Synopsis : Tourmentée par une mère névrosée et tyrannique, la vie n’est pas rose pour Carrie. D’autant plus qu’elle est la tête de turc des filles du collège. Elle ne fait que subir et ne peut rendre les coups, jusqu’à ce qu’elle ne se découvre un étrange pouvoir surnaturel.
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Les amateurs de Stephen King, qui a fêté ses 70 ans en septembre dernier, pourront revoir en salles et version restaurée dès le 1er novembre – soit le lendemain de la fête de Halloween – Carrie au bal du diable, l’une des meilleures adaptations du romancier, portée à l’écran par Brian De Palma en 1977. Une initiative que l’on doit au distributeur Splendor Films. Quand le réalisateur de Scarface et Phantom of the Paradise découvre le premier roman Carrie (1974) de Stephen King, il voit immédiatement le potentiel artistique et commercial qu’il peut en tirer, tout en y injectant des obsessions toutes personnelles, comme le thème de l’être différent et monstrueux (Phantom of the Paradise) ou le complot et la machination (Snake Eyes, Blow out). Jusque-là , Brian De Palma avait signé les scénarios de ses films, Carrie est donc sa toute première adaptation, dotée d’un budget de 1 800 000 dollars. Avec cette histoire, centrée sur une adolescente mal dans sa peau et soufffre-douleur de sa classe qui va se venger de ses camarades de lycée grâce à ses dons de télékinésie, Brian De Palma livre une adaptation relativement fidèle du roman. Carrie au bal du diable est une véritable symphonie de l’horreur où la couleur rouge du sang joue un rôle de catalyseur de l’intrigue. Ainsi, ce sang est celui des premières règles que découvre avec affolement et incompréhension la jeune fille pubère, puis le sang de cochon, renversé sur l’infortunée « cendrillon », transformée en une statue démoniaque et vengeresse lors de la mémorable séquence finale du bal. Un morceau de bravoure que De Palma a mis deux semaines à tourner et dont le montage réunit les différentes techniques du cinéaste (split-screen, ralenti, courte focale).
Le cinéaste poursuit également la dimension pamphlétaire présente dans Phantom of the Paradise, exposant l’idée que tout ce qui ne rentre pas dans le moule est sanctionné par l’institution. Ainsi, le personnage de Carrie White, en tout point singulière et différente de ses autres camarades jusque dans ses tenues vestimentaires et son apparence, peut être vue comme une sorte de double d’un artiste indépendant en proie au conformisme de la machine hollywoodienne. S’affranchissant des clichés classiques de mise en scène, Brian De Palma propose des séquences parmi les plus marquantes de l’histoire du cinéma, à l’image du plan final onirique, à l’effet de surprise proche de celui de Vendredi 13 (1980). Le bras ensanglanté de la jeune morte-vivante jaillit de la tombe pour attraper celui de Susan (Amy Irving), sa « tortionnaire » traumatisée, alors qu’elle arpente les ruines calcinée de la maison avec une inscription « Carrie White brûle en enfer » (« Carrie White burns in hell »).
L’actrice Army irving retrouvera le réalisateur sur son film suivant Furie. À sa sortie, Carrie au bal du diable devient un succès public et critique phénoménal, agrandissant la popularité alors naissante de Stephen King. L’écrivain se montrera d’ailleurs très satisfait de l’adaptation, malgré certaines modifications notoires, comme la structure du récit et la mort de Carrie. Dans le film, elle est brûlée dans la maison après avoir crucifiée sa mère avec des couteaux de cuisine et dans le livre, elle agonise dans la rue des suites de blessures infligées par sa mère. L’inoubliable et magnifique thème musical de Pino Donaggio en forme de clin d’œil à Psychose (Bernard Hermann était prévu au départ avant son décès en décembre 1975) achève de faire de Carrie un summum dans le cinéma d’horreur. Carrie a récolté le Grand Prix d’Avoriaz et le Saturn Award du meilleur film d’horreur en 1977.
Le personnage de Carrie vaut à Sissi Spacek d’être nommé aux Oscars et de recevoir une mention spéciale au Festival d’Avoriaz en 1977. Il en va de même pour Piper Laurie (Twin Peaks), nommée meilleure second rôle féminin aux Golden Globes et aux Oscars, pour son personnage halluciné de mère fanatisée et possessive. C’est aussi l’une des premières apparitions de John Travolta à l’écran, ici dans la peau d’un jeune homme rebelle pas loin des compositions à venir de l’acteur dans les films musicaux La fièvre du samedi soir et Grease. Une suite mauvaise de Carrie fût proposée en 1999, ainsi que deux remakes inutiles, un pour la télévision en 2002 et un pour le cinéma intitulé Carrie, la vengeance en 2012. L’histoire de Carrie a même fait l’objet d’une comédie musicale à Broadway avec un échec retentissant. La ressortie du classique de Brian De Palma s’avère donc une expérience à ne pas manquer.
- CARRIE AU BAL DU DIABLE (Carrie) de Brian De Palma
- Ressortie salles : 1er novembre 2017
- Copie numérique restaurée
- Réalisation : Brian De Palma
- Avec : Sissy Spacek, Piper Laurie, Amy Irving, William Katt, Betty Buckley, John Travolta, Nancy Allen, P.J. Soles, Priscilla Pointer, Sidney Lassick, Stefan Gierasch, Cameron De Palma, Edie McClurg…
- Scénario : Lawrence D. Cohen d’après l’oeuvre de Stephen King
- Production : Paul Monash, Brian De Palma
- Photographie : Mario Tosi
- Montage : Paul Hirsch
- Décors : Jack Fisk, Bill Kenney
- Costumes : Rosanna Norton
- Musique : Pino Donaggio
- Distribution : Splendor Films
- Durée : 1h38
- Sortie initiale : 3 novembre 1976 (États-Unis) – 22 avril 1977 (France)