Fabuleux concert de John Carpenter au NIFFF en Suisse

Publié par Jérôme Nicod le 9 août 2016
John Carpenter Live - NIFFF

John Carpenter Live – NIFFF / Photo Jérôme Nicod

Le 5 juillet 2016, le NIFFF (Neuchâtel International Fantastic Film Festival) a célébré la carrière de John Carpenter en projetant l’ensemble de son oeuvre, précédé d’un concert dirigé par le maître de l’horreur. Une occasion unique pour ses fans de lui témoigner leur admiration. Une soirée exceptionnelle, allumée dans l’antre de la folie collective.

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John Carpenter Live - affiche NIFFF

John Carpenter Live – affiche NIFFF

La tournée de concert de John Carpenter a débuté en Islande le 1er juillet dernier au cours de l’ATP Festival. Son point d’orgue sera sans doute la nuit d’Halloween, le 31 octobre prochain, au Troxy de Londres avant de terminer son tour à Paris, au Grand Rex, le 9 novembre. John Carpenter aime les surprises. Annoncé pour le 6 juillet, le concert du NIFFF a finalement été avancé d’une journée, à 10 jours de l’événement.

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Nous sommes à Neuchâtel, petite ville tranquille en Suisse. La salle est de taille modeste, sans doute plus petite que la puissance de l’ampli et des enceintes. La scène est minimaliste, avec un écran et des bâches tendues sur les quatre côtés afin de créer un effet de perpective autour de l’image, et d’entrer à l’intérieur, comme un vortex de pacotille. L’atmosphère est surchauffée par un public de tout bord, de tout genre, cinéphiles, amateurs de musique rock, geeks. 

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Sous les cris des fans, John Carpenter entre en scène, suivi de ses quatre musiciens, tous de sa famille plus ou moins proche : deux guitaristes, un batteur et un claviériste au synthé. Il a le poing levé : « I’m John Carpenter ! ». Il a toujours su se mettre en scène et les titres de ses films sont toujours précédés de « John Carpenter’s » pour bien marquer son empreinte, comme un label de qualité.

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JOHN CARPENTER, UN SURVIVANT

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La musique pour John Carpenter – l’un des rares cinéastes avec Clint Eastwood à composer ses propres bandes originales – fait partie intégrale de l’oeuvre. Il ne sait pas écrire la musique mais il l’imagine au synthétiseur, qui la transcrit pour lui. Ce faisant, il a inventé un genre avec Halloween (1978) : le slasher, et la musique électronique qui l’accompagne. La survie est l’un des thèmes qui traverse l’ensemble de sa filmographie. Il a survécu à Hollywood, qui n’a pas réussi à le digérer, et compose désormais des musiques sans image. Deux albums sont déjà sortis, LOST THEMES I (notre critique) et Lost Themes II, qui ne sont pas des morceaux non utilisés, mais des créations destinées à permettre d’imaginer les images qui vont avec. Des albums à écouter « dans sa voiture, la nuit, en circulant dans des rues sombres, pour en profiter pleinement », dit-il. Car Carpenter a aussi créé les bases du cliché musical du cinéma d’horreur. Ainsi, écouter Night (sans prêter attention au titre) évoque immédiatement une nuit et un climat de thriller. Carpenter est le troisième cinéaste a avoir trouvé une autre manière de raconter ses histoires à l’écart d’Hollywood : David Lynch compose et peint (il était à Paris pour le vernissage de ses dernières lithographies) et David Cronenberg écrit (il a annoncé, à l’occasion de son passage à Paris, sans doute arrêter le cinéma).

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Le concert s’ouvre naturellement sur son oeuvre la plus célèbre et sans doute la plus inspirante : New York 1997 (1981). L’effet sur la salle est immédiat, tel un spectacle de rock-star, les applaudissements fusent dès les premières notes et les premières images. L’idée de la toile tendue aux quatre coins de l’écran permet la projection en simultané sous plusieurs angles et plans. L’effet est d’autant plus malin qu’il est simple ; c’est aussi cela qui résume la musique et les films de John Carpenter. Sons et lumières en rajoutent. Très vite, on découvre une musique plus rock. Alors qu’il travaillait jusque-là essentiellement au synthétiseur, les partitions sont ici entièrement réécrites pour guitare, batterie et clavier. Les guitares électriques ont d’ailleurs le beau rôle. Assaut (1976) prend la suite du spectacle ; la musique est au devant de la scène, les images illustratrices, en fond, viennent en support comme dans un videoclip. Le résultat est fantastique car il démontre la force de l’association entre musique, montage et image.

