Detachment : critique

Publié par Nathalie Dassa le 1 février 2012

Henry Barthes est un professeur remplaçant. Il est assigné pendant trois semaines dans un lycée difficile de la banlieue new-yorkaise. Lui qui s’efforce de toujours prendre ses distances va voir sa vie bouleversée par son passage dans cet établissement…

 

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Après avoir traité avec excellence l’extrême droite américaine dans son premier long-métrage  American History X en 1998, puis l’avortement dans le documentaire Lake of Fire en 2006 qui n’est pas sorti dans les salles françaises, Tony Kaye – aussi réalisateur de clips et pubs, chanteur, compositeur et peintre – repasse aujourd’hui derrière la caméra avec Detachment, situé aux frontières du docu-fiction. Récompensé par le prix de la critique à Deauville, le film plonge dans les affres du système cancéreux éducatif américain dans un établissement difficile d’une banlieue new yorkaise et confronte le corps enseignant, les parents absents, les élèves et au-delà l’humanité tout entière. Si cette thématique vieille comme le monde a été maintes fois abordée au cinéma, Tony Kaye s’élance dans une critique acerbe et exploite son sujet avec style, originalité, profondeur et émotion, cependant souvent de manière inégale, versant parfois vers un côté larmoyant inutile. Le film s’ouvre sur plusieurs interviews de professeurs filmées face caméra, qui racontent leurs expériences, illustrées par des dessins conçus par Tony Kaye lui-même, avant de s’intéresser au personnage central, incarné par Adrien Brody. Dans sa facture, Detachment se rapproche de l’atmosphère de Half Nelson avec un air d’Entre les Murs sur un scénario de Carl Lund, qui concentre de nombreux problèmes humains déjà soulevés dans plusieurs films du genre, sans toujours prendre le temps de les développer. Mais sans concession – à un degré moindre par rapport à American History X -, Tony Kaye parvient au centre des conflits à pousser à bout Adrien Brody, qui offre une belle performance depuis sa prestation dans Le Pianiste, pour lequel il fut le plus jeune acteur à obtenir un Oscar à l’âge de 29 ans.

 

Il campe ici Henry Barthes, un professeur suppléant, célibataire et solitaire, qui accepte un emploi de trois semaines dans un lycée où il témoigne d’un système éducatif en ruine. Par sa position de ‘remplaçant’, cet homme s’exempte de toutes responsabilités et de tout investissement tant auprès de ses collègues que de ses élèves, prenant ainsi le parti du détachement pour s’empêcher de basculer. Avec une principale (Marcia Gay Harden) sur le point de se faire virer au motif de résultats médiocres, les enseignants incarnés par James Caan (rendu blasé et cynique par son expérience), Christina Hendricks (flegmatique et silencieuse qui entame une relation avec Brody), Tim Blake Nelson (inexistant et invisible, même auprès de sa famille) et la conseillère d’orientation jouée par Lucy Liu (désarmée en dépit de sa patience) sont totalement démotivés et se perdent face à des élèves qui n’ont plus aucun intérêt pour leurs études et sont désespérés par leur avenir. Parallèlement à cette situation accablante, la vie personnelle de Barthes est sombre. A la fois hanté par des souvenirs liés à son enfance sur le suicide de sa mère alcoolique, qui lui reviennent en flashbacks et accroché à son grand-père atteint de démence et qui attend la mort, ce personnage reste impénétrable sur sa vie pour tenter de maintenir le cap. Mais les souffrances des uns et des autres et sa rencontre avec une jeune prostituée (Sami Gayle) qu’il prend à sa charge, finissent malgré lui par envahir son existence et provoquer la rupture. Parmi les étudiants, seule Meredith (Betty Kaye, fille du réalisateur) se détache du lot. Cette jeune fille émotionnellement fragile, dénigrée par son père fait preuve d’un véritable talent pour la photographie. Si Detachment est un témoignage accablant de ce sentiment d’insatisfaction générale et de désespérance ressenti par tous les protagonistes happés dans l’engrenage d’une société gangrénée de toute part qui met l’humanité face à ses incohérences, Tony Kaye reste en deçà de ses possibilités qui l’avaient révélé dans sa première oeuvre.

 

 

 

DETACHMENT de Tony Kaye en salles le 1er février avec Adrien Brody, James Caan, Christina Hendricks, Marcia Gay Harden, Tim Blake Nelson, Lucy Liu, Blythe Danner, Bryan Cranston, Sami Gayle et Betty Kaye. Scénario : Carl Lund. Production : Austin Stark, Benji Kohn, Bingo Gubelman, Greg Shapiro, Carl Lund, Chris Papavasiliou. Photographie : Beth Melsky. Décors : Jade Healy. Montage : Peter Goddard. Compositeur : The Newton Brothers. Distribution : Pretty Pictures. Durée : 1h37.

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