Synopsis : Une nuit d’avril 1957. Albertine, 19 ans, saute du mur de la prison où elle purge une peine pour hold-up. Dans sa chute, elle se brise l’os du pied : l’astragale. Elle est secourue par Julien, repris de justice, qui l’emmène et la cache chez une amie à Paris. Pendant qu’il mène sa vie de malfrat en province, elle réapprend à marcher dans la capitale. Julien est arrêté et emprisonné. Seule et recherchée par la police, elle se prostitue pour survivre et, de planque en planque, de rencontre en rencontre, lutte au prix de toutes les audaces pour sa fragile liberté et pour supporter la douloureuse absence de Julien…
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Après avoir été longtemps actrice, Brigitte Sy est passée derrière la caméra en 2010 avec Les mains libres. Elle revient cinq ans plus tard en adaptant l’autobiographie L’Astragale d’Albertine Sarrazin parue en 1965. Née en Algérie en 1937 et déposée à l’assistance publique, l’auteure a vogué de foyers en foyers. Délinquante et prostituée, elle a connu une vie courte et très intense. Elle a fini par se consumer entièrement à 29 ans. Mais ce qu’on retient de cette jeune femme, c’est particulièrement son écriture. L’Astragale se lit comme un journal intime dans un style poétique entre l’absurde des poèmes de Boris Vian et le naturalisme des romans d’Emile Zola. Brigitte Sy suit, plan après plan, la trame de ce roman et dresse un portrait intimiste d’Albertine, en insistant sur sa marginalisation et ses ambiguïtés sexuelles. Sa mise en scène épurée, dans un noir et blanc sobre et esthétique, n’aborde pas, en apparence, la poésie et le romanesque de l’existence de cette jeune femme. Mais en introduisant de nombreux passages du livre et en donnant à Albertine la voix et le physique de Leïla Bekhti, la réalisatrice parvient en filigrane à transmettre son atmosphère. Celui d’une vie faite de blessures et d’amour, très vite interrompue. Si cette version cinématographique est mesurée, l’histoire d’amour n’en reste pas moins pleinement ressentie entre Albertine et Julien (Reda Kateb), le malfrat qui l’a recueillie et aidée lorsqu’elle s’est évadée de prison et brisée l’astragale, l’os du pied. Albertine à Paris, Julien en province, leur romance est le reflet de la vie compliquée de cette jeune femme. Tous deux en marge de la société, hors la loi, ont du mal à s’intégrer et à se façonner une relation simple et routinière. En témoigne la multiplication des séquences dans lesquelles ils se donnent des rendez-vous téléphoniques manqués. Albertine vit ainsi dans l’attente, la frustration et un amour démesuré. Dans cette nouvelle adaptation, après celle réalisée par Guy Casaril en 1968, Brigitte Sy, telle une anthropologue, décortique le combat intérieur de ce personnage aux prises avec une douleur physique aussi brûlante que sa souffrance morale. En toute sobriété, L’Astragale explore avec délicatesse et élégance la trajectoire de cette femme entre poésie et dure réalité.
- L’ASTRAGALE réalisé par Brigitte Sy en salles le 8 avril 2015.
- Avec : Leïla Bekhti, Reda Kateb, Esther Garrel, Jocelyne Desverchere, India Hair, Jean-Charles Dumay, Jean-Benoît Ugeux, Delphine Chuillot…
- Scénario : Brigitte Sy et Serge Le Péron d’après l’autobiographie L’Astragrale d’Albertine Sarrazin
- Production : Paulo Branco
- Photographie : Frédéric Serve
- Montage : Julie Dupré
- Décors : Françoise Arnaud
- Costumes : Françoise Arnaud
- Musique : Béatrice Thiriet
- Distribution : Alfama Films
- Durée : 1h37
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