Résumé : Ingmar Bergman a toujours filmé le sujet humain dans toutes ses complexités : que ce soit l’affrontement conjugal, l’incertitude face à Dieu ou le rôle de l’artiste dans le monde qui l’entoure… Mais qu’en est-il de la filiation ? Si les liens conflictuels qu’avait Bergman avec son père pasteur sont connus et font partie du mythe du cinéaste, comment met-il en scène la relation parent-enfant ? De manière paradoxale, peu de films traitent frontalement de la question – parmi eux, Sonate d’automne (1978), Fanny et Alexandre (1982) et Sarabande (2003). À partir de plusieurs analyses filmiques, ce livre entend révéler la particularité et les spécificités de cette relation dans l’oeuvre de Bergman. On interrogera ces scènes de la vie familiale au gré d’un nouage de deux approches, l’une esthétique, l’autre psychanalytique, en vue de réfléchir aux problèmes de l’image en général.
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Un titre en forme de clin d’oeil pour une étude dont la taille dissimule la densité mais pas l’esprit de synthèse. Parmi les nombreux ouvrages consacrés au réalisateur du Septième Sceau, celui de Raphaël Yung Mariano, doctorant à l’Université Paris 8, se distingue d’abord par son approche psychanalytique. À la description précise des séquences correspond une interprétation particulièrement stimulante s’attachant au rapport filiale, si important dans la vie et l’oeuvre de Bergman. Se détachant avec raison de toute velléité psychobiographique, l’auteur s’attache quasi exclusivement aux films et à leurs images. De fait, c’est par le prisme de ces dernières que s’articule le développement de l’étude. Qu’elle soit aliénante, productrice d’un passage, ou matériau propice à la création, l’image suppose un désir qu’on en partage la plupart des enfants bergmaniens. La catégorisation proposée par Yung Mariano se voit servie par un véritable souci de complétude. Les analyses des scénarios, dialogues, personnages, couleurs, scénographies et bandes-sonores assurent une concrétisation particulièrement alerte des concepts énoncés. Si la réputation de Bergman s’est forgée pour l’essentiel à travers ses productions des années cinquante et soixante, c’est au contact de ses films plus tardifs que l’auteur consolide ses théories. Fanny et Alexandre bien sûr, mais aussi Sarabande et Sonate d’automne, dont l’ouvrage rappelle l’importance parfois un peu oubliée dans la filmographie du réalisateur suédois. La dernière partie de l’essai permet de revenir sur quelques autres pièces maîtresses (Le Silence, À travers le miroir, Les Fraises sauvages, Cris et Chuchotements) appréhendées par le biais du fragment. Page après page, Scènes de la vie familiale découvre de nouvelles images, prouvant toute la richesse du cinéma de Bergman. On pourra seulement regretter qu’aucun index ne vienne baliser la lecture de cet ouvrage particulièrement érudit.
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- SCÈNE DE LA VIE FAMILIALE – Ingmar Bergman
- Auteur(s) : Raphaël Tung Mariano
- Édition : L’Harmattan
- Collection : Eidos
- Date de parution : juillet 2017
- Pages : 124
- Tarif : 14 € (papier) – 9,99 € (numérique)