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Le génie de Carpenter, impliqué à tous les stades créatifs, réside dans sa maîtrise de chaque élément constitutif d’un film : scénario, cadrage, montage et musique. Carpenter est partout. Non seulement il maîtrise les techniques mais il a surtout un sens incroyable de l’inconscient : comment manipuler consciemment et inconsciemment le public ? À ce stade, son cinéma est très proche de celui d’Hitchcock. Ses plans ont du sens, son montage privilégie les plans de coupe, les effets de surgissement, et sa musique provoque une angoisse à bas régime. Séparément, ses plans sont inoffensifs, mais le montage les rend oppressants, et la musique va lier l’angoisse et créer la tension. Chacune de ses oeuvres, surtout les plus fauchées (Prince des Ténèbres, Invasion Los Angeles, ou dernièrement The Ward) porte sa marque de fabrique : il est capable de stresser une salle entière avec un simple plan subjectif en un travelling avant et une bande sonore. Un génie de la manipulation.

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John Carpenter Live - NIFFF

Fog – John Carpenter Live – NIFFF / Photo de Jérôme Nicod

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L’APOCALYPSE SELON CARPENTER

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THE THING – notre critique (1982) fait partie du programme, bien que le thème ait été composé par Ennio Morricone. On ne peut s’empêcher de trouver derrière les notes du maestro italien le style Carpenter, dans sa rythmique et sa simplicité poisseuse et répétitive. Cette rythmique, Carpenter la reprend avec Alan Howarth pour Prince des Ténèbres (1987), réorchestré magistralement pour l’occasion. L’Antre de la Folie (1995) est également un moment de pure folie audiovisuelle : cocktail de plans d’horreur et de musique rock. Ces trois films font partie de la trilogie de l’apocalypse selon le cinéaste. L’effet d’immersion dans l’univers hanté de John Carpenter est total. Au milieu du spectacle, la musique du dernier long métrage tourné avec son ami Kurt Russell, à qui il rend hommage sur scène, fait office de respiration : la bonne humeur de Jack Burton dans les Griffes du Mandarin (1986) se transforme en apothéose pour le public.

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Le spectacle permet aussi l’écoute de quelques extraits de ces deux albums, intelligemment glissés entre ses oeuvres plus célèbres. Vortex, Distant Dream et Night sont généreusement accueillis. À ce stade d’excitation, il peut jouer n’importe quoi. Fog (1980) constitue un pas de plus dans le coeur de son univers, avec un effet 4D. En plus de l’image, du son et des vibrations, le brouillard envahit la salle. Le banal effet de fumée plonge l’espace au coeur même du scénario et de sa brume mortelle. Un des moments forts de la soirée. Dans la même veine intrusive, pour Invasion Los Angeles (1988), Carpenter chausse les lunettes noires du film, et les slogans Obey, No Thought, Consume… sont projetés sur les écrans.

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Sur scène, s’il donne l’illusion de jouer du clavier, il prend surtout le rôle de chef d’orchestre, appuyant sur les effets et lançant les vidéos à partir de son PC portable. Il mâche un chewing-gum interminable, parfois chaloupe avec la rythmique, distille quelques propos d’une grande neutralité sur ce qui va suivre. Mais il est heureux, émerveillé de voir le public aimer à ce point ses oeuvres, dont les premières remontent à plus de quarante ans. Ce n’est pas un concert mais une autobiographie en live, un partage émotionnel inédit pour cet homme de 68 ans. À l’issue des rappels, c’est Christine (1983) qui clôture la spectacle, en ouvrant sur l’univers de Stephen King. Un choix en forme de clin d’oeil, qui permet à Carpenter un dernier commentaire avant que les spectateurs, extatiques, ne quittent la salle : Conduisez prudemment. Il nous a manipulés jusqu’au bout…

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PLAYLIST DE LA SOIRÉE

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  1. Escape from New York (New York 1997) : Main title
  2. Assault on Precinct 13 (Assaut) : Main title
  3. Vortex : extrait de l’album Lost Themes
  4. Mystery : extrait de l’album Lost Themes
  5. The Fog (Fog) : Main title
  6. They Live (Invasion Los Angeles) : Coming to L.A.
  7. The Thing (Id.) : Desolation
  8. Distant Dream : extrait de l’album Lost Themes II
  9. Big Trouble in Little China (Jack Burton dans les griffes du Mandarin) : Pork Chop Express
  10. Wraith : extrait de l’album Lost Themes
  11. Night : extrait de l’album Lost Themes
  12. Halloween (Halloween, La Nuit des Masques) : Main title
  13. In the Mouth of Darkness (L’Antre de la Folie) : In the Mouth of Darkness
  14. Prince des Ténèbres (Prince of Darkness) : Darkness Begins
  15. Virtual Survivor : extrait de l’album Lost Themes II
  16. Purgatory : extrait de l’album Lost Themes
  17. Christine (Id.) : Christine Attacks (Plymouth Fury)

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