Icône du cinéma et de la musique, Jane Birkin s’est éteinte à son domicile à Paris ce dimanche 16 juillet à l’âge de 76 ans.
Britannique de nationalité, mais indéniablement Française de cœur, Jane Birkin a marqué cinéphiles et mélomanes, et bien au-delà. Fille d’un commandant de la Navy et d’une actrice, elle se lance bien vite sur les traces de sa mère et fait ses premiers pas au cinéma à seulement dix-huit ans.
Elle apparaît notamment dans la comédie très sixties Le Knack… et comment l’avoir de Richard Lester, futur réalisateur de La Rose et la Flèche et de Superman 2. Si elle n’y tient qu’un tout petit rôle – aux côtés d’autres futures grandes comédiennes comme Charlotte Rampling et Jacqueline Bisset –, celui-ci n’en marque pas moins la première pierre d’une riche filmographie.
Son apparition, deux ans plus tard, dans Blow Up d’Antonioni est tout aussi fugace, mais marque les esprits, jusqu’à déclencher une immense polémique en Angleterre. Birkin, y apparaît nue, une grande première dans le très chaste cinéma britannique. Car au-delà de ses carrières, l’actrice et chanteuse est déjà une personnalité sulfureuse pour ses contemporains, mais surtout libre et avant-gardiste.
Outre ses rôles et bientôt ses chansons, c’est sa rencontre avec un autre grand artiste provocateur qui transforme sa vie et celle de millions de Français. C’est sur le tournage de Slogan en 1969 que Jane Birkin rencontre Serge Gainsbourg. Le chanteur et poète y campe alors l’un de ses premiers rôle d’envergure au cinéma. Si leur premier contact est difficile, Birkin et Gainsbourg finissent par se mettre en couple, l’un des plus iconiques de la culture française.
Tel un pygmalion, Gainsbourg lance la carrière musicale de sa compagne en lui offrant la chanson Je t’aime… moi non plus qu’ils interprètent en duo. Nouveau scandale, le morceau est jugé obscène, mais est un énorme succès.
Alternant désormais cinéma et musique, Birkin chante de nombreux albums en duo avec son compagnon (de Jane Birkin – Serge Gainsbourg à Baby Alone in Babylone) et dans le même temps, tourne avec de nombreux grands noms du cinéma français. De Jacques Deray (La Piscine) à Bertrand Tavernier (Daddy nostalgie), en passant par Agnès Varda Kung-fu Master), elle devient la muse du cinéma d’auteur français.
Mais loin de se cantonner à l’Hexagone, elle apparaît dans des productions britanniques, comme l’adaptation de Mort sur le Nil par John Guillermin (La Tour Infernale), où elle côtoie des stars internationales comme Mia Farrow et Bette Davis. Là où les cinéastes français semblaient séduits par son accent anglais, elle interprète ici une femme de chambre française.
Car fidèle à sa soif de cinéma, elle ne s’est fermée à aucun genre et aucun registre, n’hésitant pas à s’éloigner des sentiers balisés du film d’auteur dramatique. Aussi à l’aise dans la comédie, l’actrice formait un couple hilarant et mal assorti avec le génial Pierre Richard dans La moutarde me monte au nez de Claude Zidi.
Passant du rire à l’effroi, elle s’est également adonnée au cinéma d’épouvante, sur ses terres natales comme ailleurs. Dans Le Manoir des fantasmes de Don Sharp en 1974, elle a ainsi l’occasion de côtoyer l’immense Christopher Lee. De l’autre côté de la Manche, mais aussi des Alpes, l’actrice poursuit dans ce même registre. Elle est à l’affiche du film d’horreur gothique Les Diablesses réalisé par le spécialiste du genre, Antonio Margheriti.
En plus de sa carrière d’actrice, Jane Birkin s’est aussi essayée par deux fois à la réalisation : En 1992, avec le téléfilm Oh ! Pardon tu dormais… (qui lui inspirera vingt-huit ans plus tard le titre de l’un de ses albums), et en 2007, avec Boxes.
En seulement deux réalisations, elle révèle un univers de cinéaste hautement cohérent, où la mort et la famille sont omniprésentes. Car ces deux éléments ont occupé une place prépondérante tout au long de sa vie. Mère de trois filles (dont les comédiennes et chanteuses Charlotte Gainsbourg et Lou Doillon), elle perd brutalement son ainée, la photographe et portraitiste Kate Barry, en 2013. Elle parvient à se relever et à aller de l’avant. Car outre son œuvre, Jane Birkin est aussi connue pour sa résilience, son courage et son inextinguible soif de liberté.
Une immense artiste et véritable icône qui, par-delà les frontières du cinéma ou de la musique, a marqué son époque.
Timothée Giret