Synopsis : Fred et Mick, deux vieux amis approchant les quatre-vingts ans, profitent de leurs vacances dans un bel hôtel au pied des Alpes. Fred, compositeur et chef d’orchestre désormais à la retraite, n’a aucune intention de revenir à la carrière musicale qu’il a abandonnée depuis longtemps, tandis que Mick, réalisateur, travaille toujours, s’empressant de terminer le scénario de son dernier film. Les deux amis savent que le temps leur est compté et décident de faire face à leur avenir ensemble. Mais contrairement à eux, personne ne semble se soucier du temps qui passe…
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Fastueux, gracieux, truculent, décalé et théâtral, Youth remplit dûment nos attentes, en dépit de son départ bredouille de la compétition officielle au dernier Festival de Cannes et des projections qui ont divisé la critique. Paolo Sorrentino poursuit dans la continuité de LA GRANDE BELLEZZA (notre critique), sélectionné voici deux ans sur la Croisette et récompensé par l’Oscar du Meilleur Film Étranger. Après avoir dépeint avec grandeur et décadence toute la vacuité d’un journaliste-écrivain au cœur de la Rome actuelle, le cinéaste de l’excellent Il Divo, prix du Jury en 2008, suscite et réveille aujourd’hui les sentiments, les émotions et le désir. L’excellent Toni Servillo s’est transformé ici en majestueux Michael Caine et ce, jusque dans l’allure, la chevelure et les lunettes de vue. On suit ainsi l’existence apathique et les états d’âme de ce compositeur et chef d’orchestre à la retraite, en vacances dans un hôtel de luxe au pied des Alpes, avec son ami réalisateur, toujours en activité, emmené par Harvey Keitel. Dans cette mise en abyme ostentatoire, burlesque et égocentrique du monde du cinéma et du show-business, ces deux octogénaires en pleine cure de jouvence se penchent sur le temps qui passe. Ils contemplent les effets de la vieillesse à travers leurs expériences accomplies, leurs regrets, leurs amours perdues, leurs succès, les écueils de la célébrité. Dans ce spa immense et classieux où évolue une palette de sommités et d’individus aussi extravagants que fragilisés, Michael Caine et Harvey Keitel sont tout simplement grandioses, à la fois cyniques, émouvants et dignes. Ils constituent totalement le point d’ancrage du récit, avec le renfort savoureux de Rachel Weisz, Paul Dano ou encore Jane Fonda. Si le travail répond à l’expression de notre personnalité, Paolo Sorrentino explore ces liens qu’on entretient avec l’avenir et de fait, avec la jeunesse. À l’instar de La Grande Bellezza, les effluves felliniennes exhalent dans cette symphonie visuelle et esthétique, mais aussi celles de Resnais. Paolo Sorrentino sollicite constamment l’effervescence artistique en gardant toujours cette virtuosité dans la mise en scène, avec ce style opératique, ces cadrages inventifs, ces paysages picturaux, ce ton ironique sur l’industrie du divertissement et cette vision de la beauté absolue et illusoire. Ainsi, vieillesse et jeunesse s’opposent, se fondent et se complètent à tous les niveaux. Youth, qui aurait vraiment mérité de rafler un beau trophée à Cannes, est un hymne rassérénant au troisième âge, nourri de répliques mordantes, de contrastes musicaux et d’envolées lyriques et cinétiques.
- YOUTH (La Giovinezza) écrit et réalisé par Paolo Sorrentino en salles le 9 septembre 2015.
- Avec : Michael Caine, Harvey Keitel, Rachel Weisz, Paul Dano, Jane Fonda, Mark Kozelek, Robert, Seethaler, Sonia Gessner, Neve Gachev…
- Production : Nicola Giuliano, Francesca Cima, Carlotta Calori
- Photographie : Luca Bigazzi
- Montage : Cristiano Travaglioli
- Décors : Ludovica Ferrario
- Costumes : Carlo Poggioli
- Compositeur : David Lang
- Distribution : Pathé Films
- Durée : 1h58
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