Résumé : D’un internat religieux très strict en Autriche aux feux des projecteurs, de l’adoration délirante du public à l’indifférence ou l’acharnement, des films kitchs à l’eau de rose au grand cinéma d’auteur des années 70 (Luchino Visconti, Claude Sautet, Andrzej Żuławski…), la vie et la carrière de Romy Schneider sont une succession de grands écarts. Éternelle insatisfaite, elle remet son titre en jeu dans chacun de ses rôles (prostituée, sœur incestueuse, actrice ratée ou femme brisée) et s’y jette à corps perdu, quitte à y laisser un peu d’elle-même.
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Alors que la Cinémathèque a choisi d’honorer Romy Schneider par une rétrospective et une exposition (dirigée par Clémentine Deroudille), les éditions Capricci ont eu la bonne idée d’intégrer l’actrice à leur collection « Capricci Stories ». Faustine Saint-Geniès, collaboratrice à la revue Sofilm, se propose ainsi de retracer en une petite centaine de pages la carrière de la « fiancée de l’Europe ». Car c’est bien au vieux continent que sa figure reste attachée. Si à la fin des années 1950, Schneider fut attirée par les sirènes hollywoodiennes, son expérience américaine fut un raté reconduit au début de la décennie suivante et que l’auteure choisit de décrypter pour introduire son récit. À cette époque, Romy l’Autrichienne est d’abord connue pour son interprétation de l’impératrice Élisabeth dans la trilogie que lui consacra Ernst Marischka de 1955 à 1957. La fille des acteurs Wolf Albach-Retty et Magda Schneider a pourtant connu une enfance assez éloignée des contes de fées. Le déchirement historique de la Seconde Guerre mondiale marque ses premières années en même temps que la rupture de ses parents. Une incertitude fondamentale marque ainsi son existence à laquelle fera écho ses propres relations amoureuses (son couple avec Alain Delon se consumant sous le feu des projecteurs comme ses liaisons avec Jean-Louis Trintignant et Jacques Dutronc) et la caractérisation de ses plus fameux personnages. Du Procès (1962) d’Orson Welles à ses collaborations avec Claude Sautet, en passant par La Piscine (Jacques Deray, 1969) et L’Important c’est d’aimer (Andrzej Zulawski, 1974), Schneider compose un personnage suspendu dans son élan par les soubresauts d’un monde intérieur fracturé.
Ce portrait fictionnel fait écho à sa propre personnalité publique à la fois animée par ses engagements (le droit à l’avortement) et ses drames personnels (la mort brutale de son fils). Saint-Geniès montre alors en quoi le parcours de Schneider annonce les récentes mouvances féministes tout en assurant la liaison avec les grandes héroïnes du passé (les connexions établies avec Marlene Dietrich sont particulièrement intéressantes). Si l’on regrette que l’auteure n’ait pas fait plus de cas du jeu de Schneider (pourtant marqué par une subtile évolution qui la vit passer de l’exubérance à l’intériorité) ce court ouvrage marque par la clarté et la qualité de son écriture.
De fait, Faustine Saint-Geniès s’adresse autant aux inconditionnels de l’actrice qui prendront plaisir à voir leur idole si bien décrite qu’aux plus jeunes cinéphiles qui souhaiteraient s’introduire au mythe Schneider.
- ROMY SCHNEIDER. LES ACTRICES SE BRISENT SI FACILEMENT
- Auteure : Faustine Saint-Geniès
- Édition : Capricci
- Collection : Capricci Stories
- Date de parution : 7 avril 2022
- Langues : Français uniquement
- Format : 104 pages
- Tarifs : 11,50 € (print) – 6,99 € (numérique)