Résumé : Si le cinéma a une influence si déterminante sur nos modes de vie, c’est sans doute parce qu’il a toujours su fournir des réponses précieuses à qui se demande comment les gens vivent. Explorant des univers filmiques très différents – des films de fiction aux films documentaires, du cinéma d’auteur aux comédies contemporaines hollywoodiennes, des films de symphonies urbaines aux documentaires intimistes, des Å“uvres de Yasujir? Ozu à celles de Chantal Akerman, d’Alain Resnais à Jim Jarmusch, de Maurice Pialat à Wang Bing…–, ce livre se propose d’ouvrir un questionnement non seulement sur ce que le cinéma peut nous dire du quotidien, mais aussi sur la façon dont il l’appréhende, le donne à voir et parfois le réinvente. Comment filmer ce qui, d’ordinaire, n’est plus perçu? Comment faire de la vie de tous les jours, de ce qui ne fait pas événement et ne mérite pas d’être montré, l’enjeu d’un regard singulier, d’un mode de narration et représentation propre, tout simplement d’une attention cinématographique particulière?
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Si le spectaculaire a longtemps été considéré comme l’apanage du cinéma (tant du point de vue du contenu de ses images que des qualités de son dispositif), le quotidien, espace-temps façonné par les habitudes et la répétition, demeure une problématique qui lui est consubstantiellement rattachée. Repérer l’insolite au sein du comportement ordinaire, tel est l’objectif entrepris par cet ouvrage collectif placé sous la direction de Sarah Leperchey et José Moure, tous deux enseignants-chercheurs en cinéma à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. À partir d’un corpus d’exemples éclectique associant différentes époques, cinématographies (France, Italie, Chine, Japon, Maroc…), formats (fiction, documentaire), et disciplines (photographie, peinture, littérature), les auteurs s’emploient à découvrir les faces cachées du quotidien à travers de nombreuses analyses de séquences et de plans. Le formidable apport théorique de ces contributions se développe donc selon une mise en application très concrète permettant à la fois d’interroger les caractéristiques du médium cinéma et notre propre rapport au quotidien. En se focalisant sur une époque (les années 1930 ou 1960) ou un événement (le cortège funéraire de Robert Kennedy) en particulier, ces différents textes ont en commun une volonté de redéfinir l’espace cinématographique à la lumière d’une durée au semblant familière mais pourtant indocile. En résulte l’apparition d’une sorte d’inquiétante étrangeté qui habite le cadre des films convoqués. Ces analyses s’approfondissent naturellement par un retour poussé sur les tenants et aboutissants de mises en scène singulières portées par le tempérament d’auteurs consacrés (Alain Resnais, Yasujiro Ozu, Marguerite Duras, Maurice Pialat, Jim Jarmusch, René Allio, Federico Fellini, Hakim Belabbès, Wang Bing). La présence de captures d’écran renforce la valeur pratique de ces démonstrations qui font vaciller les certitudes de représentations tour à tour marquées par la réflexivité d’un geste ou d’un angle de prise de vue et la volonté de distinguer les écarts d’une normalité considérée comme essentielle. C’est donc le regard de biais qui prime ici, manière de (re)considérer de façon nouvelle un environnement filmique mais aussi social, civilisationnel et par-dessus tout subjectif.
- FILMER LE QUOTIDIEN
- Auteurs : Sarah Leperchey et José Moure (sous la direction de)
- Éditions : Les Impressions Nouvelles
- Collection : Caméras subjectives
- Date de parution : 7 novembre 2019
- Format : 256 pages
- Tarif : 20 € (print) – 9,99 € (numérique)