New York, 1974. Chris, la cinquantaine, est libéré pour bonne conduite après plusieurs années de prison pour un règlement de compte meurtrier. Devant la prison, Frank, son jeune frère, un flic prometteur, est là, à contrecœur. Ce ne sont pas seulement des choix de « carrières » qui ont séparé Chris et Frank, mais bien des choix de vies et une rivalité depuis l’enfance. Leur père Léon, qui les a élevés seul, a toujours eu pour Chris une préférence affichée, malgré les casses, la prison… Pourtant, Frank espère que son frère a changé et veut lui donner sa chance : il le loge, lui trouve un travail, l’aide à renouer avec ses enfants et son ex-femme, Monica. Malgré ces tentatives, Chris est vite rattrapé par son passé et replonge. Pour Frank, c’est la dernière des trahisons, il ne fera plus rien pour Chris. Mais c’est déjà trop tard et le destin des deux frères restera lié à jamais
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Les liens du sang ne mentent pas. Guillaume Canet non plus. Il ne vous mentira ni sur l’époque, ni sur les années 70 flamboyantes et leurs pantalons pattes d’eph, les femmes aux fourneaux, les hommes au boulot (sauf lorsqu’il s’agit de la prostitution) ni sur ces gangsters qui, sortis de prison, veulent se ranger sans succès. Nuls mensonges constatés non plus dans les rapports hommes-femmes via la bienséance de l’époque. Une atmosphère qui ne dit rien qui vaille, qui a du mal à se tendre et à susciter l’empathie. Il en ressort une photographie un peu blafarde, comme si on avait passé le tout sous instagram filtre orange, même si on y perçoit le grain des années 70. Ce qui nous emporte un peu dans le temps, c’est la musique sur ce bon vieux tourne disque devenu vintage, qui aide certaines séquences à trouver une énergie nouvelle. Blood Ties, déjà tiré d’un premier long métrage Les liens du sang de Jacques Maillot, dans lequel Guillaume Canet joue au côté de François Cluzet, lui-même adapté du roman Deux frères, un flic, un truand de Michel et Bruno Papet, s’efforce de se concentrer sur chaque personnage, chaque scène, dans un souci tellement constant qu’il en émane une réalisation presque trop contrôlée. Des scènes longues, étirées, comme si l’on avait oublié de les couper au montage. Après le succès des Petits Mouchoirs, Ne le dis à personne et de Mon idole, le projet d’un scénario emmené outre-Atlantique a fonctionné. Il collabore alors avec James Gray à la coécriture, compose un casting alléchant avec Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Clive Owen, Billy Crudup, Zoé Saldana, James Caan, et occupe son producteur Alain Attal (Polisse, Radiostars et Un balcon sur la Mer) à trouver 24,7 millions de dollars.
Billy Crudup, remplaçant un certain Mark Wahlberg qui s’est désisté au prétexte que ce rôle était trop proche de The Fighter, est un bon flic, un bon fils. Sa faille est son frère, qui sème le trouble après sa sortie de prison. Choisit-on sa famille ou l’ordre et la morale ? Clive Owen n’est un gangster violent. Ses faiblesses deviennent sa force émotionnelle et son intelligence de la situation. On apprend vite qu’il a fait de la prison pour ce que certains jugeront une bonne raison. Son ambition de s’en sortir est réelle, mais ce que va lui offrir la vie est trop étriqué, trop limité. Marion Cotillard se prostitue pour vivre en même temps qu’elle tente d’éduquer leurs enfants. Des enfants déstabilisés, incapables de distinguer leur père de leur oncle. Deux frères, deux rivaux qui ne supportent plus le destin respectif de l’autre, obligés cependant encore de s’entendre pour un père qui les a élevés seul mais qui a sans cesse marqué sa préférence. Une jalousie malsaine qui entrave leur vie comme un mauvais sang. Là où Blood Ties rattrape sensiblement le tout, c’est au niveau de son casting prestigieux qui parvient à sortir le récit de ses lenteurs et de ses longueurs. Fatalement, ce n’est que vers la fin que l’on s’émeut furtivement. Ce n’est pas l’histoire d’un grand film qui s’écrit là, juste l’histoire d’un grand frère.
Chloé Anyways
BLOOD TIES de Guillaume Canet en salles le 30 octobre avec Marion Cotillard, Matthias Schoenaerts, Clive Owen, Billy Crudup, Zoé Saldana, James Caan. Scénario : Guillaume Canet et James Gray, d’après l’histoire de Jacques Maillot et Frank Urbaniok. Production : Alain Attal, Guillaume Canet, John Lesher, Hugo Sélignac et Christopher Woodrow. Photographie : Christophe Offenstein. Direction artistique : Henry Dunn. Décors : Ford Wheeler. Costumes : Michael Clancy. Musique: Raphaël Hamburger, Anne-Sophie Versnaeyen. Montage : Hervé de Luze. Distribution : Mars Distribution. Durée : 2h07.
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