Figure tutélaire du roman d’espionnage, John le Carré s’en est allé le 12 décembre 2020. Le romancier britannique laisse derrière lui une œuvre dont la richesse inspira certaines excellentes production du Septième art.
C’est sous couverture que David John Moore Cornwell a donné ses lettres de noblesse au roman d’espionnage. Derrière le pseudonyme de John le Carré (1931-2020), cet agent du Service Intelligence Service (service de renseignements extérieurs britannique) débute sa carrière de romancier tout en continuant de servir les intérêts de sa Majesté.
Entre meurtres mystérieux et enquêtes souterraines, son œuvre propose le portrait nuancé d’agents dont l’intelligence va de pair avec un sens aiguë de la discrétion. Dès L’Appel du mort, son premier roman paru en 1961 (et traduit en français en 1963), John le Carré pose les bases de sa mythologie avec le personnage de George Smiley, un officier de renseignements doté d’une incroyable mémoire et dont le physique se rapproche de celui d’un crapaud bigleux.
C’est dire si l’univers du romancier s’éloigne du glamour qui fera le succès de la célèbre saga de 007 écrite par Ian Fleming (qui fut lui aussi un ancien agent de terrain). Cet écart n’a pourtant pas empêché le cinéma de faire les yeux doux à la littérature de Le Carré.
En 1965, Rupert Davies prête ses traits à l’énigmatique Smiley dans l’adaptation de L’Espion qui venait du froid de Martin Ritt. C’est pourtant Richard Burton qui tient la vedette s’associant à l’efficacité de la mise en scène de Ritt pour assurer la réussite d’un film loué pour son réalisme. Cet aspect-ci se trouvait déjà dans le roman d’origine, qui se présente comme le premier grand succès de le Carré avec l’obtention du Prix Egar-Allan-Poe du meilleur roman et qui occupe aujourd’hui encore une place confortable dans les classements des meilleurs romans policiers de tous les temps.
Dès lors, les adaptations s’enchaînent au cinéma comme à la télévision. On retiendra de ce vaste projet de transpositions certaines franches réussites comme MI5 demande protection de Sidney Lumet en 1965, ou encore récemment La Taupe de Tomas Alfredson en 2011 avec un impeccable Gary Oldman dans le rôle de Smiley.
On aurait cependant tort de limiter le talent de Le Carré à sa seule inspiration de romancier. Son essai, Une paix insoutenable (1991), et ses mémoires parues et traduites en 2016 sous le titre Le Tunnel aux pigeons : Histoires de ma vie, prouvaient la finesse de son sens de l’observation mais aussi son humour so british qui nous manquera beaucoup.