La seconde édition du Festival des Musiques à l’Image, lancé par Audi talent awards, a pris son envol les 5 et 6 octobre à la Gaîté Lyrique et au Grand Rex. CineChronicle a eu l’opportunité de rencontrer Guillaume Jolit, responsable des partenariats chez Audi, pour évoquer ses multiples fonctions et cet événement plein d’intensité musicale sur les masterclass et bien sûr le très attendu ciné-concert de John Williams/Steven Spielberg.
CineChronicle : Vous êtes en charge de tous les partenariats chez Audi mais aussi des placements de produits au cinéma. Pouvez-vous définir les différentes fonctions de votre travail ?
Guillaume Jolit : Sur ces deux premières activités, le but est de nous permettre en terme d’événements d’avoir des partenaires forts qui nous donnent accès à des univers qui ne nous sont pas naturels, puisque notre cœur de métier est l’automobile et, pour ainsi pénétrer sur d’autres territoires d’expression. Le second axe est toujours dans cette même veine avec un angle tourné vers la fidélisation de nos clients. Nous sommes partenaires de l’Olympia et de certaines sociétés de cinéma qui nous donnent accès à des tournages et à des concerts. Cela rentre dans le cadre du programme de fidélisation qui s’appelle MyAudi. La partie placement de produits est, quant à elle, bien distincte dans le cinéma, particulièrement pour des questions de qualité, mais aussi dans les productions TV et éventuellement dans les vidéoclips.
CC : Vous supervisez le programme de mécénat culturel Audi talents awards qui soutient depuis 7 ans les jeunes talents dans l’art contemporain, le design, le court métrage et bien sûr la musique. Comment est née l’initiative de créer ce Festival sur les Musiques à l’Image parrainé par le CNC ?
GJ : L’idée est née d’héberger une déclinaison d’une des quatre catégories de notre programme Audi talent awards : la musique à l’image. Elle était la seule à ne pas avoir d’espace d’expression n’ayant été adossée à aucun partenariat. Le court métrage est affilié au court métrage de Clermont-Ferrand, le Design au Designer’s Days et l’art contemporain à la FIAC. On l’a donc créée de toute pièce. L’évolution cette année par rapport à la première édition se concentre sur la réunion des différentes catégories. D’un côté, le design et l’art contemporain car elles ont un public, des médias, des espaces et des codes très proches. Et de l’autre, le court métrage et la musiques à l’image sur le divertissement.
CC : Audi, la musique et le cinéma, c’est une histoire de longue date qui remonte en 1982 avec E.T. Pourquoi une telle implication ?
GJ : La volonté de s’introduire dans le cinéma est venue de l’envie de montrer à la fois l’utilisation et la qualité de nos voitures, au cours de fictions longues qui mettent en valeur nos produits et plus seulement dans un spot de 30 secondes. Cela rejoint donc le placement de produits. C’est un espace d’expression différent où l’on vient présenter des produits dans leur utilisation réelle. La publicité, par le traitement de l’image, le discours et le format ne permet pas de saisir le réalisme de la voiture. Le placement de produits au cinéma répond à cette volonté. E.T. était effectivement le point de départ. Audi est également présent dans un James Bond avec Timothy Dalton (Tuer n’est pas jouer) ou encore dans I,Robot. Mais dans ce cas de figure c’est encore différent puisqu’il est question de concept-car. Audi n’est plus tellement ancrée dans la réalité mais plutôt dans l’avant-garde, l’une de nos valeurs. Comment imagine-t-on la voiture du futur, quelles seront les technologies et l’utilisation des voitures de demain ? On s’éloigne de la réalité mais elle donne cependant des pistes sur ce qu’elle pourrait être dans quelques années. C’est une production à part. On peut nous demander d’imaginer le design d’un concept–car dans 50-60 ans pour une production de film futuriste, ou bien de mettre nos modèles classiques à l’image. Le concept-car coûte plusieurs millions d’euros et sa valeur est extrêmement élevée car il est fabriqué en un seul exemplaire. Mais pouvoir montrer notre vision potentielle de ce que pourrait être une voiture dans 50 ans est une opportunité superbe à saisir. Je m’occupe en l’occurrence seulement des placements de produits sur des productions françaises. Nous avons été à l’origine du partenariat avec EuropaCorp qui a donné lieu à des succès internationaux comme Taken, Hitman et Transporteur. Les placements comme I,Robot, Iron Man 3 et The Wolverine : le combat de l’immortel sorti cet été, sont directement gérés par la maison-mère car les contrats sont assez importants et portent sur plusieurs dizaines de territoires.
