Deauville 2017/ Promised Land de Eugene Jarecki : critique

Publié par Antoine Gaudé le 9 septembre 2017

Synopsis : Au volant de la Rolls-Royce de 1963 d’Elvis Presley, Promised Land nous entraîne dans une balade musicale sur les routes américaines, durant la campagne électorale de 2016; pour essayer de comprendre comment un garçon issu d’une petite ville s’est perdu en chemin puis est devenu le King tandis que son pays, qui fut une démocratie, est devenu Empire.

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Promised Land - affiche

Promised Land – affiche

Après l’excellent We Blew it de Jean-Baptiste Thoret, le Festival de Deauville offre un second documentaire, Promised Land de Eugene Jarecki, sur l’évolution de l’Amérique des années 1950 à aujourd’hui sous le prisme de l’icône nationale, ou plutôt de la figure tragique, Elvis Presley. Retraçant la vie tourmentée du King à bord de sa Rolls-Royce, Promised Land traverse les lieux et espaces de sa vie (le Tennessee, Memphis, New York, Hollywood, Las Vegas). Il y a quelque chose de terriblement bouleversant à voir l’immense talent gâché par des choix douteux – le caractère faustien de sa rencontre avec le Colonel Parker – et toujours marchandé au prix fort (à la télévision, au cinéma, à Vegas). C’est l’histoire de l’Amérique, celle de la commercialisation et de l’exportation d’un divertissement, d’un rêve américain, d’un mythe, toujours plus artificiel et anachronique. La réappropriation culturelle dont il a été la victime est monnaie courante aux États-Unis. Malgré ses inspirations dans la musique afro-américaine (blues, gospel, soul), classe populaire dont il est pourtant issu, Presley sera trop vite façonné et vendu comme une icône nationale, impeccable sous tous rapports. Il lui sera d’ailleurs reproché de ne pas prendre de position lors du conflit vietnamien contrairement à l’autre figure emblématique, Mohammed Ali. Si des bons moments, il en a eu dans sa vie – sa période musicale chez Sun, Priscilla, son comeback de 1968 –, l’Amérique capitaliste a fini par avoir raison de lui. Avec de prestigieuses interventions, bien qu’élitistes et souvent de gauches (Ethan Hawke, David Simon, Alec Baldwin, Ashton Kutcher, Mike Myers), le documentaire tient un angle d’attaque précis pour lier la déchéance de l’Amérique à la destruction du chanteur. Mais l’interview du King, qui sert de fil conducteur au récit de sa vie et les interventions de ses proches, apportent une autre vision, plus nuancée et ambiguë, sur ce qu’il était vraiment. Le problème de l’Amérique est d’ordre mythologique plus que démocratique, terme trop galvaudé, que les Américains opposent au capitalisme récent. Depuis les années Reagan, elle chante l’Amérique traditionnelle des années 1950, loin pourtant d’être un modèle de vivre-ensemble. Elle écarte les années 1960 et 1970, trop complexes, plurielles et subversives pour faire jaillir un ordre sécuritaire. Elle fantasme depuis toujours sa conquête de l’Ouest alors qu’elle n’est qu’un génocide de plus. Comme le formule très justement André Glucksmann, « dès l’origine, l’Amérique, protestante et capitaliste, a manqué son épopée pour avoir su trop bien chanter Dieu et parler affaires ». L’histoire de l’Amérique, c’est l’histoire d’une fiction criminelle, parfaitement maîtrisée et contenue par un empire dédié à cela, sauf pendant une courte décennie, une révolution culturelle et intellectuelle qui a offert un second regard politique. Mais, heureusement pour eux, depuis longtemps rentré dans le rang, presque oublié.

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  • PROMISED LAND
  • Sortie : prochainement
  • Réalisation : Eugene Jarecki
  • Avec : Peter Guralnick, Chuck D., M. Ward, Greil Marcus, Ethan Hawke, David Simon, Alec Baldwin, Ashton Kutcher, Mike Myers…
  • Scénario : Eugene Jarecki
  • Production : Christopher St. John, David Kuhn, Eugene Jarecki, Manuel Chiche
  • Photographie : Etienne Sauret, Tom Bergmann
  • Montage : Simon Barker, Elia Gasull Balada, Alex Bingham, Laura Israel
  • Son : Nikola Chapelle
  • Musique : Robert Miller, Antony Genn, Martin Slattery
  • Distribution : The Jokers / Les Bookmakers
  • Durée : 1h57

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