Résumé : « Bela Lugosi s’éteignit le 16 juin 1956 en prononçant cette phrase: « Je suis le comte Dracula, je suis le roi des vampires, je suis immortel ». Et cette transformation en vampire est désormais un fait établi que peu de gens se sentent de contredire. J’ai écrit ces pages dans le but – dont j’espère qu’il n’est pas totalement superflu – de chercher à comprendre les causes et d’élucider les circonstances dans lesquelles l’effroyable métamorphose de Lugosi s’est produite.»
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« Pull the strings…Pull the strings !« . Les doigts tordus à l’extrême, ses mains mimant les gestes d’un marionnettiste, Martin Landau est plongé dans ses pensées tandis que Johnny Depp l’observe, fasciné. On ne le dit pas assez souvent, mais Ed Wood (1994) de Tim Burton est autant un hommage au célèbre réalisateur raté qu’à l’interprète vedette de ses productions : Bela Lugosi. Pour les cinéphiles, Lugosi c’est d’abord un regard scintillant, des lèvres fines, et des cheveux ébènes aux relents de gomina. Lugosi, c’est un gros plan, inquiétant, qui se confond pour toujours avec le visage du Prince de la Nuit tel qu’immortalisé par le film fondateur de Tod Browning. Et pourtant, si Lugosi porta toujours en lui cet héritage macabre, celui-ci obéit d’abord aux lois de modulations propres à une lente et prégnante métamorphose. Edgardo Franzosini, écrivain, biographe et traducteur italien, nous raconte cette transformation qui vit un comédien hongrois prénommé Béla Blasko prendre la mer pour s’installer sous le soleil de Californie. Le récit de Franzosini a le double mérite d’être dense et concis. Tout en s’amusant à multiplier les anecdotes, l’auteur propose une analyse particulièrement précise du jeu de Lugosi au théâtre et au cinéma, mais aussi de la nature vampirique. Des légendes moyenâgeuses aux expérimentations de la camera obscura, le vampire participe à l’édification du médium cinématographique. Sa tragique immortalité se confond avec le sort d’images ressuscitées par le souffle vibrant du mouvement. Lugosi, nous rappelle Franzosini, fut littéralement habité par son double, au point, parfois, d’être dépassé par lui. Dracula projette sur l’existence de l’acteur une ombre méphistophélique qui lui fit connaître la gloire, les amours, puis le long déclin vers son ultime métamorphose. Passionnant, cet ouvrage se lit d’un trait. L’érudition de l’auteur ne laisse rien au hasard, parcourt l’ensemble d’une œuvre décryptée à travers une écriture élégante et littéraire (et que restitue parfaitement l’excellente traduction de Thierry Gillybœuf). Un bien bel hommage donc que Franzosini prolonge encore en annexes. Ainsi de cette complète filmographie qui permet de prendre la mesure d’une carrière qu’on a trop souvent limitée à une ou deux productions passées à la postérité. On regrettera simplement l’absence de bibliographie qui aurait permis de rendre justice à la faconde de l’auteur.
- BELA LUGOSI. BIOGRAPHIE D’UNE MÉTAMORPHOSE
- Auteur : Edgardo Franzosini
- Traduction : Thierry Gillybœuf
- Éditions : La Baconnière
- Date de parution : 10 janvier 2020
- Langues disponibles : Français et italien (sous le titre Biographia di una metamorfosi aux éditions Adelphi)
- Format : 128 pages
- Tarif : 14 €