Le réalisateur d’Orange Mécanique s’est vu un jour proposer de porter à l’écran un récit parodique sur l’industrie pornographique, l’histoire d’une actrice unijambiste et d’un producteur nécrophile. Une anecdote cinéphile croustillante méconnue.
Le cinéaste connu pour les emblématiques 2001 : l’Odyssée de l’Espace, Full Metal Jacket, Lolita, ou encore Shining n’était pas réputé pour avoir froid aux yeux en matière de sujets sulfureux. Pourtant, comme le raconte Vanity Fair, ce dernier n’aura jamais réalisé l’étrange projet proposé par Terry Southern.
Le coscénariste de Docteur Folamour, d’Easy Rider et de Barbarella a eu l’idée d’écrire, après une soirée passée chez Kubrick à disserter sur un navet, un film pornographique « haut de gamme », tourné avec les moyens d’un studio de cinéma, et doté d’une histoire érotico-satirique sur le monde du X.
D’abord conçu sous forme de roman, le long-métrage en question intitulé Blue Movie devait mettre en scène des personnages insolites, comme une actrice porno unijambiste, un producteur nécrophile et un réalisateur inspiré du cinéaste, King B, décrit par le magazine comme « froid, maniaque et calculateur ». Mais en dépit de cette base qui promettait une Å“uvre atypique, à même de marquer le cinéma américain des années 1970, Kubrick pourtant pressenti pour diriger le projet et le porter à l’écran ne s’engagera jamais dans l’aventure.
Celui qui a réalisé l’une des meilleures Å“uvres sur la culture de la violence avec le culte Orange Mécanique en 1971 n’était pas très à l’aise avec les scènes de sexe à l’écran : « Je pense qu’il est intéressant de savoir comment une personne montre à une autre personne qu’elle désire lui faire l’amour, et c’est intéressant de savoir ce qu’ils font après avoir fait l’amour, mais tant qu’ils y sont occupés… Et bien, c’est autre chose… C’est tellement subjectif et incongru pour le spectateur que ça peut être vraiment gênant », confiait Stanley Kubrick dans un entretien avec Terry Southern cité par Vanity Fair.
Sans pilote, Blue Movie reviendra sur le devant de la scène au cours de la décennie, avec un budget de quatorze millions de dollars, et la participation de Julie Andrews dans le rôle principal. Sachant que le film comporterait de vraies scènes d’ébats, l’interprète de Mary Poppins alors compagne de John Calley, président de Warner Brothers séduit par l’idée, aurait accepté de rejoindre le casting « par amour ». Un choix qui aurait certainement bousculé ses fans attachés à ses personnages chantants de l’univers Disney. Car le méta-porno ne sera finalement jamais tourné, au grand dam de Southern.
Coïncidence, Vanity Fair rappelle que Stanley Kubrick finira par reconsidérer sa vision du sexe au cinéma en signant en 1999 le sulfureux Eyes Wide Shut truffé de scènes érotiques, une ultime révérence au septième art sortie peu avant son décès, portée par le couple Tom Cruise-Nicole Kidman.