Synopsis : Brett et Michelle Pierson ont du mal à  raviver l’étincelle dans leur relation, qui s’est enlisée depuis le stress du mariage et les enfants. Lorsque l’ami de Brett, Alex et la sÅ“ur de Michelle, Tina, les accompagnent en vacances, le quatuor s’engage dans une lutte tragi-comique pour suivre leurs rêves personnels, tout en restant bons amis.
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Malgré les productions imposantes comme Game of Thrones ou TRUE DETECTIVE (notre critique), HBO continue de lancer des séries où la comédie règne en maître. En ce début d’année, la chaîne a fait appel aux frères Duplass, responsables de Cyrus et Jeff, who lives at home, pour créer Togetherness. Un duo talentueux qui s’est peu à peu imposé outre-Atlantique comme une nouvelle branche de la nouvelle vague comique. Moins déjanté que Paul Feig (Mes meilleures amies) mais plus mature que Nicholas Stoller (Sans Sarah, rien ne va), l’humour de Jay et Mark Duplass se définit comme une hybridation entre le cinéma de Judd Apatow (40 ANS MODE D’EMPLOI – notre critique) et la série Enlightened, créée par Mike White et diffusée sur HBO de 2011 à 2013. Togetherness parle du temps qui passe, mais aussi de renouveau spirituel. En 8 épisodes de 25 minutes, cette première saison parvient à émouvoir tout en donnant le sourire. Axée sur le couple de Michelle (Mélanie Lynskey) et Brett Pierson (Mark Duplass lui-même), l’histoire démarre véritablement avec l’expulsion de son meilleur ami Alex Pappas (Steve Zissis) de son appartement. Brett lui propose de venir vivre chez eux alors que la sœur de sa femme, Tina (Amanda Peet), vit une rupture difficile et rejoint le cocon familial. L’action se déroule à Los Angeles, choix judicieux dans les oppositions qu’il engendre. La terre californienne, derrière ses sourires hollywoodiens, dissimule un malaise sur la question du bonheur. Ici, c’est le couple de Bret et Michelle qui se désagrège au fur et à mesure des épisodes, à l’approche de la quarantaine. La mise en scène est sobre, sans artifice, et parvient à capter l’âme humaine. Les doutes et l’incompréhension au sein du couple sont traduits par une caméra à l’épaule jamais statique.
En 25 minutes, chaque épisode devient quasiment une litote tant le récit véhicule un discours plus grave que les apparences de comédie légère. Les scènes sont donc très courtes mais efficaces et fonctionnent à chaque fois. Cependant, le rythme centré sur le couple est plutôt lent et mélancolique, à l’inverse de la dynamique proposée par les personnages d’Alex et Tina, véritable cyclone comique. Alex, qui tente de percer en tant qu’acteur, va être coaché par Tina, ce qui donne lieu à des situations vraiment cocasses. L’enjeu dramatique concerne l’ensemble des protagonistes qui recherchent le bonheur mais ignorent souvent comment y parvenir. Les conventions vont donc être brisées, chacun à sa propre manière. Les femmes sont ici décidées et ne reculent devant rien pour atteindre leurs rêves. À l’inverse, les hommes sont plus introvertis, ce qui déclenche le rire au moment de leur réveil spirituel. Là où Enlightened traitait de la question de l’illumination avec un côté new age totalement assumé, les frères Duplass empruntent la voie du mysticisme moderne avec prudence et recul.
La fin du troisième épisode marque véritablement l’attachement à ce groupe devenu familier. Les cinq autres ne sont pas en reste, avec des dialogues toujours aussi désopilants et une intrigue addictive. L’introspection et la course au bonheur des membres du groupe renvoient beaucoup au cinéma d’Alexander Payne, de Monsieur Schmidt à The Descendants en passant par l’excellent Sideways. Ce sont ces personnages hauts en couleur qui constituent la force principale de la série, avec leurs qualités, mais surtout leurs défauts. Le tout est servi par une bande originale aux résonances pop-rock : Skid Row, Nurses, Family Portrait ou encore James Blake avec le morceau The Wilhelm Scream, apothéose musicale poignante du final de la saison. Les thèmes instrumentaux sont composés par Michael Andrews, auteur du score de Donnie Darko ou encore de Funny People, qui donnent cette impression de flottement lyrique.
Pourtant, après le visionnage, on ressort dans un état de questionnement et d’amusement souvent amer. Car si l’ensemble se tient, Togetherness ne fait pas vraiment preuve d’une inventivité originale. Le schéma narratif ne laisse pas beaucoup de place à l’étonnement. On parvient souvent à prévoir les aboutissants de l’histoire en se demandant seulement de quelle manière les protagonistes vont évoluer dans leur quête. De plus, si la philosophie du « vivre ensemble » parait magnanime au départ, elle pêche en s’accordant des séquences pleines de bons sentiments. Ce trop-plein de bienveillance s’exprime par des procédés techniques lourds (le ralenti dans la scène finale de l’épisode 5). En revanche, ce reproche doit être nuancé, la noirceur de la vie contée à l’écran donne malgré tout un contrepoids.
Togetherness, avec ses faiblesses, n’a su toutefois charmer qu’une petite partie du public américain, avec 350 000 téléspectateurs en moyenne par épisode (contre 430 000 pour le pilote). Un score faible au regard des audiences habituelles pour les comédies de HBO qui attirent généralement 2 millions de personnes par épisode. Pourtant, la chaîne a décidé de la renouveler pour une deuxième saison prévue en 2016. Un plaisir qu’il serait dommage de bouder, ce bol de fraîcheur s’inscrit dans l’air du temps. À défaut de révolutionner la dramédie, Togetherness propose un bon moment de télévision au casting génial, Amanda Peet et Mélanie Lynskey en tête, qui prouvent qu’une vie (meilleure ?) existe après le cinéma.
- Série américaine TOGETHERNESS a été diffusée du 11 janvier au 8 mars 2015 sur HBO.
- Créateurs : Jay et Mark Duplass
- Avec : Mark Duplass, Mélanie Lynskey, Amanda Peet, Steve Zissis, Peter Gallagher, John Ortiz, Joshua Leonard, Mary Steenburgen…
- Producteurs: Aida Rogers, Jay Deuby, Nowell Grossman, Tim Christenson, Jay et Mark Duplass…
- Première saison de 8 épisodes de 25 minutes.
- Diffusée en France sur OCS du 12 janvier au 9 mars 2015.
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