CC : Etes-vous à l’origine de la programmation des éditions du Festival des Musiques à l’Image ? Quels éléments déterminent cette sélection ? L’actualité ? Une thématique ?
GJ : Tout s’est décidé assez vite finalement l’année dernière puisqu’il s’agissait d’une création. Il s’avère qu’Audi est proche de certaines sociétés de production comme notamment La Petite Reine. Du coup, la programmation s’est agencée rapidement pour obtenir The Artist. Pour cette seconde édition, la réflexion a été menée en fin d’année dernière. On s’est demandé ce qu’on pouvait faire après The Artist. On savait qu’il existait le programme John Williams/Steven Spielberg d’une puissance incroyable auprès du grand public. Une raison suffisante pour nous faire choisir cette programmation.
CC : Vous évoquez les ciné-concerts mais comment avez-vous procédé pour les Masterclass ? L’an passé, il s’agissait d’Hans Zimmer, Marco Beltrami et Ludovic Bource. Vous recevez aujourd’hui Bruno Coulais, Harry Gregson Williams et Jean-Pierre Jeunet, qui n’est pas un compositeur. Pourquoi ces trois personnalités spécifiquement ? Ont-elles des points communs ou est-ce leurs différences qui ont été déterminantes ?
GJ : Le choix des masterclass se fait selon deux critères principaux. Le premier est que l’on veut obligatoirement un compositeur français et un américain car ce ne sont pas du tout les mêmes productions. On ne travaille pas les films de la même façon. Le second est une nouveauté avec Jean-Pierre Jeunet. Il y a eu un très bel échange entre Marco Beltrami et Bertrand Tavernier l’année dernière, à savoir entre réalisateur et compositeur. Comme notre festival est de la musique à l’image, la notion de réalisateur est donc très forte, on ne peut pas les dissocier. On s’est donc très vite intéressé à un réalisateur qui aurait des éléments importants à dire sur la musique. Pas seulement sur ce que la musique apporte à l’image mais comment l’image peut utiliser la musique. Le choix s’est porté sur Jean-Pierre Jeunet car, en dehors de son actualité, on aime son univers et son imagerie. Amélie Poulain a une bande son absolument géniale. Par ailleurs des compositeurs comme Hans Zimmer, Marco Beltrami et Harry Gregson Williams sont dédiés à des grosses productions hollywoodiennes, qui sortent partout dans le monde et qui ont eu des succès incroyables au box office. Ludovic Bource a rencontré le succès international avec The Artist, mais précédemment OSS 117 avait touché un public francophone. Ce sont ces deux visions qui nous intéressent. Comment travaille-t-on un film qui va sortir dans quelques pays et un autre qui prendra l’affiche dans plus d’une centaine de territoires ?
CC : Vous ne faites pas votre choix par rapport à leur actualité…
GJ : Non car c’est leur expérience qui nous intéresse. Les compositeurs ont généralement un certain âge et donc beaucoup d’expérience. Bruno Coulais et Harry Gregson Williams font ce travail depuis 20 ans. Nous sommes davantage en recherche d’un contenu pour pouvoir couvrir la musique sur au moins une dizaine de films. C’est ce qui rend les masterclass enrichissantes.
CC : Vous passez donc à la vitesse supérieure avec le ciné-concert de John Williams/Steven Spielberg. Comment se sont passées les négociations avec le compositeur le plus primé de l’Histoire ?
