Résumé : Prix Nobel de la Paix 2018, le docteur Denis Mukwege est internationalement connu comme l’homme qui répare ces milliers de femmes, violées durant 20 ans de conflits à l’Est de la République Démocratique du Congo.
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Comme un bon présage, le documentaire consacré au docteur Denis Mukwege commence par sa remise du Right Livelihood Award et se termine par celle du prix Sakharov, en 2014. En 2018, le médecin congolais partage naturellement le Prix Nobel de la Paix, avec la Yézidie Nadia Murad. À cette occasion, le documentaire qui lui est consacré, L’homme qui répare les femmes, ressort en salles le 12 octobre à 20h dans plusieurs UGC Ciné Cité (voir fiche ci-dessous). Pour ceux qui l’ignoreraient encore, Denis Mukwege est un gynécologue-obstétricien de République démocratique du Congo. À l’hôpital Panzi, à Bukavu, dans l’Est du pays, il se consacre entièrement à la prise en charge et la reconstruction des organes génitaux détruits des femmes de la région. En effet, depuis le génocide rwandais en 1994, la région est le théâtre de plus de vingt ans de guerre, où le viol est systématiquement utilisé comme une arme de guerre contre les populations civiles. Le docteur Mukwege a été filmé par les documentaristes belges Thierry Michel (dont le précédent documentaire, L’Affaire Chebeya, lui a valu d’être expulsé du Congo) et Colette Braeckman (journaliste au Soir). Lui qui avait commencé comme pédiatre a choisi de consacrer sa vie à aider les femmes, à dénoncer les horreurs commises au Kivu ainsi que l’immobilité et la corruption du pouvoir. On voit le docteur en blouse dans son hôpital où, après quinze ans de pratique, il demeure choqué par les cas qu’il examine. Il marche dans la campagne, accompagné des Casques bleus qui le protègent depuis qu’on a tenté de l’assassiner. Lorsqu’il reçoit des prix en Belgique, au Parlement européen ou aux États-Unis, il n’a de cesse de dénoncer la situation du Congo-Kinshasa. Il organise également des groupes de parole dans son établissement ou à l’église. Et à plusieurs reprises, le docteur Mukwege souligne que le véritable héroïsme est celui des femmes qui viennent le trouver à son hôpital, meurtries à jamais dans leur chair et leur esprit. Les femmes qu’il a soignées l’appellent le « Messie » et « notre père » : lui se présente comme un homme qui ne fait que son devoir. On serait presque frustré devant tant de modestie ; on est toujours époustouflé par une telle abnégation.
Ce documentaire, certes classique, rend aussi hommage aux femmes congolaises. Qui ont eu leur vie et leur corps détruits par la folie des hommes. Qui ont été rejetées par leur famille après avoir subi l’innommable, parce qu’elles ne sont plus vierges. Qui sont victimes de l’inaction de l’État, de l’armée, des traditions, où les soldats comme les féticheurs sont autant de prédateurs. Qui se sont cotisées pour faire revenir le médecin d’exil. Autre protagoniste : le Congo lui-même, dont la tranquillité et la beauté des paysages tranchent totalement avec les exactions qui s’y sont déroulées, et qui continue à être détruit et exploité par les milices, les entreprises étrangères et l’intolérance. Le documentaire a été d’abord interdit au Congo-Kinshasa…
Les photos et les récits des exactions et des viols rendent souvent le documentaire insoutenable, mais cela demeure la réalité de cette région, une réalité trop peu connue, et que ce documentaire, au même titre que le Prix Nobel de la Paix, contribuent à faire connaître. Le film a moissonné les récompenses, comme le Magritte du Meilleur Documentaire 2016, l’équivalent belge des César. C’est le moins qu’un homme tel que le docteur Mukwege puisse mériter.
Arthur de Boutiny
- L’HOMME QUI REPARE LES FEMMES : LA COLERE D’HIPPOCRATE
- Ressortie salles : 12 octobre 2018 à 20h à l’UGC Ciné Cité Les Halles, UGC Ciné Cité Paris 19, UGC Gobelins, UGC Ciné Cité La Défense, UGC Ciné Cité Confluence (Lyon), UGC Ciné Cité Bordeaux
- Réalisation : Thierry Michel
- Avec : Denis Mukwege
- Scénario : Thierry Michel et Colette Braeckman d’après son Å“uvre originale
- Production : Les Films de la Passerelle, Ryva Production
- Photographie : Michel Téchy
- Montage : Idriss Gabel
- Musique : Edo Bumba, Michel Duprez
- Distribution : JHR Films
- Durée : 1h53
- Sortie initiale : 15 avril 2015 (Belgique) – 17 février 2016 (France)
- Site officiel du film