Synopsis : En cinquante ans et bientôt soixante-dix films, Werner Herzog a battu mille records et échappé autant de fois à la mort. Il est le seul cinéaste de l’histoire à avoir tourné sur les sept continents. Signes de vie et Grizzly Man, Aguirre, la colère de Dieu et Bad Lieutenant : Escale à La Nouvelle-Orléans : l’immensité de son œuvre éclaire le cinéma moderne. De préhistoires en apocalypses, de traversées du désert en retours triomphaux, l’itinéraire qu’il a tracé est unique. Comment ressaisir celui-ci dans sa totalité ? Et comment épouser les continuités et les évolutions du voyant, de l’écrivain, du marcheur que Herzog est aussi ? En allant non pas film à film mais période par période, idée par idée : pas à pas.
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Emmanuel Burdeau et Hervé Aubron, déjà auteurs d’un livre d’entretien avec Werner Herzog paru en 2008 chez Capricci sous le titre Manuel de Survie, remettent sur le métier leur ouvrage avec Werner Herzog, pas à pas, une analyse à quatre mains de l’œuvre du réalisateur allemand. Pas à pas, car ils règlent les leurs sur ceux du cinéaste, chronologiquement, pour tenter d’appréhender dans son intégralité l’œuvre immense de Herzog. Ainsi, le livre se divise en sept chapitres, écrits par l’un ou l’autre des deux auteurs, qui abordent une période donnée de la carrière du metteur en scène d’Aguirre : la période allemande, les premiers films américains, la traversée du désert après l’échec de Fitzcarraldo, le retour en grâce des années 2000… En bons anciens critiques des Cahiers du Cinéma, où ils ont tous deux officié au tournant de cette même décennie, Burdeau et Aubron cherchent l’auteur derrière le réalisateur, tentent de faire émerger les thèmes centraux de l’œuvre. À ce jeu-là, Burdeau en tire ses théories sur la puissance ou le temps dans la filmographie de Herzog qui sont toujours intéressantes, parfois franchement convaincantes. Les élucubrations d’Aubron en revanche, qu’elles traitent du rapport à l’art de Herzog ou de la scatologie supposée de Grizzly Man, peinent à emporter l’adhésion. La chose n’affaiblit guère le livre ceci dit ; la plus grosse partie de l’oeuvre de Herzog étant traitée par Emmanuel Burdeau. D’ailleurs, la fonction d’un tel ouvrage est moins d’opérer une démonstration irréfutable que d’engager la réflexion sur un cinéaste donné. Et à cet égard, le livre est réussi car il donne à repenser le travail d’un metteur en scène hors norme, son nomadisme forcené, l’intensité de son regard sur toutes choses… L’exercice est d’autant plus intéressant avec Herzog que l’on connaît généralement mal le réalisateur en dehors de ces longs-métrages de fiction qui, seuls, ont fait l’objet d’une édition DVD en coffret. Or, ces fictions constituent à peine la moitié de la filmographie de son auteur. Les documentaires, moyens et longs-métrages, y foisonnent et le livre de Burdeau et Aubron permet de prendre connaissance de plusieurs de ces films qui semblent passionnants (en attendant une édition DVD complète, on trouvera un certain nombre de ces documentaires disponibles sur YouTube). Le livre est aussi l’occasion d’entendre parler des films les plus récents du cinéaste qui, pour la plupart, n’ont pas été distribué en France (seul un de ses quatre derniers films a connu une sortie salles), notamment Lo and Behold, Reveries of the Connected World, son captivant documentaire sur l’origine et le futur d’Internet.
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- WERNER HERZOG, PAS À PAS d’Emmanuel Burdeau et Hervé Aubron disponible aux Éditions Capricci à partir du 15 juin 2017.
- 240 pages
- 20 €