GJ : Je ne suis pas le mieux placé pour vous en parler car on travaille avec une agence spécialisée dans ce domaine. En l’occurrence le ciné-concert de John Williams/Steven Spielberg est un programme qui existe déjà et que l’on peut acheter. De nombreuses négociations sur les films se sont déroulées par rapport à ce que l’on voulait garder et ajouter à cette programmation. Cela se fait généralement en concertation avec le chef d’orchestre, Frank Strobel (NdR : directeur artistique de l’Institut européen du film et de la Film Philharmonie à Berlin). Il est le seul habilité par John Williams à pouvoir jouer ses musiques. Il existe un accord de principe entre eux. Pour les négociations de droits, ce n’était finalement pas si compliqué que cela car les films les plus légendaires du réalisateur ont terminé leur exploitation en salles et fait leur carrière cinématographique. Il ne s’agit donc ni de renégociations ni de négociations sur des exclusivités.
CC : John Williams ne veut apparemment pas d’autre orchestre que le London Symphonic Orchestra (LSO) pour interpréter ses musiques. Comment avez-vous procédé pour qu’il accepte le Paris Symphonic Orchestra ?
GJ : Dans mes souvenirs, le LSO n’était pas disponible à cette date-là. Le chef d’orchestre pouvait donc choisir un autre orchestre sans passer par John Williams. Il connaît le haut niveau du Paris Symphonic Orchestra. Les musiciens étaient aussi fortement motivés par la programmation et ont énormément travaillé en amont chez eux.
CC : En mars dernier, la salle Pleyel a fait salle comble avec le ciné-concert de John Williams dirigé par Frank Strobel avec le LSO, auquel nous avons pu déjà assister. Réservez-vous cette fois-ci de nouvelles surprises au public ?
GJ : J’ignore hélas ce qu’ils ont joué à la salle Pleyel mais notre programmation sera de toute façon un peu différente, puisque la première partie de trente minutes environ rendra hommage aux musiques de Bruno Coulais et Harry Gregson Williams.
CC : L’événement se déroule encore à la Gaîté Lyrique pour les masterclass mais inaugure cette année le Grand Rex. Convoitiez-vous déjà cette salle l’année dernière ?
GJ : Le ciné-concert de l’année dernière a eu lieu tout simplement à l’Olympia car nous sommes partenaires de longue date. Pour cette seconde édition, le choix du Grand Rex s’est décidé par rapport à John Williams et Steven Spielberg. Nous étions persuadés qu’il y avait un potentiel beaucoup plus important vis-à-vis du grand public avec ce duo. Il nous fallait une jauge supplémentaire. Aujourd’hui, 2400 places sont réservées au Grand Rex, dont certaines ont été sacrifiées car la visibilité est réduite. De mémoire, nous avions vendu 1500 places à l’Olympia.
CC : De quel budget disposez-vous pour ce festival de haute volée ?
GJ : Je ne peux malheureusement pas vous répondre. C’est stratégique. Si je vous communique le budget, cela implique également la présence de nos quatre partenaires.
CC : Vous êtes sûrement en préparation pour la troisième édition. Pouvez-vous nous dévoiler quelques secrets car comment faire mieux que ce duo mythique ?
GJ : Dans l’inconscient collectif et honnêtement je ne pense pas qu’on puisse faire mieux que le duo John Williams/Steven Spielberg. Mais ce n’est pas parce qu’il n’y a pas mieux qu’il n’y a pas aussi bien et qualitatif. On pense à Federico Fellini et Nino Rota par exemple. Mais aussi Danny Elfman et Tim Burton, ce serait une super programmation à monter. Ou à Brian de Palma. Ou George Lucas avec un best-of de Star Wars. On resterait de toute façon sur le même format : masterclass/ciné-concert. Les chiffres de la première édition étaient bons avec 2500 personnes présentes sur les deux jours, par rapport aux inscriptions aux masterclass et à la billetterie pour le ciné-concert. Ce devrait être forcément plus conséquent cette année avec le Grand Rex.
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