Série/ Halt and catch Fire (saison 1): critique

Publié par Guillaume Ménard le 8 août 2014

Synopsis : Au cÅ“ur des années 80, au Texas, un visionnaire, un ingénieur et un prodige spécialisés dans la micro-informatique confrontent leurs inventions et innovations aux géants de l’époque. Leurs relations sont alors mises à rude épreuve, entre convoitises, jalousies et crises d’égo…

 

♥♥♥♥♥

 

Halt and Catch Fire - affiche AMC

Halt and Catch Fire – affiche AMC

AMC continue de redonner un bon coup de fouet à la production télévisuelle en terme d’innovation et en qualité d’écriture lorgnant définitivement vers la force scénaristique de HBO. A l’épilogue des séries phares comme Mad Men, Breaking Bad ou encore THE KILLING (notre critique des saisons 1 et 2) qui ont suscité un véritable engouement critique et public, la chaîne se devait de trouver une relève prometteuse. C’est chose faite avec Halt and Catch Fire. Ainsi après des publicitaires sixties à Madison Avenue, un professeur de physique mourant reconverti dans le trafic de drogue et un duo de policiers enquêtant sur une affaire sordide, on nous propose ici l’histoire de deux hommes voulant créer leur ordinateur en 1983 au Texas. Sur le papier, le pitch est sans doute moins percutant mais l’on est rapidement surpris du ton donné dès l’épisode pilote, avec un tatou traversant la route avant de se faire écraser par une voiture sportive d’où sort Joe MacMillan (Lee Pace), ancien salarié d’IBM qui va rejoindre l’entreprise Cardiff Electric. Ce personnage est sans concession, rongé par l’ambition aveugle de construire sa machine. Il va ainsi convaincre une étudiante, Cameron Howe (Mackenzie Davis), et un salarié de Cardiff Electric, Gordon Clark (Scoot McNairy), pour mener à bien son projet.

 

Lee Pace (Joe MacMillan) et Scoot McNairy (Gordon Clark) - Halt and Catch Fire - AMC

Lee Pace (Joe MacMillan) et Scoot McNairy (Gordon Clark) – Halt and Catch Fire – AMC

 

Le cadre de l’action est à resituer dans son contexte historico-technologique. En 1983, aux Etats-Unis, la course aux inventions et aux innovations technologiques prenait son sens dans une dynamique de Guerre Froide. Les entreprises et les multinationales s’adonnaient à une bataille acharnée et l’espionnage commercial était monnaie courante. C’est ce qui se passe dans Halt and Catch Fire. Les protagonistes font face au géant IBM et doivent redoubler d’ingéniosité pour remporter cette compétition où tous les coups sont permis. Le titre de la série fait référence à un running-gag prétendant qu’il existerait une manipulation informatique capable d’enflammer les composants d’un ordinateur et de stopper toutes ses fonctions. Là où elle se démarque, c’est dans sa qualité d’écriture qui instaure un rythme diablement efficace enchaînant les rebondissements intelligents qui évitent les cliffhangers trop formatés et les deus ex machina souvent présents sur le petit écran. Les créateurs Chistopher Cantwell et Christopher C. Rogers, parviennent à distiller la folie de ce milieu informatique via des personnages riches et complexes.

 

Lee Pace (Joe MacMillan) - Halt and Catch Fire - AMC

Lee Pace (Joe MacMillan) – Halt and Catch Fire – AMC

 

En tête de liste, le personnage de Joe, arriviste calculateur et mythomane qui, au fur et à mesure de la saison, provoque une fascination qui n’est pas sans rappeler le personnage de Don Draper dans Mad Men. Lee Pace, déjà vu dans la série Pushing Daisies ou encore dans Le Hobbit et prochainement Les Gardiens de la Galaxie, est littéralement habité par le rôle, entre séduction et machiavélisme. Il contraste avec le personnage de Gordon, génie névrosé et père de famille, qui lui a beaucoup à perdre dans son implication. Avec cette nouvelle prestation, Scoot McNairy confirme son rang après ARGO (notre critique). Il en est de même pour Mckenzie Davis qui excelle dans le rôle de Cameron, véritable symbole de la jeunesse punk destroy  mais aussi l’une des premières pionnières informatiques. L’insouciance de son personnage, fan des Clash et de jeux vidéo, se heurte rapidement à la froideur de Joe. Halt and Catch Fire explore certes cette course à la technologie, mais souligne aussi la déshumanisation qui en découle, transformant ironiquement ces concepteurs d’ordinateur en véritables machines, et qui s’inscrit dans une politique reaganienne ultralibéraliste. Si la politique de l’offre guide les motivations de la majorité des dirigeants de Cardiff Electric, l’envie de renouveau règne dans la partie créatrice. On suit donc avec intérêt les débuts de la personnalisation de l’ordinateur en dépit d’un jargon technique qui peut parfois rebuter. Car l’aspect technique est au centre de la série. Mais parfaitement bien expliqué, il devient un ressort dramatique et on se surprend à être stimulé par la création d’un BIOS.

 

Lee Pace (Joe MacMillan), Mackenzie Davis (Cameron Howe), Scoot McNairy (Gordon Clark) et Toby Huss (John Bosworth) - Halt and Catch Fire - AMC

Lee Pace (Joe MacMillan), Mackenzie Davis (Cameron Howe), Scoot McNairy (Gordon Clark) et Toby Huss (John Bosworth) – Halt and Catch Fire – AMC

 

Toute la force émane d’une mise en scène menée tambour battant, avec un langage cinématographique propre à chaque personnage. Les plans de Cameron sont rapides, serrés, en adéquation avec son caractère, alors que le découpage des scènes de Joe est plus détourné, avec des plans d’ensemble obliques qui instaurent véritablement un malaise et une tension sous-jacente. L’éclairage, terne, et aux couleurs froides comme le bleu, renforce de son côté l’aspect surréaliste et onirique des scènes, qui tend à préférer laisser les personnages dans l’ombre. La reconstitution des années 80 est quant à elle réaliste et accompagnée par une bande son dynamique avec des synthés qui nous replongent dans la New Wave. C’est le cas du générique d’ouverture, très high-tech, s’ouvrant sur Still on Fire de Trentemøller qui nous révèle les silhouettes pixellisées de nos protagonistes en suivant l’allumage presque cosmique d’un ordinateur vu de l’intérieur. Ainsi, Halt and Catch Fire s’impose comme l’une des meilleures surprises de l’année 2014, aux côtés de TRUE DETECTIVE (notre critique) et THE LEFTOVERS. Croisement intelligent entre Mad Men et Silicon Valley, la série affirme une audace et une qualité scénaristique rare. Au regard des dernières audiences basses (574 000 pour l’épisode final) et de la politique d’AMC basé sur la loi de l’audimat, on espère tout de même une seconde saison liée à la fin ouverte de cette première partie passionnante.

 

Guillaume Ménard

 

 

  • Série américaine HALT AND CATCH FIRE diffusée depuis le 1er juin 2014 sur AMC.
  • Casting : Lee Pace, Scoot McNairy, MacKenzie Davis, Toby Huss, David Wilson Barnes, Bianca Malinowski, Scott Michael Foster…
  • Créateur et scénariste : Christopher Cantwell, Christopher C. Rogers
  • Producteur : Jeff Freilich
  • Réalisation : Juan José Campanella (pilote)
  • Compositeur : Paul Haslinger
  • Première saison de 10 épisodes d’environ 52 minutes
  • Diffusion en France du 3 juin au 5 août 2014 sur Canal+ Séries

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