Synopsis : Paris. 28 premiers jours du printemps. 11 femmes. Mères de famille, femmes d’affaires, copines, maîtresses ou épouses… Toutes représentent une facette de la femme d’aujourd’hui : Complexes, joyeuses, complexées, explosives, insolentes, surprenantes… Bref, un être paradoxal, totalement déboussolé, définitivement vivant, FEMMES tout simplement !
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Pour son premier long métrage, Audrey Dana bouscule les codes de la comédie féminine. A l’origine Sous les Jupes des Filles devait s’appeler Homosapiennes, ce qui en dit long sur le caractère primitif de ces femmes. C’est proprement cette face b de la femme que veut montrer Audrey Dana. En révélant cet aspect rarement exploré, elle donne à voir une féminité à l’état brut, avec toutes ses aspérités et ses contradictions. Femme courage, femme fatale ou femme enfant, toutes se dévoilent tour à tour devant la caméra de cette nouvelle réalisatrice. Ca passe ou ça casse, pas de demi mesure. Féministe Sous les Jupes des Filles ? La question ne se positionne pas vraiment à ce niveau. Si la crudité du propos en déconcerte plus d’un, Audrey Dana donne SA vision de la femme, libre et sans concession, pour mieux bousculer les idées liées à la féminité. Dans ce film choral, cette pléiade d’actrices joue en parfaite interaction. Jo (Audrey Dana) est voisine de Sophie (Audrey Fleurot), qui elle-même travaille aux côtés d’Inès (Marina Hands), l’épouse de l’amant de Jo (Alex Lutz). Inès et Sophie travaillent pour Lili (Isabelle Adjani), sœur de Sam (Sylvie Testud). Et les autres personnages se croisent au gré de l’intrigue au ton parfaitement décomplexé. Tous ces portraits esquissés – si nombreux soient-ils – représentent une facette de la femme dans la société actuelle.
Ainsi Audrey Dana devient ici une femme tigresse, très soumise à son cycle hormonal. Marina Hands se transforme en épouse trompée et stéréotype de la femme parfaite. Sa myopie sévère est d’ailleurs un joli symbole de son aveuglement sur l’infidélité de son époux. Sylvie Testud incarne une gynécologue en soif de mâles ‘complètement interchangeables’ selon elle. Mais elle redoute la solitude et le moindre bruit, ce qui la rend fragile aux yeux du monde. De son côté, Vanessa Paradis interprète Rose, une femme d’affaires hors pair mais totalement esseulée. Si toutes (se) donnent l’illusion d’être fortes, via leur comportement ou leur réussite sociale, elles sont surtout terrorisées par la relation de couple, les liens profonds d’amitié ou encore l’idée de vieillir. En somme, ce qui semble un passage obligé aux yeux de la société constitue un blocage pour elles. Sans ami ni compagnon, certaines se sentent d’emblée mises à l’index par ce système où la solitude est mal perçue. Et paradoxalement, tout incite à vouloir rester jeune à vie.
Bien sûr, sous les jupes des filles se trouvent aussi… des hommes. Leur place est intéressante car chaque personnage incarnant un type d’homme particulier, justifie la situation de leur alter égo féminin. Du côté des époux, Guillaume Gouix interprète le mari de Géraldine Nakache, père de 4 enfants. S’il donne la sensation d’être son compagnon de vie, il ne représente sans doute pas un père pour ses enfants. Puis il y a Alex Lutz dans la peau du mari infidèle d’Inès. Elle lui reproche tout ; leur passé, ses efforts à elle, tous ses sacrifices en somme. Et enfin, Nicolas Briançon esquisse le portrait d’un mari comme il ne devrait plus en exister au XXIème siècle. Terriblement ancré dans la routine, il est effrayé par l’éveil de sa femme Fanny (Julie Ferrier) à la sensualité. Du côté des amants, Pascal Elbé campe un avocat, confrère d’Agathe (Laetita Casta). A l’aise dans sa vie, apparemment sincère et très patient, il compose tant bien que mal avec les névroses de la jeune femme. Audrey Dana inverse les tendances car les hommes deviennent ici des faire-valoir pour expliciter la situation de ces femmes. Pour ces épouses et mères qui en sont fortement dépendantes, ils sont perçus comme l’origine de leurs maux. Il devient alors vital pour elles de s’extraire de cette aliénation que représente leur couple, afin de se trouver elles-mêmes. S’en libérer devient l’unique moyen d’épanouissement possible.
Outre sa notoriété, le casting en devient éblouissant par la justesse de ces protagonistes si difficiles à incarner/assumer. Comme particulièrement celui d’Agathe (Laetitia Casta), sans doute l’un des plus difficiles. Malade à chaque nouvelle rencontre amoureuse, la jeune femme se trouve dans des situations plus qu’humiliantes tout en parvenant à garder une certaine grâce. Quant à Isabelle Adjani, elle assume pleinement ses travers en Lili. On ne saurait dire si elle disparaît totalement pour laisser la place à ce personnage qui refuse de vieillir et de voir grandir sa fille de 16 ans. Si la mise en scène d’Audrey Dana reste agréable sans présenter d’originalité, on peut néanmoins saluer le flashmob, incroyablement bien exécuté, et ce d’autant qu’il se déroule au Trocadéro. Au final, Sous les Jupes des Filles bascule souvent dans le trash, mais Audrey Dana parvient à garder le cap tout en donnant un bel élan de liberté à la femme…
Lucie de Azevedo Felix
- SOUS LES JUPES DES FILLES d’Audrey Dana en salles le 4 juin 2014
- Casting : Audrey Dana, Isabelle Adjani, Alice Belaïdi, Laeticia Casta, Julie Ferrier, Audrey Fleurot, Marina Hands, Géraldine Nakache, Vanessa Paradis, Alice Taglioni, Sylvie Testud, Stanley Weber, Guillaume Gouix, Marc Lavoine, Pascal Elbé, Nicolas Briançon, Alex Lutz, Laure Calamy…
- Scénariste : Audrey Dana, Raphaëlle Valbrune-Desplechin, Murielle Magellan
- Prodution : Olivier Delbosc, Marc Missionnier
- Photographie : Giovanni Fiore Coltellac
- Montage : Julien Leloup, Hervé Deluze
- Décors : Bertrand Seitz
- Musique : Imany
- Costumes : Charlotte Betaillole
- Distribution : Wild Bunch
- Durée : 1h56
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