Synopsis : Dans un village au cœur du Middle-West américain, Suzanna, 23 ans, change de sexe. Elle devient un garçon : Coby. Cette transformation bouleverse la vie de tous ceux qui l’aiment. Une métamorphose s’opère alors sous le regard lumineux et inattendu du réalisateur.
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Coby est le premier long-métrage documentaire éclairant de Christian Sonderegger sur le changement de sexe de sa demi-soeur Suzanna à l’âge de 23 ans. Il a été présenté à l’Acid au Festival de Cannes et au FIFF (Festival International du Film Français de Namur) l’année dernière. Ces deux distinctions attestent d’une reconnaissance de toute la profession ayant succombé à son charme tamisé. Le film est en effet très agréable à regarder. Il véhicule de surcroît un message de tolérance riche en nuances. Le spectateur en arrive à regretter sa durée courte (1h20), c’est pourtant toute sa force. Dédramatiser un sujet propice à attiser la polémique comme celui de la transsexualité grâce à un montage des plus talentueux. Des photos de Coby -prénom choisi par Suzanna dans sa chrysalide- en petite fille et ses vidéos postées sur YouTube dès l’adolescence s’invitent dans la narration, douces et drôles réminiscences. L’histoire de Coby, jeune transgenre de l’Ohio, de sexe féminin mais se sentant cérébralement masculin, émeut sans être larmoyante. C’est à partir de ses quinze ans qu’elle se sent de façon irrésistible comme un homme prisonnier dans un corps et un sexe qui ne sont pas les siens. Elle affirme voir quelqu’un d’autre dans le miroir. Ce n’est pas un coup de tête mais une décision à la maturité certaine que cette métamorphose. On passe des régulières injections de testostérone à une double mastectomie jusqu’à la préparation de l’ablation partielle de ses ovaires par mesure de prévention. Coby fait face -toujours rieur cependant et il rend à lui seule le sujet léger- à ces épreuves assumées jusqu’au bout. Il partage ce combat pour ne pas être un autre mais enfin lui-même avec sa compagne de toujours la brune et pulpeuse Sara.
Coby s’accomplit aussi dans sa profession d’ambulancier et son père en est vraiment fier. L’insertion professionnelle réussie d’un transgenre illustre que l’exclusion n’est pas ou plus systématique. Les mentalités changent et les regards en particulier. Coby n’a pas eu à affronter le regard des autres élèves, avec une éducation exclusivement à la maison, mais a dû apprivoiser le regard de son cercle familial le plus restreint : sa mère, sans doute la plus réticente au départ mais qui se délivre peu à peu de sa culpabilité ; son père, à l’esprit plus ouvert mais appelant Coby toujours Suzanna ou Suzy ; son frère (Coby en a deux) qui l’accepte comme un homme dans sa plénitude avec une immédiateté admirable. Il convient de ne pas oublier sa petite amie qui joue un rôle décisif dans sa mue aux multiples étapes. On pourrait croire à une idylle platonique au sein de ce couple. Coby n’a pas le bonheur de pouvoir jouir et faire jouir comme un homme car la greffe du pénis est encore une prouesse chirurgicale rare et complexe. Cependant, les deux amants, à la forte complicité, évoquent sans la moindre fausse pudeur, leur sexualité, réelle, fantasmée, rêvée. On assiste à ce témoignage intime livré par Christian Sonderegger et dont on devine la totale bienveillance lovée derrière sa caméra.
Eric Françonnet
- COBY
- Sortie salles : 28 mars 2018
- Réalisation : Christian Sonderegger
- Avec : Coby, Jacob Hunt, Sara Mound, Ellen Richards-Hunt, Willard Hunt, Andrew Hunt,…
- Scénario : Christian Sonderegger
- Production : Moïra Chappedelaine Vautier
- Photographie : Georgi Lazarewski
- Montage : Camille Toubkis
- Musique : Christian Sonderegger, Florent Lavallée, Olivier Laurent
- Distribution : Epicentre Fims
- Durée : 1h18