En plein océan Indien, le navire danois « MV Rosen » est pris d’assaut par des pirates somaliens qui retiennent en otage l’équipage et réclament une rançon de 15 millions de dollars. Parmi les sept hommes restés à bord, Mikkel, le cuisinier, marié et père d’une petite fille. Prisonnier et affaibli, il se retrouve au cœur d’une négociation entre Peter, le PDG de la compagnie du cargo et les pirates. Pour l’armateur, sauver ses hommes est un devoir. Mais le sang-froid et les millions suffiront-ils à ramener tous ses marins dans leur famille ?

 

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Prix du jury et prix d’interprétation masculine pour Soren Malling au festival de Marrakech en décembre dernier, entre autres récompenses, Hijacking est de ces films confidentiels qui méritent d’être vus entre deux blockbusters estivaux. D’abord parce que Tobias Lindholm, comme il l’a prouvé avec La Chasse de Thomas Vinterberg et la série Borgen, compte parmi les scénaristes de renom au Danemark. Il prouve une fois de plus son talent avec cette histoire de prise d’otages en plein océan Indien. L’équipage du MV Rosen est en effet retenu prisonnier par des pirates somaliens et le PDG de la compagnie du cargo, Peter C. Ludvigsen, doit négocier sa libération. Les ravisseurs réclament 15 millions de dollars, mais la sortie de crise se complique très vite lorsque le cuisinier du groupe, Mikkel Hartmann, est directement impliqué dans les échanges. Toute la force du récit de Lindholm est de brouiller les pistes entre l’intellect et le ressenti, le cœur et la raison, la crasse du lieu de détention et la froide propreté des bureaux où les décisions clés se prennent. La sueur et les larmes coulent bien des deux côtés, et les personnages comme les situations apparaissent si authentiques qu’ils donnent le sentiment d’évoluer en temps réel sous nos yeux. L’absence de musique durant les scènes où Peter le PDG converse avec l’intermédiaire entre la société et les pirates, rajoute à l’effet reportage et surtout au malaise ambiant. L’angoisse comme l’espoir partent et reviennent d’un lieu à l’autre, grâce à un montage parallèle assez efficace qui permet de varier les points de vue à chaque climax, chaque bouleversement, et de mieux saisir les sensations des principaux concernés sans montrer trop de réactions.

 

 

 

Le suspense est permanent, la tension palpable durant une bonne partie du film, à tel point que le soulagement est illusoire lorsque les geôliers et l’équipage danois partagent un repas en riant et chantant. Entre menaces et compréhension, les pirates demeurent imprévisibles, à l’instar d’Omar, l’intermédiaire entre Mikkel et son patron, finalement aussi dangereux que les instigateurs de l’assaut. C’est cette imprévisibilité qui permet la réussite des scènes de manipulation psychologique, à la fois suffisamment fortes et filmées à bonne distance pour ne pas accuser Tobias Lindholm de chantage à l’émotion. Il faut à ce titre également rendre hommage aux interprètes, tous d’une justesse percutante. Les trajectoires opposées qu’empruntent Mikkel/Pilou Asbaek et Peter/Soren Malling rendent d’ailleurs Hijacking encore plus prenant, ajoutant une attention supplémentaire à celle déjà suscitée par le sujet. Mikkel laisse exploser colère et désespoir et semble se vider de toute sensation et de toute normalité quand Peter, à l’inverse, va peu à peu imploser. Il suffit alors de se rappeler les mots doux que Mikkel lance à sa femme et à sa fille au téléphone et le professionnalisme de Peter au début du récit pour mieux mesurer le chemin parcouru des deux côtés, irréversible et indélébile.

 

 

Classique, le coup du patron et de l’employé qui, durant une épreuve, prennent des directions inverses ? Sans doute, mais bien malin/maligne celui/celle qui peut prédire comment tout va se finir pour les deux personnages. Chaque conversation téléphonique peut tout renverser, et le son d’une tonalité téléphonique peut résonner comme un coup de massue ou un nouveau pas vers le bout du tunnel selon la séquence. Certains se formaliseront du côté ‘‘ascenseur émotif’’ et du final sur lequel on ne révélera rien, mais le mélange d’engagement et de recul nécessaire dans la mise en scène évite la leçon de vie banale et lacrymale, et tout jugement indécent. Privilégiant les erreurs et les failles, Tobias Lindholm s’attarde finalement assez peu sur les pirates, dont les réactions face aux propositions financières du PDG et ses alliés resteront hors-champ. L’importance vient de l’enfermement constant, qu’il s’agisse du siège social de l’entreprise danoise ou du bateau maudit. Qu’importe alors la distance entre les uns et les autres. Jusqu’à la dernière image, Hijacking cloisonnera toutes les âmes impliquées dans cette captivité. Peter a beau s’éloigner en voiture du parking souterrain de sa société, la caméra ne quitte pas le bâtiment. Son esprit reste bien sur place, ne pouvant se libérer de l’histoire que lui et ses hommes viennent de vivre. Et le spectateur lui-même aura sans doute du mal à décrocher d’une aventure aussi puissante, qui donne un aperçu assez édifiant de ce que doivent endurer les otages et leurs proches, chaque jour, à travers le monde.

 

 

 

HIJACKING de Tobias Lindholm en salles le 10 juillet 2013 avec Pilou Asbaek, Soren Malling, Dar Salim, Roland Moller. Scénario : Tobias Lindholm. Producteurs : Tomas Radoor, René Ezra. Photo : Magnus Nordenhof Jonck. Décors : Thomas Greve. Montage : Adam Nielsen. Son : Morten Green. Musique : Hildur Gudnadottir. Distribution : AdVitam. Durée : 1h39.

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