L’Évangile selon saint Matthieu (Il Vangelo seconds Matteo) de Pier Paolo Pasolini (1964)
Pour un réalisateur à la réputation controversée, marxiste et surtout athée, il peut être étrange de voir Pasolini s’attaquer à une oeuvre religieuse. D’autant que ce dernier venait d’écoper un an plus tôt de quatre mois de prison avec sursis pour outrage à la religion pour le court-métrage collectif : Rogopag (La Ricotta).
Pour son cinquième film en tant que réalisateur, Pier Paolo Pasolini s’attaque à l’évangile selon Saint Matthieu. Une adaptation qui va bien plus loin qu’une simple illustration sur grand écran de la vie du Christ. Pasolini va jusqu’à réédifier voire reconstruire le « sacré ». Son long-métrage acquiert en outre une dimension poétique, philosophique mais aussi politique. D’un côté, il donne le rôle du Christ, personnage saint hautement vénéré, à un syndicaliste espagnol, et de l’autre il ne manque pas d’appuyer le clivage entre les différentes classes du peuple.
Nous sommes ici très loin des spectacles et vieux effets spéciaux hollywoodiens. Pasolini souhaite imprimer en son oeuvre une forte sensation de dénuement et de sobriété. Ce qu’il trouve d’ailleurs dans le sud de l’Italie, dans une zone vierge de toute civilisation, un quartier semi-troglodytique de la ville de Matera. La musique vient elle aussi apporter son lot d’émotions où se mêle un cocktail de Bach, Mozart, Webern et Prokofiev.
L’Évangile selon Saint Matthieu a remporté le prix spécial du jury au Festival de Venise en 1994. Mais aussi le Grand prix de l’Office Catholique Internation du Cinéma (OCIC). Une année plus tard, Pasolini fut sacré meilleur réalisateur par le syndicat national des journalistes italiens.
PC