Synopsis : Amos Gitaï retourne dans les territoires occupés pour la première fois depuis son film documentaire Journal de Campagne (1982). Gitaï circule en Cisjordanie, où il est témoin des efforts de citoyens israéliens et palestiniens pour tenter de dépasser les conséquences d’une occupation qui dure depuis cinquante ans.
♥♥♥♥♥
Avec son nouveau long métrage, Amos Gitaï poursuit son travail de documentariste et d’observateur du conflit israélo-palestinien, comme il l’a déjà fait auparavant dans son documentaire-fleuve Donnons une chance à la paix (1993), ou encore L’Arène du meurtre (1996) et le docu-fiction Le Dernier Jour d’Yitzhak Rabin. Ces deux derniers films sont consacrés à Yitzhak Rabin, le Premier ministre israélien assassiné par un extrémiste juif en novembre 1995, et aux conséquences de sa mort sur le processus de paix et les accords d’Oslo de 1993 dont il fut l’un des principaux artisans. Trente-cinq ans après l’un de ses premiers documentaires, Journal de campagne, tourné avant et pendant la guerre du Liban de 1982, le réalisateur retourne en Cisjordanie, dans les Territoires occupés depuis 1967 et la Guerre des Six jours. À la manière d’un journaliste, il associe reportages sur le terrain et entretiens et apparaît souvent à l’écran. Des moments complétés par des extraits d’une très longue conversation qu’il a eu avec Yitzak Rabin, très peu de temps avant son assassinat. Un document qui va bien au delà de l’habituelle dichotomie terroristes/colons de biens des médias. Sans surprise, le constat qu’il dresse de la situation est des plus sombres. La politique d’extrême droite du gouvernement Netanyahou empêche toute solution du conflit. Les accords d’Oslo et de Camp David (2000) sont bel et bien morts et enterrés. Pourtant, Amos Gitai croit toujours en des lendemains meilleurs. Au cours de son voyage, il rencontre des mères israéliennes et palestiniennes membres de The Parents Circle, une association réunissant des familles ayant perdu des enfants à cause du conflit. Il fait découvrir B’Tselem, une organisation non gouvernementale qui aide les femmes palestiniennes à filmer les exactions dans les Territoires occupés, ou filme également une fête où israéliens et palestiniens partagent leur passion de la danse orientales et du backgammon. Le film abonde d’exemples d’hommes et de femmes qui agissent au nom de leur conscience civique. Mais il souffle également le froid. Difficile alors de partager ces moments optimistes, d’autant plus que la musique triste et lancinante d’Amit Poznansky qui accompagne le documentaire n’y aide pas. Les déclarations de Rabin révèlent son côté visionnaire, en prévoyant notamment l’émergence du terrorisme. Hormis le fait qu’ « (…) il n’a pas eu de successeur dans sa recherche sobre et réaliste d’une paix juste », souligne l’éditorialiste du quotidien Ha’Aretz, Ari Shavit, co-auteur de reportages réguliers dans les Territoires. C’est bien là le drame, malgré toutes les bonnes volontés sur le terrain d’avancer, d’aller plus loin, pour trouver des solutions. D’autant plus que, toujours devant la caméra, on entend ces propos, l’un et l’autre terrifiants pour des raisons opposées, ceux d’un enfant palestinien pour qui : « la vie est belle, mais mourir en martyr c’est mieux », et ceux de la ministre déléguée aux Affaires étrangères, Tzipi Hotovely, qui revendique le droit à occuper les terres palestiniennes « au nom de la religion (…) » ! Si À l’ouest du Jourdain, présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au dernier Festival de Cannes, entretient malgré tout une lueur d’espoir, celle-ci reste bien mince et risque de s’éteindre à tout moment.
- À L’OUEST DU JORDAN (West of the Jordan River – Field Diary revisited)
- Sortie salles : 11 octobre 2017
- Réalisation et Scénario : Amos Gitaï
- Production : Romain Picard, Amos Gitaï
- Photographie : Oded Kirma, Eitan Hai, Vladimir Truchovski
- Montage : Tal Zana, Vincent Schmitt, Yuval Orr
- Musique : Amit Poznansky
- Distribution : Sophie Dulac Distribution
- Durée : 1h24