la vraie, celle dont le rythme est calqué sur les pas des chevaux, celle qui a si souvent accompagné John Wayne dans des classiques du genre.

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Elmer Bernstein - concert Royal Albert Hall - John Landis et Peter Bernstein

Elmer Bernstein – concert Royal Albert Hall – John Landis et Peter Bernstein

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JE VEUX ELMER BERNSTEIN

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Si la présence de John Landis peut surprendre le néophyte, il est le cinéaste avec lequel Elmer Bernstein a le plus travaillé, avec onze collaborations. Après deux premières oeuvres, Universal confie au jeune Landis les reines de American College (Animal House, 1978), oeuvre commune avec Ivan Reitman (producteur) et Harold Ramis (scénariste), compagnons de route du National Lampoon. Au moment du montage, un producteur d’Universal lui demande son souhait pour composer la musique. « Je veux Elmer Bernstein ! », déclara avec aplomb le John Landis. « On ne peut pas avoir Bernstein pour ça ! » Landis appelle alors Peter Bernstein, avec lequel il était à l’école. Elmer voit le film et accepte sur le champ. Par la suite, lui qui n’avait jamais composé pour des véritables comédies, en fera de nombreuses, apportant un style décalé à merveille : Y-a-t’il un Pilote dans l’avion (1980), Un Fauteuil pour Deux (1983), SOS Fantômes (1984), Drôles d’Espions (1985), Wild Wide West (1999).

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Pour l’heure, deux exemples de collaboration entre Bernstein et Landis sont au programme : 3 Amigos et Le Loup-Garou de Londres. Le premier est un fabuleux exemple du style de Bernstein adapté à une comédie. Il change très peu de choses par rapport à un western classique, mais ce subtil second degré, ce léger recul, ce clin d’oeil, correspond parfaitement à la mise en scène et au style de Landis : prolonger une scène pour lui conférer une pincée d’absurdité, insérer un close-up décalé par rapport au sens de la scène. Leur parcours commun a du sens. Sur son fauteuil, à quelques mètres de la scène, John Landis écoute la musique de son film, le sourire aux oreilles et la tête qui suit le rythme. Les quatre minutes réjouissantes de 3 Amigos passent trop vite, on en redemande, une forme de plaisir à l’état pur.

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Affiche Elmer Bernstein concert Royal Albert Hall

Affiche Elmer Bernstein concert Royal Albert Hall

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DEUX SUITES INÉDITES ABSOLUMENT DÉMENTES

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Mais les deux moments les plus attendus du concert sont encore à venir, deux suites inédites. Celle du Loup-Garou l’est à plus d’un titre. On entend peu de musique dans le film, et ce que l’on entend n’a jamais été édité complètement. Bernstein a aussi composé un morceau pour la transformation de l’homme en loup, qui n’est pas à l’image. Pour la première fois, une suite va nous donner la version musicale intégrale imaginée par Bernstein. En présence du réalisateur, premier spectateur, qui retrouve sans conteste ses émotions d’il y a trente-six ans. Son plaisir rajoute au nôtre, pour cette incroyable suite horrifique de six minutes, déstructurée, dont les notes et le rythme se transforment à l’image de l’homme-loup. Cloches, percussions inattendues, martèlent les esprits. Le corps de Landis est fusionnel avec les percussions orchestrales. Extraordinaire.

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La Grande Evasion l’est tout autant, pendant près de sept minutes. Quelle magnifique interprétation. Les tambours militaires savent prendre le dessus par rapport aux versions connues. Il n’y a plus de superlatifs. Landis regarde la salle, extatique lui aussi, il s’alimente du plaisir de voir l’Albert Hall réagir avec autant de plaisir au travail d’Elmer et de Peter Bernstein. Une soirée inoubliable d’émotions et de plaisirs partagés.

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CONCERT ELMER BERNSTEIN AU ROYAL ALBERT HALL

Sous la direction de Peter Bernstein :

  1. National Geographic, thème, série TV, 1966
  2. Les 10 commandements (The Ten Commandments), suite, 1956
  3. Hawaï, générique, 1966
  4. Hollywood and the Stars, thème, série TV, 1963-64
  5. L’Homme au Bras d’Or (The Man with the Golden Arm), thème, 1955
  6. Du Silence et des Ombres (To Kill a Mockingbird), suite, 1962
  7. Les 7 mercenaires (The Magnificent Seven), suite, 1960
  8. -entracte
  9. La Rue Chaude (Walk on the wild side), thème, nouvel arrangement, 1962
  10. Du Haut de la Terrasse (From the Terrace), suite, 1960
  11. Les 3 Amigos (3 Amigos), end title, 1986
  12. Le Temps de l’Innocence (The Age of Innocence), valse & end titles, nouvel arrangement, 1993
  13. Le Loup-Garou de Londres (An American Werewolf in London), suite inédite, 1981
  14. La Grande Evasion (The Great Escape), suite inédite, 1963
  15. -rappel :
  16. Le Grand Chantage (Sweet Smell of Success), 1957

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Source: CBO Box office

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