Le Grand Soir : critique

Publié par Nathalie Dassa le 25 mai 2012

Les Bonzini tiennent le restaurant ‘la Pataterie’ dans une zone commerciale. Leur fils ainé, Not, est le plus vieux punk à chien d’Europe. Son frère, Jean Pierre, est vendeur dans un magasin de literie. Quand Jean Pierre est licencié, les 2 frères se retrouvent. Le Grand Soir, c’est l’histoire d’une famille qui décide de faire la révolution… à sa manière.

 

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Après les retraités de Mammuth avec un Gérard Depardieu qu’on n’avait pas vu aussi bouleversant depuis bien longtemps, Gustave Kervern et Benoît Delépine s’intéressent aux inadaptés dans leur cinquième long-métrage. Si Le Grand Soir a été présenté dans la section Un Certain Regard à Cannes ce mardi 22 mai, nous avons pu le découvrir le lendemain lors d’une projection presse au Balzac. Punk is not Dead ! Le duo Grolandais le prouve en nous livrant une œuvre post punk tragiquement drôle à l’image d’une époque cynique, radicale et désespérante qui ne manquera probablement pas de diviser les avis des spectateurs. Pourtant, le propos des réalisateurs reflète bien la plaie béante de cette société tant désocialisée qu’antisociale, porté par un casting sur-mesure, avec un Poelvoorde au sommet de son art dans le rôle du plus vieux punk à chien d’Europe, qui assume pleinement sa condition de SDF en treillis, docs montantes et crête iroquoise, et d’un Dupontel avec son regard de doux-dingue en vendeur de matelas borderline, divorcé et père d’une petite fille, qui tente de se conformer à une norme fantasmée. C’est toujours avec cette même loufoquerie visuelle, typique de leur filmographie, que l’on retrouve tout le réalisme, dans la trajectoire de vie d’une certaine couche populaire de la France d’en bas, transcendé par une succession de séquences surréalistes. Entre gravité, dérision et instants fraternels, Le Grand Soir sonne l’heure de la révolution sur fond de crise, rythmé par la bande son rock alternatif des Wampas et de Brigitte Fontaine, qui incarne ici, de manière magistralement barrée, la mère de ces deux énergumènes. Et c’est sans compter sur la participation de Bouli Lanners en vigile de la sécurité et l’apparition de Gerard Depardieu et celle furtive de Yolande Moreau.

 

Si l’on reproche un manque de justesse dans le jeu de quelques acteurs et un certain laxisme dans la narration de ce road-movie circulaire – ou plus clairement qui tourne en rond – au travers de la relation des ces deux frères en quête d’une certaine liberté sur les chemins nihilistes de la philosophie punk, Kervern et Delépine offrent en contrepartie des dialogues bien déjantés et des instants mémorables et particulièrement cocasses. On pense notamment à cet excellent plan-séquence dans la Pataterie où les deux fils s’adressent en même temps à leur père, qui reste silencieux tout en bidouillant son téléphone portable. On reste fasciné par leur performance car ni Dupontel ni Poelvoorde ne perde le fil de leur monologue sans intérêt. Ou encore le pétage de plomb de Dupontel, après avoir été viré par son patron du magasin de literie (Serge Larivière) qui le filme avec son mobile, se prenant pour un ersatz de cowboy qui dégaine à tout-va. Le Grand Soir, c’est à peu près le rendez-vous ultime des inadaptés, des abonnés absents, des oubliés, des rejetés, des suicidaires et des laissés-pour-compte centrés sur ces deux personnages qui veulent réfréner ce désespoir social, entremêlé dans ses propres filets. Ainsi Kervern et Delépine parviennent à dresser une peinture certes parfois décousue mais lucide et intéressante qui tend vers la poésie humoristico-trash plongée dans une zone commerciale, lieu impersonnel envahi par les enseignes de la malbouffe et de marques cheap où la carte bleue s’agite sans cesse et ne semble pas connaître la crise…

 

 

 

 

LE GRAND SOIR écrit et réalisé par Benoît Delépine et Gustave Kervern en salles le 6 juin 2012 avec Benoit Poelvoorde, Albert Dupontel, Brigitte Fontaine, Areski Belkacem, Serge Larivière et la participation de Bouli Lanners. Production : Jean-Pierre Guerrin. Directeur de la Photo : Hugues Poulain. Décors : Paul Chapelle. Costume : Florence Laforge. Montage : Stéphane Elmadjian. Coiffeur : Mathieu Gueracague. Maquilleur : Olivier Afonso. Distribution : Ad Vitam. Durée :  1h32.

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