Résumé : C’était avant Bardot et les starlettes, avant que Spielberg, Coppola ou Jarmusch ne débarquent sur la Croisette, avant les batailles pour la Palme et les très riches heures du Festival de Cannes. C’était à la fin du XIXème siècle, dans une ferme en Lorraine. Un certain Auguste Jacob, mon grand-père, décidait de monter à Paris. Ainsi commençait l’histoire des miens – mon histoire. Avec ses heures de gloire -mon père André, héros de la Première guerre ; le cousin François, Compagnon de la Libération et prix Nobel- et ses heures sombres -l’Occupation, l’exode, un dramatique secret. En racontant l’ascension d’un modeste paysan qui aura fondé, contre vents et marées, guerres et déportation, une dynastie, j’ai voulu raconter un peu plus qu’une affaire de famille. Une histoire française prise dans la tourmente du siècle et les tourments intimes.
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Le nom de Gilles Jacob se rapporte d’abord au Festival de Cannes dont il fut le délégué général à partir de 1978 puis le président de 2001 à 2014. Dans cet ouvrage autobiographique, le célèbre homme de cinéma a décidé de revenir sur le parcours de sa famille. De la guerre des tranchées aux succès divers dans les domaines de l’industrie, des sciences, de la littérature et donc du cinéma, Jacob rappelle aussi le long trauma de la Seconde Guerre mondiale qui s’imprima durablement sur sa perception du monde et de sa propre identité. Celui qui sera appelé à exister sous les projecteurs fut d’abord un enfant de l’ombre, devant cacher ses origines pour pouvoir survivre. De là vient sans doute son désir d’écrire ce qui fut trop longtemps maintenu dans le hors-champ d’une mémoire que chacune de ces pages parvient à recouvrir. Car Jacob se révèle ici un merveilleux conteur. Sa prose exprime un désir de comprendre qui se couple à une volonté de décrire à travers un regard à la fois poétique et lucide les grands événement et figures qui rythmèrent sa vie. Père inspirant le respect et qui laissera progressivement transparaître les traits de son humanité, mère aimante et auréolée des mystères de la féminité, simples flirts et amours véritables, Jacob parvient à décliner son point de vue pour prêter consistance à cette fresque familiale qui renvoie toute entière à un pan de l’Histoire de la France. Le Septième art n’est pas en reste. De ses premiers articles à la prise de ses fonctions au sein du plus grand festival de cinéma, Jacob perçoit les images en mouvement comme une activité qui constitua pendant un temps un à -côté essentiel. Son intégration forcée à l’industrie paternelle l’oblige à revoir ses ambitions de critique.
Mais l’amour cinéphile est chose tenace. Jacob finit par vivre son rêve les yeux grands ouverts, se remémorant ses rencontres avec les prestigieux réalisateurs dont il loue avec une ardeur toute défendable la beauté des œuvres. On reconnaît chez lui le double-visage de l’esthète et de l’humaniste. Aussi sensible à la belle forme de Citizen Kane qu’aux profondeurs qui agitent le cœur des hommes, Jacob décrit certaines contradictions essentielles qui font le prix des meilleurs personnages comme des plus humbles des individus.
Ce que rappelle enfin ce bel ouvrage est un goût affirmé pour la transmission et le partage. Le style de Gilles Jacob porte en lui quelque chose d’une pédagogie. Nul moralisme ici, mais une authentique leçon de sensibilité.
- L’ÉCHELLE DES JACOB
- Auteur : Gilles Jacob
- Éditions : Grasset & Fasquelle
- Date de parution : 28 octobre 2020
- Langues : Français uniquement
- Format : 252 pages
- Tarifs : 19 € (print) – 13,99 € (numérique)