New York Melody (Begin Again) de John Carney: critique

Publié par Guillaume Ménard le 30 juillet 2014

Synopsis : Gretta et son petit ami viennent de débarquer à NYC. La ville est d’autant plus magique pour les deux anglais qu’on leur propose de venir y vivre pleinement leur passion : la musique. Le rêve va se briser et l’idylle voler en éclat quand, aveuglé par la gloire naissante, il va la plaquer pour une carrière solo et… une attachée de presse. Ses valises prêtes et son billet de retour pour Londres en poche, elle décide de passer une dernière nuit à New York avec son meilleur pote. Ce dernier l’emmène dans un pub, la pousse sur scène et la force à chanter. Dans la salle un producteur s’adonne à sa plus dangereuse passion : l’alcool. Revenu de tout, du succès et de sa gloire passée, amer, rancunier, il a perdu le fil de sa vie,… Et soudain il entend cette voix, découvre cette grâce, ce talent brut et authentique… Une rencontre enchantée qui pourrait finir en chansons…

 

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New York Melody de John Carney - affiche

New York Melody de John Carney – affiche

Sept ans après son magnifique Once, l’irlandais John Carney revient avec une nouvelle oeuvre musicale qui sort les éléments de romance des sentiers battus. Il avait déjà redéfini les règles du genre en 2007 avec les personnages qui chantaient sans danser. La musique était un moyen d’expression pour le duo de comédiens Glen Hansard et Markéta Irglová, mais elle contribuait aussi au langage cinématographique. C’est le cas avec New York Melody, qui poursuit sur cette note réaliste en centrant cette fois-ci l’action dans la Grosse Pomme après Dublin. On y découvre Gretta (Keira Knightley), jeune musicienne et compositrice anglaise plaquée par son petit ami Dave (Adam Levine, le chanteur de Maroon 5), devenu une rockstar. New York Melody démarre ainsi dans un bar, sous une lumière tamisée, où elle est invitée à chanter. Carney nous convie dans son univers avec une première séquence musicale où notre héroïne « donne » une part d’elle-même avec une mélodie à fleur de peau et vocalise son spleen « pour les gens qui sont seuls à New York ». Elle est alors remarquée par Dan (Mark Ruffalo), un producteur en désuétude, qui va lui proposer de signer avec son label en produisant un disque avec elle. Si l’introduction de ce second long-métrage est empreinte de mélancolie, elle est suivie par un rythme plus enjoué sous le signe de l’humour. En effet, le personnage désabusé de Dan, entre ses échecs professionnels et la séparation d’avec sa femme et sa fille, multiplie les scènes hilarantes entre deux ballades.

 

Keira Knightley et Mark Ruffalo dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

Keira Knightley et Mark Ruffalo dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

 

Le récit non conventionnel met clairement en exergue l’abattement qui survient après une rupture. Les complaintes de Gretta parlent d’amour, de rêves, de regrets mais aussi d’espoir. La communication se fait au travers des mélodies, notamment entre Gretta et son ex Dave. On assiste non pas à de simples performances musicales mais à de véritables monologues chantés qui nous font découvrir l’intimité d’une relation détruite par le succès. Le personnage de Dave pose la question des effets de la célébrité. Peut-on rester soi-même en connaissant la popularité ? Si cette thématique a été utilisée à maintes reprises au cinéma, le réalisateur évite soigneusement les clichés qui en découlent. Pas de manichéisme dans New York Melody, seulement un problème de communication entre les personnages. C’est aussi la difficulté de se révéler à l’autre, de mettre à nu ses sentiments sans bouclier. La dénonciation de l’industrie du disque en pleine révolution à l’heure de la musique en ligne est aussi très présente. Le cynisme des labels vient donc violemment se heurter à la crédulité des mélodies de la jeune chanteuse.

 

Adam Levine dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

Adam Levine dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

 

John Carney filme ainsi ses acteurs de manière pudique ; des plans serrés sur les yeux de Gretta aux plans d’ensemble où elle joue avec un orchestre dans tout New York. Les plans fixes sont très rares, la caméra est plutôt sur le qui-vive, prête à saisir un instant volé qui traduit cette envie de sincérité. L’émotion jaillit au détour d’un regard, du temps passé et perdu auquel Gretta tente de faire table rase, en le racontant en chanson pour ainsi mieux faire son deuil, faisant référence directement au titre original, Begin Again. La musique devient donc ici tour à tour un objet de séduction, un substitut affectif, une thérapie. La simplicité qui se dégage de New York Melody tient aussi aux lieux des séquences comme le toit d’un immeuble, une ruelle vide ou sous un pont. Cette sobriété crée l’effervescence. Tout comme les instruments utilisés qui contribuent à cette bonhomie, de la guitare à la batterie en passant par le violon et la basse. Dan, en producteur visionnaire, qualifie en outre le genre entre « Norah Jones et The Cardigans ».

 

Keira Knightley et Mark Ruffalo dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

Keira Knightley et Mark Ruffalo dans New York Melody (Begin Again) de John Carney / © UGC Distribution

 

Si sur le papier le choix du casting était plutôt discutable, il fonctionne pourtant à merveille. Keira Knightley remplit son contrat haut la main pour son premier rôle dans une Å“uvre musicale alors qu’Adam Levine, pour ses débuts au cinéma, livre une prestation à l’image de sa vraie vie. Quant à Mark Ruffalo, sa performance tragi-comique constitue bel et bien l’une des forces principales de ce feel-good movie. Pendant près de deux heures, New York Melody nous balade en musique de manière imprévisible et nous surprend. C’est cette sensibilité et cette fraicheur inhérentes au cinéma de Carney, également auteur des chansons, qui l’imposent définitivement comme la comédie romantique de l’été, loin, très loin des produits formatés du genre, avec une bande originale magnifique, entre lyrisme exacerbé et romantisme post-moderne.

 

Guillaume Ménard

 

 

  • NEW YORK MELODY (Begin Again) écrit et réalisé par John Carney en salles le 30 juillet 2014.
  • Casting : Keira Knightley, Mark Ruffalo, Adam Levine, James Corden, Hailee Steinfeld, Yaslin Bey, Catherine Keener, Aya Cash, David Abeles, Cee-Lo Green…
  • Production : anthony Bregman, Tobin Armbrust
  • Photographie : Yaron Orbach
  • Musique : Gregg Alexander
  • Montage : Andrew Marcus
  • Décors : Chad Keith
  • Costumes : Arjun Bhasin
  • Distribution : UGC
  • Durée : 1h44

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