Mise à jour : Artcurial a annoncé mardi que le manuscrit original de l’oeuvre mythique de Jean-Luc Godard, Le Mépris, estimé entre 60 et 80.000 €, a été adjugé à 115.000 € sous le marteau de Maître Poulain, valorisé à 144.300 € (frais compris). Voici le lot de la vente.
La première version du scénario de Le Mépris de Jean-Luc Godard, avec Brigitte Bardot, Michel Piccoli, Jack Palance et la participation de Fritz Lang, réalisateur de METROPOLIS dans son propre rôle, sera mis en vente par Artcurial le 28 mai 2013 à 14h dans la section « Livres et Manuscrits ». Ce document unique, recouvert d’une reliure vieillie beige clair, est écrit de la main du cinéaste au verso de 59 pages, complétées par 24 feuillets dactylographiés. La photo de la première page transmise par Artcurial via Le Figaro montre une écriture fine et soignée au stylo plume et à l’encre bleue, sur laquelle il est écrit : « Un film de Jean-Luc Godard d’après le roman d’Alberto Moravia ».
Au fur et mesure que l’on feuillette ce manuscrit, le texte laisse apparaître « des ratures, des corrections, des gribouillages insistants laissant présager une issue fatale ». Une date – avril/juin 1963 – annotée sur l’une des pages, accrédite le fait qu’il s’agit bien du premier jet, le film étant sorti le 27 décembre 1963. Les treize séquences qui y figurent viennent renforcer cette affirmation. En effet, à la demande de Sam Levine, le cinéaste fut obligé de tourner des scènes supplémentaires, ce dernier exigeant de voir BB nue et la version définitive agréée par les américains comporte seize séquences. Ce scénario a été donné à Ghislain Dussart, le photographe de l’actrice, au moment où il effectuait un reportage sur les coulisses du tournage. Ce dernier aujourd’hui décédé et c’est sa veuve qui le met aux enchères.
Tourné dans la villa Malaparte à Capri, ce long métrage est une mise en abyme du monde du cinéma. Le scénariste Paul Javal (Michel Piccoli) et son épouse Camille (Brigitte Bardot) rejoignent le réalisateur Fritz Lang, en tournage pour le compte du producteur de cinéma américain Jeremy Prokosch (Jack Palance), sur le plateau du film Ulysse. On propose au scénariste la réécriture du script, mais Camille n’est pas satisfaite de ce voyage. Pendant son séjour, Paul Javal laisse sa femme seule avec le producteur et, à tort celle-ci va imaginer qu’il la pousse dans le lit de Jeremy Prokosh pour obtenir le travail. Malentendus et mépris vont entraîner la dissolution du couple.
L’écrivain et critique de cinéma Jean-Louis Bory écrira : « Le Mépris que nous voyons, c’est du pur Godard, et, je m’empresse de le dire, de l’excellent Godard. Le prétexte, l’objet du film, plus que le roman italien, c’est BB. Ce que Vadim a imaginé dans son premier film, mais n’a plus été capable de réaliser, ce que Louis Malle a raté dans Vie privée, Godard l’a réussi. Le Mépris est le film de Bardot, parce qu’il est le film de la femme telle que Godard la conçoit et telle que Bardot l’incarne. Si le phénomène Bardot doit représenter plus tard quelque chose dans l’histoire du cinéma, au même titre que Garbo ou Dietrich, c’est dans Le Mépris qu’on le trouvera. Je ne sais dans quelles conditions le tournage a eu lieu ni si Bardot et Godard se sont bien entendus. Le résultat est là : il y a rarement eu entente aussi profonde (consciente ou non consciente, je suppose, chez Godard) entre une actrice et son metteur en scène ».
L’évaluation de cette pièce est difficile, faute de référence, mais il semblerait, selon Le Figaro, qu’elle puisse atteindre voire dépasser les 100.000 €…