Télévision / Les Dents de la Mer de Steven Spielberg : critique

Publié par CineChronicle le 3 février 2019

Synopsis : À quelques jours du début de la saison estivale, les habitants de la petite station balnéaire d’Amity sont mis en émoi par la découverte sur le littoral du corps atrocement mutilé d’une jeune vacancière. Pour Martin Brody, le chef de la police, il ne fait aucun doute que la jeune fille a été victime d’un requin. Il décide alors d’interdire l’accès des plages mais se heurte à l’hostilité du maire uniquement intéressé par l’afflux des touristes. Pendant ce temps, le requin continue à semer la terreur le long des côtes et à dévorer les baigneurs…

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Les Dents de la Mer - Jaws - affiche

Les Dents de la Mer (Jaws) – affiche

“You’re gonna need a bigger boat…” Toute personne qui s’est baignée un jour dans une mer chaude n’a pu s’empêcher de fredonner dans sa tête la musique des Dents de la Mer. C’est mathématique. Seulement deux notes, et John Williams traumatisait des générations de nageurs pour l’éternité. Et Steven Spielberg commençait avec un énorme coup sa carrière légendaire. Analyser en profondeur ce film cultissime, qui n’a pris une ride en plus de quarante ans, vaudrait plusieurs thèses. Mais qui aurait mis un kopeck sur ce film ? Steven Spielberg bénéficie du succès d’estime de Duel mais a été fragilisé par le faible score de Sugarland Express ; Universal Pictures le charge d’adapter un succès de librairie, écrit par Peter Benchley, que Spielberg remanie en urgence avant que les scénaristes ne se mettent en grève. Il fait le choix d’un casting d’acteurs connus mais sur le retour : Roy Scheider, second rôle de La French Connection ; Robert Shaw, alcoolique notoire vu Bons Baisers de Russie et l’Arnaque ; Richard Dreyfuss, qui deviendra un acteur fétiche de Spielberg. Alors âgé d’à peine 28 ans, il doit doubler le budget, tripler la durée du tournage, fini par noyer ses caméras dans l’océan et doit se dépêtrer avec trois requins animatroniques très fragiles qui passent leur temps à mal fonctionner. Steven Spielberg, qui sent venir un four, est menacé par les producteurs, mais il profite des délais pour retourner des scènes et transformer “un film de série B en thriller à la Hitchcock”. En dysfonctionnant, le requin devient rare à l’écran et permet de fonder un nouveau procédé scénaristique : moins on voit la menace, mieux c’est. Lorsque le film sort en salles, Spielberg est persuadé que sa carrière est terminée.

 

Les Dents de la Mer

Les Dents de la Mer

 

Et pourtant… L’influence de l’oeuvre est impossible à mesurer humainement. Sans ce film, pas de Guerre des Étoiles, pas d’Alien (conçu pour être “Les Dents de la Mer dans l’Espace”)… Il est aussi le big bang sans qui le blockbuster estival ne serait jamais été ; jusqu’ici, l’hiver était la saison des grands films, la période des grandes vacances étant réservée aux productions de moindre qualité. Le film bénéficie d’une sortie sur l’ensemble du territoire américain et d’une énorme campagne de publicité, initiatives rares à l’époque, le bouche-à-oreille faisant le reste. La Guerre des Étoiles, deux ans plus tard, achèvera de cimenter le nouvel usage. Mais surtout, l’oeuvre de Spielberg fut “le cheval de Troie par lequel les studios reprirent le pouvoir”, explique Peter Biskind dans son essai Le Nouvel Hollywood. À l’époque, le cinéma d’auteur domine le paysage culturel. En leur opposant un film qui fut capable de battre le record de recettes du Parrain en seulement 78 jours, et le premier à franchir la barre des 100 millions de dollars, les studios reprirent définitivement la main sur les réalisateurs et inaugurèrent l’ère du blockbuster.

 

Les Dents de la Mer

Les Dents de la Mer

 

Profitons d’ailleurs pour rétablir une vérité pour ceux qui en douteraient encore. Si les grands requins blancs sont effectivement responsables d’attaques contre les humains, la grande majorité de leurs assauts ne sont pas mortels et procèdent d’une erreur d’analyse visuelle. Ils préfèrent allègrement la chair des otaries. Quant à imaginer un requin couler un bateau, c’est amplement exagéré. Peter Benchley, l’auteur du roman, regretta amèrement d’avoir popularisé une telle image des requins et il consacra le reste de sa vie à militer pour la préservation des océans.

 

Hollywood étant Hollywood, les studios mirent aussitôt sur les rails les suites, au grand dam de Spielberg jamais impliqué, qui se distinguent par une dégradation régulière en qualité. Les Dents de la Mer, 2ème partie (1978) vit le retour de Roy Scheider et tient un temps le record du meilleur score au box-office pour une suite. Les Dents de la Mer 3 (1983), qui n’a aucun des acteurs de l’original, fit encore un beau score et devait être regardé avec des lunettes 3D, technologie déjà désuète à l’époque. Quant aux Dents de la Mer 4: la Revanche, il figure parmi les sommets du nanar et fit dire à l’un de ses acteurs, Michael Caine : “Je n’ai pas vu le film, mais j’ai vu la maison qu’il a permis de construire !”.

 

Arthur de Boutiny

 

 

 

  • LES DENTS DE LA MER (Jaws)
  • Diffusion : 3 février 2019 à 20h40
  • Chaîne / Plateforme : OCS Géants
  • Réalisation : Steven Spielberg
    Avec : Roy Scheider, Robert Shaw, Richard Dreyfuss, Lorraine Gary, Murray Hamilton, Carl Gottlieb, Jeffrey Kramer, Susan Backlinie…
    Scénario : Peter Benchley et Carl Gottlieb, d’après Les Dents de la Mer de Peter Benchley
    Production : Richard D. Zanuck, David Brown
    Photographie : Bill Butler
    Montage : Verna Fields
    Décors : Joe Alves
    Costumes : Louise Clark, Robert Ellsworth, Irwin Rose
    Musique : John Williams
    Durée : 2h04
    Sortie initiale : 20 juin 1975 (États-Unis) – 1er janvier 1976 (France)

 

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