Synopsis : Antonio Bay, petit village de pêcheurs de Californie du Nord, s’apprête à célébrer son centenaire. Mais la quiétude de la ville est perturbée par de mystérieux évènements…
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Pour fêter Halloween ce 31 octobre, Fog de John Carpenter ressort en salles en version restaurée 4K inédite grâce à Splendor Films. Flashback. John Carpenter est auréolé de la casquette de Maître de l’Horreur depuis le succès retentissant de son Halloween en 1978. Comme toute étoile montante à Hollywood, les critiques attendent sa prochaine réalisation. Plutôt que de céder aux sirènes des majors, le réalisateur, après un téléfilm biographique sur Elvis Presley, se tourne vers la petite maison AVCO-Embassy, spécialisée dans les petits films d’horreur pour un contrat de deux projets : le premier fruit de cette collaboration est Fog, en 1980. Écrivant à nouveau le script à quatre mains, avec sa compagne d’alors (et productrice) Debra Hill, John Carpenter s’inspire d’un film de série B britannique, The Trollenberg Terror, qui mettait en scène des fantômes cachés dans les nuages, ainsi que d’une visite qui l’a particulièrement marquée du site de Stonehenge, nappé dans le brouillard. Des légendes locales de naufrages achèvent de l’inspirer. Limité à un budget de 1 million de dollars (le triple d’Halloween), John Carpenter a conscience que son histoire de fantômes vengeurs émergeant d’un brouillard maléfique a toutes les apparences d’un film de série B. Il corrigera cet aspect en filmant en format anamorphique, traditionnellement réservé aux grandes productions. Quitte à filmer un petit film d’horreur, autant qu’il n’en ait pas l’aspect. Si Debra Hill était encore sa compagne au moment de l’écriture, Carpenter prend pour rôle principal celle qu’il a épousé en 1979, Adrienne Barbeau, qu’il avait rencontrée sur le tournage de son téléfilm Meurtre au 43ème étage, réalisé juste avant Halloween. Jamie Lee Curtis, l’héroïne d’Halloween, revient également, accompagnée par sa mère, Janet Leigh, la protagoniste de Psychose. Les noms des personnages sont aussi l’occasion de références de la part de Carpenter : l’un porte le nom de Dan O’Bannon, scénariste d’Alien, qui avait aidé Carpenter sur son film d’étudiant, Dark Star ; un autre, Nick Castle, qui avait campé le tueur d’Halloween ; un troisième, Tommy Wallace, le monteur attitré de Carpenter ; et le médecin-légiste de la ville s’appelle Phibes, référence à l’Abominable Docteur Phibes, film d’horreur culte avec Vincent Price.
Le film occupe une position mal aimée dans le coeur des fans de Carpenter. Il est vrai qu’il l’a réalisé entre Halloween et New York 1997, des films universellement salués, et son scénario assez éculé, avec des personnages sans grande profondeur, a déçu plus d’un. Cependant, s’il s’agit seulement de son deuxième film d’horreur, Carpenter commence à trouver ses marques. L’action se concentre rapidement en un huis-clos, où les personnages commencent à succomber à la terreur et la folie ; procédé qu’il avait déjà très bien exploité dans Assaut et qui reviendra souvent dans la suite. Mais là où l’auteur s’affirme, c’est que John Carpenter ne propose que six meurtres, pratiquement tous hors-champ, prenant le contrepied d’une mode du gore dans l’horreur hollywoodienne. Une mode qu’il avait lui-même contribué à lancer avec Halloween !
Sa volonté de se détacher des codes le pousse à sublimer un genre très marqué par le nanar, au-delà de sa maîtrise technique indéniable. Une profondeur se trouve rajoutée avec sa critique en filigrane de l’Amérique des Pères Fondateurs. En effet, la ville doit sa prospérité (et sa malédiction) à un naufrage criminel, qui revient la hanter. Le score au box-office est une réussite, mais la critique est très désarçonnée, d’autant qu’AVCO-Embassy a dépensé le triple du budget en publicité, allant jusqu’à installer des machines à brouillard dans les cinémas. Carpenter lui-même est terriblement déçu par le premier montage, tout comme les producteurs. Pour le rendre plus effrayant, il refait la musique, le montage et tourne des scènes plus gores qu’initialement prévues. Le remake en 2005 sera franchement raté et édulcoré. De nos jours, Fog, bien que souvent oublié, a acquis une réputation de Dents de la Mer surnaturel et de film d’ambiance réussi.
Arthur de Boutiny
- FOG (The Fog)
- Ressortie salles : 31 octobre 2018
- Version restaurée 4K
- Réalisation : John Carpenter
- Avec : Adrienne Barbeau, Jamie Lee Curtis, Janet Leigh, John Houseman, Tom Atkins, James Canning, Charles Cyphers, Nancy Loomis, Ty Mitchell, Hal Holbrook
- Scénario : John Carpenter, Debra Hill
- Production : Debra Hill
- Photographie : Dean Cundey
- Montage : Charles Bornstein, Tommy Lee Wallace
- Décors : Tommy Lee Wallace
- Costumes : Stephen Loomis, Bill Whitten
- Musique : John Carpenter
- Distribution : Splendor Films
- Durée : 89 minutes
- Sortie initiale : 8 février 1980 (États-Unis) – 19 mars 1980 (France)