Aspirant à une vie meilleure, Oscar Ramirez et sa famille quittent les montagnes du nord de la Philippine où ils vivent et viennent s’installer dans la ville de Metro Manila. Proie idéale dans cette ville impitoyable, Oscar va devoir tout risquer pour les siens.
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Avec ses deux premiers longs-métrages, Sean Ellis s’est taillé une réputation de réalisateur doué, aimant particulièrement les images léchées. Sa fâcheuse tendance à jouer au petit malin nous empêchait cependant d’adhérer totalement à ses films. En effet, Cashback, adapté de son court-métrage, et The Broken, esthétisants à souhait, étaient de belles coquilles vides qui « trahissaient » son passé de réalisateur de films publicitaires et de photographe de mode. La forme prenait le pas sur le fond. Du moins jusqu’à présent. En quête de renouveau, le cinéaste revient avec une Å“uvre surprenante, humble, passionnante et surtout bouleversante, récompensée par le Prix du Public au dernier festival de Sundance 2013. Le récit se concentre sur Oscar Ramirez (Jake Macapagal), un fermier des montagnes du nord des Philippines qui décide d’aller tenter sa chance à Metro Manila, n’arrivant plus à subvenir aux besoins de sa famille. Il trouve un emploi de convoyeur de fonds et croise sur sa route Ong (John Arcilla), un collègue expérimenté et désabusé qui le prend sous son aile. Avec sa femme et ses deux filles, Oscar fait le douloureux apprentissage de la survie dans une mégapole gangrenée par la violence et la corruption… Avec un petit budget, des acteurs locaux et une équipe réduite, Sean Ellis débarrasse son film des oripeaux qui caractérisaient jusque-là son cinéma. Muni d’un appareil photo numérique, il se colle au plus près de ses personnages les filmant à l’épaule de manière subtile. On évite ici la caméra parkinsonienne.
Le cinéaste privilégie d’emblée l’immédiateté et la véracité des images. La manière dont il se met au service de son histoire crée une identification et une empathie totale avec les personnages et nous fait sincèrement nous demander ce qu’ils vont devenir. Car les épreuves qu’Oscar et sa femme doivent traverser (trouver un logement, un dentiste pour la petite et un travail) sont légions et les habitants de cette ville ne leur veulent pas tous du bien. En dépit de la tension, des rebondissements et de la cruauté des situations, Sean Ellis n’oublie jamais de nous faire de vraies propositions de cinéma. En effet, Metro Manila démarre comme un drame social, mais l’œuvre bascule progressivement dans le polar et nous tient en haleine jusqu’à l’acte final saisissant sans jamais omettre le facteur humain. Aucun jugement n’est porté sur les personnages, qui agissent tous dans un seul et unique but : survivre dans la jungle urbaine de Métro Manila. Cette absence de manichéisme, loin de nous tenir à distance des protagonistes, permet justement d’avoir le sentiment de les comprendre jusque dans leurs contradictions et d’être au plus près d’eux. Ainsi Metro Manila, dédié à sa mère décédée l’année dernière, démontre que Sean Ellis est à l’aise aussi bien dans le drame que dans le thriller. Il signe sans aucun doute son film le plus abouti. On peut d’ailleurs entrapercevoir les lueurs d’une nouvelle phase dans sa jeune carrière. Du moins, on l’espère très fort…
Nicolas Christian
METRO MANILA de Sean Ellis en salles le 17 juillet 2013 avec Jake Macapagal, John Arcilla, Althea Vega, Ana Abad-Santos, Miles Canapi, Moises Magisa, Erin Panlilio, JM Rodriguez. Scénario : Sean Ellis, Frank E. Flowers. Productrice : Mathilde Charpentier. Photographie : Sean Ellis. Montage : Richard Metler. Musique : Robin Foster. Direction Artistique : Alfi Antonio Orseo.  Distribution : Haut et Court. Durée : 1h55.
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