Synopsis : Dans le village de Konoha, deux années après la 4ème grande guerre des ninjas, Naruto s’apprête à célébrer la fête de l’hiver entouré d’Hinata et de ses amis. Soudain, une météorite déchire la nuit de son intense lumière et voilà que la lune se rapproche anormalement de la Terre. Le Conseil des Kage se réunit en urgence face à cette menace de destruction de la planète ! Pour Naruto, Sakura, Shikamaru, Saï et Hinata le compte à rebours pour sauver la planète a commencé.
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Véritable phénomène depuis quinze ans, Naruto aura fait couler beaucoup d’encre. À commencer par celle de la plume de son créateur Masashi Kishimoto au travers de 72 tomes. En parallèle, fort de son succès, le jeune ninja de Konoha a vu ses aventures portées à la télévision grâce à deux séries animées, Naruto puis Naruto Shippuden, désormais forte de plus de 600 épisodes. Au fil de la série, les studios ont sorti en salles pas moins de dix films d’animation, dont Naruto the Last est le dernier en date. Les aventures des ninjas du village caché de Konoha ont été une manne financière sans précédent pour le secteur de l’édition avec plus de 130 millions d’exemplaires de mangas vendus à travers le monde en 1999. Le mois de novembre dernier voyait cette longue success-story se clore autour de la sortie de l’ultime chapitre du manga au Japon. Avec une histoire totalement inédite, Naruto the Last fait découvrir le chaînon manquant entre les chapitres 699 et 700, ponctuant la fin de Naruto Shippuden. La série n’ayant pas laissé une place très importante à l’histoire d’amour entre Naruto et Hinata, ce nouveau long métrage s’est attelé à développer cette passion au sein de son intrigue. À la base d’un schéma narratif assez classique, Naruto the Last transpose la quête pour sauver la princesse des griffes de son destin, dans l’univers japonais féodal teinté de technologies actuelles, théâtre d’action habituel de Naruto.
Le récit s’ouvre sur un prologue remémorant la mythologie au sein de la diégèse sur l’avènement de l’ère des ninjas. Il se joue de façon surprenante sur fond d’une reprise du thème musical classique Greensleeves. Le rapprochement devient dès lors plus clair entre cette histoire fantasmant le japon féodal et cette célèbre chanson anglaise du XVIe siècle, dont le folklore a attribué l’écriture à Henri VIII pour son amour à Anne Boleyn, ici résolument celtique. Son schéma narratif fait aussi certainement écho aux chansons de geste, au héros bravant des dangers dantesques pour sauver sa bien-aimée du péril.
Malheureusement, Naruto the Last s’essouffle bien vite après cette introduction épique, pleine de promesses et visuellement grandiose avec ces images de synthèse stylisées à l’encre de chine. Le choix de porter au centre l’histoire d’amour finit par subir un traitement en deçà des attentes d’un aficionado de longue date. Le romantisme trouve ici une dimension cosmique, transportant notre troupe jusque sur la Lune. Mais si c’est émouvant, il se révèle parfois trop mièvre. Cette romance revient notamment trop souvent autour du cadeau qu’Hinata tente de faire à Naruto sans succès, sa timidité l’empêchant d’aller jusqu’au bout et d’avouer enfin ses sentiments. La mise en scène exagère aussi appuyant sur la tension somme toute ‘gentillette’ entre cette jeune fille, si timide et pourtant forte, et son amoureux naïf mais attentionné et protecteur, qui restent pourtant ceux connus de la série.
Autre point dommageable, le montage quelque peu tortueux. Il est notamment dû à des difficultés d’ordre scénaristique telles que la possibilité d’un voyage sur la Lune dans un monde féodal, ou encore l’absence de logique dans l’articulation des divers moyens entrepris par Toneri, nouvel opposant à Naruto, pour arriver à ses fins. Ces difficultés déroutantes, combinées aux longueurs soulignant les échecs d’Hinata dans l’aveu de ses sentiments à Naruto dénué de lucidité, laissent des moments creux au milieu du récit. Enfin, le nouvel ennemi du célèbre ninja, Toneri Ôtsutsuki, ne se révèle pas non plus à la hauteur des précédents grands opposants de la saga. Cet adversaire sans charisme, aux motivations farfelues, n’a ni la prestance ni l’aura voire la folie machiavélique de ses prédécesseurs. Borné sans être réellement méchant, Toneri s’efforce d’accomplir sa destinée, sans vraiment nous inquiéter. Les personnages eux-mêmes n’ont pas réellement l’air effrayé. Et si la fin du monde est en marche, l’enlèvement d’Hanabi semble plus important aux yeux du conseil des Kage que la chute de la Lune, pourtant révélée comme inévitable dès l’ouverture.
Il devient alors inéluctable que le spectateur ne soit pas transporté par le récit. On peut également regretter la quasi-totale absence de Sasuke, rival et personnage capital, qui n’apparait qu’une trentaine de secondes à l’écran. Les autres personnages restent finalement peu nombreux, s’exposant pour quelques caméos. Si connaître l’univers de Naruto est important, avoir vu ou lu toute la série n’est cependant pas obligatoire, quoi que l’attachement au pays du feu reste un facteur clé, tant pour déplacer l’audience que pour créer cet épilogue cinématographique. En effet, s’adressant au public de la série et du manga, il semble uniquement voué à ravir les fans qui ont du mal à faire le deuil de leur série. Les studios eux-mêmes peinent à se défaire du ninja à la chevelure dorée, tant cet opus s’étend en longueur.
Néanmoins, visuellement Naruto the Last se révèle efficace. Les scènes d’action et de combats sont réussies et donnent un peu de souffle à cette histoire très lente. Les images sont superbes et les dessins bien plus soignés que ceux de la série. On retient également les décors magnifiques, à l’exemple du passage onirique entre la Terre et la Lune. Quant au château lunaire de Toneri, il pourrait sortir tout droit d’une œuvre de Miyazaki. De leurs côtés, les effets visuels de neige et de pétales de fleurs, tombant au gré du vent, viennent ajouter de la profondeur au graphisme et à l’émotion. La lumière s’applique aux séquences de manière envoutante, créant instantanément des atmosphères riches, variées et détaillées. La musique, en dehors de son prologue, se couvre donc de son score japonais classique issu de la série, à une exception près, lorsque les amoureux se retrouvent seuls près de l’eau. Le mélange celtique et japonais mélodieux s’harmonise ainsi agréablement pour devenir l’allégorie de la romance du jeune couple.
À l’arrivée et malgré son titre, Naruto the Last n’est pas réellement le dernier film de la franchise. Il marque toutefois la fin de l’ère « Shippuden » de Naruto, et un nouveau cap pour la série et son fandom. Ainsi, ce cadeau d’adieu, qui joue sur la nostalgie des fans, se révèle décevant même s’il nous transporte à nouveau dans l’univers de Konoha, tout en passant un dernier moment avec le ninja qui voulait devenir Hokage…
- NARUTO THE LAST réalisé par Tsuneo Kobayashi en salles le 13 mai 2015.
- Avec les voix : Junko Takeuchi, Nana Mizuki, Jun Fukuyama, Nakamura Chie.
- Scénario : Masashi Kishimoto, Kyozuka Maruo d’après les personnages créés par Masashi Kishimoto
- Production : Aniplex, Dentsu, Shueisha, Studio Pierrot
- Animateur : Tetsuya Nishio, Hirofumi Suzuki
- Montage son : Yasunori Ebina
- Ingénieur du son : Chiharu Kamio
- Musique : Yasuharu Takanashi
- Distribution : Eurozoom
- Durée : 1h52
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