Synopsis : Le directeur d’un minable théâtre ambulant proche de la faillite décide d’engager deux sÅ“urs siamoises adultes, Dorothy et Viviane Hamilton, pour être l’attraction vedette de son spectacle. Et pour attirer davantage la foule, il a l’idée lumineuse d’organiser une fausse histoire d’amour et de fiançailles entre l’un des artistes de la troupe et Dorothy. Mais celle-ci se laisse prendre au jeu et aime sincèrement celui qui accepte de l’épouser par cupidité, pour l’abandonner quelques jours plus tard. Désespérée par le chagrin de Dorothy, Viviane tue l’infidèle. Mais si le crime ne fait aucun doute, la justice se retrouve devant un dilemme insoluble : comment punir la meurtrière sans faire payer également l’innocente ?
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Commençons d’abord par prévenir que le synopsis alléchant ci-dessus est trompeur car L’amour parmi les monstres ne porte pas sur cette étrange et passionnante question de droit mais sur les circonstances des faits qui menèrent au crime. Il est de fait plus banal que ce résumé ne peut le laisser supposer. C’est l’histoire d’un amour déçu, d’une trahison, racontée en flashback depuis une scène de procès inaugurale. Produit en 1952 par un producteur véreux qui voulait avant tout profiter du pécule que les sÅ“urs Hilton – sÅ“urs siamoises apparues dans le Freaks de Tod Browning – étaient parvenues à amasser au cours des heures plus glorieuses de leur carrière d’artistes, L’Amour parmi les monstres est plus proche de la série Z que de la série B et son réalisateur, Harry L. Fraser, tient plus d’Ed Wood que de Richard Fleischer ou Anthony Mann. Le film fait défiler les scènes attendues sans talent ni invention particulière mais se laisse regarder sans déplaisir. À vrai dire, il vaut surtout par certains détails, notamment les scènes de music-hall qui ont un indéniable charme documentaire et font penser, selon les références de chacun, aux films de cabaret de Jean Boyer, tel que C’est pas moi, c’est l’autre ou au premier film de Fellini, Les Feux du music-hall. Le numéro de l’accordéoniste est un exemple frappant des surprises que peut réserver ces spectacles de variétés, lorsque les motifs sur les volets de l’accordéon, qui se plie et se déplie, font une minute songer aux films expérimentaux que réalisera Norman McLaren quelques années plus tard. Une autre scène, en fin de film, fait elle songer à l’argument d’Henri Langlois lorsqu’il a fondé la Cinémathèque française. Celui-ci entendait conserver une copie de tous les films existants, et non uniquement des chefs-d’œuvre du septième art, arguant que, le cinéma enregistrant le réel, il y avait toujours quelque chose d’intéressant à voir et à conserver sur n’importe quelle pellicule impressionnée. Cette séquence ne peut que lui donner raison. On y voit André Pariseau, le mari félon et as de la gâchette faire son numéro de tireur d’élite. Après les premières démonstrations de force habituelles, il enchaîne par un numéro exceptionnel : il joue de l’orgue en tirant sur ces touches au fusil de chasse. La scène, acmé dramaturgique de l’intrigue, traite de façon grotesquement lyrique le moment où tout bascule. Pourtant, en regardant cet homme jouer de la musique, qui tire au fusil sur un instrument, on oublie le caractère suranné de l’œuvre, et l’on distingue quelque chose que le réalisateur n’avait peut-être pas conscience de filmer : on aperçoit l’Amérique.
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DVD : Comme de coutume, Bach Films rend la possibilité de découvrir en vidéo des films rares ou inédits mais ne les propose pas en version restaurée, et le travail sur les éditions reste souvent minimal. Ce DVD, sorti dans la Collection Freaksploitation, ne dispose ainsi que d’un bonus, l’entretien avec le tératologue (spécialiste des monstres) Christophe Bier, dont le visage anguleux et le regard volontairement inquiétant correspondent à l’idée que l’on peut se faire d’un tératologue (pour peu qu’on s’en fasse une). Face caméra, il esquisse une rapide biographie des sÅ“urs Hilton, qui permet une utile et très intéressante mise en contexte du film.
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- L’AMOUR PARMI LES MONSTRES (Chained for Life) réalisé par Harry L.. Fraser disponible en DVD depuis le 2 mai 2017.
- Avec : Violet Hilton, Daisy Hilton, Mario Laval, Allen Jenkins
- Scénario : Nat Tanchuck
- Production : George Moskov
- Photographie : Jackie Feindel
- Montage : Joe Gluck
- Décors : George Van Matar
- Musique : Henry Vars
- Tarif : 15 € (DVD)
- Distribution : Bach Films
- Durée : 1h21
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