Cette semaine un papier était consacré sur le web à un passionné de la VHS, Stan, sorte de dernier des Mohicans qui réenregistre sur bande magnétique analogique des oeuvres récentes comme GRAVITY, GRAND BUDAPEST HOTEL ou encore THE WALKING DEAD. On pouvait y percevoir une contre-culture faisant un bras d’honneur au Blu-ray, à la HD et au Home Cinema. Les retours ayant été excellents, le site Golem13 a fini par avouer le poisson d’avril mais le regain d’intérêt, sinon de curiosité, était lui bien réel.
Aujourd’hui, à la très prestigieuse et sérieuse Université de Yale, on aborde la question différemment, au point d’y consacrer la toute première Archive américaine au sens Académique du terme. Au-delà des œuvres en tant que telles, il s’agit dans cette acquisition, installée à la Sterling Memory Library, de préserver les jaquettes, l’artwork, les trailers et l’ensemble du contenu spécifique au support.
Pour Aaron Pratt (étudiant) et David Gary (bibliothécaire), le rapprochement entre le livre et la VHS est tout trouvé, comme ils l’ont expliqué sur Here and Now : « Pour nous, il s’agit de considérer la VHS comme un objet matériel, culturel. Lorsqu’on appréhende un livre, on parle de la table des matières, de la page de références et de la préface, qui vous guident dans le texte et vous aident à mieux le comprendre. C’est pareil avec la VHS. Il y a les trailers, les previews, les logos, la notice et ce packaging remarquable. ».
Quant aux titres en question, il s’agit d’un catalogue de 2 700 références, en très grande majorité des séries B, du genre horreur et plutôt orientées exploitation, comme Toxic Zombies, Buried Alive, Mom, Silent Night Deadly Night, Pyschos in Love, Stripped to Kill, Bad Girls in the Movies, A Killer in Every Corner… Un choix justifié par le manque de visibilité de ces catégories dans les circuits de distribution traditionnels. Et parce qu’à la différence des productions tous publics, ce pan du cinéma fantastique avait besoin de la VHS et vivait essentiellement de ce marché.
David Gary précise : « Si vous pouviez faire un film sans jamais envisager une diffusion en salles – ce qui impliquait produire une grande quantité de copies en 35mm, faire une campagne promo en télé ou radio –, bref, sans aucune de ces contraintes, il était bien plus simple de mettre le film directement entre les mains du spectateur, et il semble que les films d’action et d’horreur aient été les premiers à saisir cette opportunité. ».
Côté business, la VHS est bel et bien enterrée depuis longtemps. Née à la fin des années 70, elle a connu son apogée dans les années 80-90 avant de disparaitre début 2000, dépassée par la numérisation et terrassée par la digitalisation. Avec elle, un certain mode de consommation s’en est allé (la location au vidéo club, la copie artisanale). Un rapport quasi fétichiste à l’objet, aussi. Selon Pratt et Gary, une nostalgie autour du support s’est créée ces dernières années. On est bien tentés de les croire. Dans un tout autre domaine (encore que), Metallica ressortira le 18 avril sa toute première demo No life ’til leather sur cassette.
Bertrand Taillé
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