Cannes 2015/ L’Homme irrationnel de Woody Allen: critique

Publié par Guillaume Ménard le 16 mai 2015

Synopsis : Professeur de philosophie, Abe Lucas est un homme dévasté sur le plan affectif, qui a perdu toute joie de vivre. Peu après son arrivée dans l’université d’une petite ville, Abe entame deux liaisons. D’abord, avec Rita Richards, collègue en manque de compagnie qui compte sur lui pour lui faire oublier son mariage désastreux. Ensuite, avec Jill Pollard, sa meilleure étudiante, qui devient aussi sa meilleure amie. C’est alors que le hasard le plus total bouscule le destin de nos personnages dès lors qu’Abe et Jill surprennent la conversation d’un étranger et s’y intéressent tout particulièrement. Après avoir pris une décision cruciale, Abe est de nouveau à même de jouir pleinement de la vie. Mais ce choix déclenche une série d’événements qui les marqueront, lui, Jill et Rita à tout jamais.

 

♥♥♥♥♥

 

Lhomme irrationnel - affiche

Lhomme irrationnel – affiche

Chaque nouvelle œuvre de Woody Allen est un évènement, et son génie n’est plus à démontrer à travers une carrière riche en chefs-d’œuvre. Un cinéma ambitieux qui n’a cessé de se réinventer au cours des dernières décennies. Après ses magnifiques BLUE JASMINE (notre critique) et MAGIC IN THE MOONLIGHT (notre critique), le réalisateur new-yorkais présente L’Homme irrationnel, hors-compétition sur le sol cannois. Tout débute par une présentation du personnage d’Abe Lucas (Joaquin Phoenix) à travers les bruits de couloir des étudiantes d’une université fréquentée par Jill Pollard (l’impeccable Emma Stone). Le nouveau professeur de philosophie est réputé alcoolique et coureur de jupons, évidemment sexy puisqu’il porte l’étiquette du bad boy érudit. Ce bourreau des cœurs entretient une relation dès son arrivée avec Rita Richards (Parker Posey). La légèreté du récit déjà prévisible nous amène rapidement et sans surprise à la rencontre entre le professeur et Jill, la meilleure de sa classe. La tournure narrative est donc du même acabit que sa trilogie britannique, intrigue faussement bluette sur fond criminel. C’est aussi là le principal problème d’Irrational Man, qui repose sur la même logique. Ce beau paquet rose romantique, une fois déballé, révèle donc la noirceur d’Abe Lucas. La réalisation accentue ces scènes en plans rapprochés des deux futurs amants, en proie à l’amour naissant avec les décors romancés en fond.

 

Emma Stone et Joaquin Phoenix dans Un homme irrationnel de Woody Allen

Emma Stone et Joaquin Phoenix dans Un homme irrationnel de Woody Allen

 

Idylle faussement amenée, mais déjà vue. Jill étant déjà en couple, la rupture met un temps fou à arriver et nous impose ses prémices par le biais de dialogues étonnement plats. Fait inhabituel chez Woody Allen qui maîtrise d’ordinaire l’éloquence. Même Joaquin Phoenix dans la première partie peine à convaincre dans son rôle de désillusionné, cousin bourgeois et philosophe de Bukowski, l’aspect dépressif davantage mis en avant. Pourtant, le réalisateur de Manhattan parvient à retourner la situation. Si le schéma narratif se devine rapidement, c’est dans son traitement qu’il surprend lié aux motivations profondes des deux personnages principaux. La thématique du vide affronte celle du désir, et provoque ainsi une logique paradoxale d’attirance et de rejet. L’élément perturbateur qui déclenche la fissure chez Abe plonge les héros dans une réflexion intéressante sur le bien et le mal. Le professeur de philosophie choisit la voie non-conventionnelle pour redéfinir l’existentialisme, et légitimer ses actions plus que discutables. Les plans sont ici plus efficaces que les dialogues car le récit part dans différentes directions narratives. La photographie de Darius Khondji éclaire ces lieux constamment ensoleillés en jouant sur les contrastes, entre zones d’ombre et surexpositions. L’enfer s’invite donc au paradis, comme dans les dernières œuvres du maître. Le tout est juxtaposé à une bande originale qui swingue, reflet sarcastique de la frivolité apparente. L’aboutissement est d’un cynisme réjouissant même si le deus ex machina est invoqué. Au final, une cuvée d’une qualité inférieure aux précédentes dans laquelle Woody Allen pratique un exercice de style qui remplit simplement son contrat néanmoins sans déplaisir.

 

 

 

  • L’HOMME IRRATIONNEL écrit et réalisé par Woody Allen en salles le 14 octobre 2015.
  • Avec : Joaquin Phoenix, Emma Stone, Parker Posey, Jamie Blackley, Meredith Hagner, Ethan Phillips…
  • Production : Letty Aronson, Stephen Tenenbaum, Edward Walson, Jack Rollins.
  • Photographie : Darius Khondji
  • Montage : Alisa Lepselter
  • Décors : Santo Loquasto
  • Costumes : Suzy Benzinger
  • Distribution : Mars Films
  • Durée : 1h36

Commentaires

A la Une

Cannes 2023 : Justine Triet remporte la Palme d’or pour Anatomie d’une chute

La Française devient la troisième réalisatrice de l’histoire du festival à remporter la Palme d’or.       Le jury… Lire la suite >>

Le nouveau trailer de Barbie s’aventure dans le monde réel

La dernière répétition de Barbie avant sa sortie en salle le 19 Juillet prochain offre de nouvelles surprises et confirme… Lire la suite >>

L’Art de James Cameron exposé à la Cinémathèque française

L’exposition explorera en profondeur les mécanismes créatifs de l’un des réalisateurs et conteurs d’histoires les plus populaires du cinéma contemporain…. Lire la suite >>

Tina Turner, la reine du Rock ’n Roll et icône féministe est décédée à l’âge de 83 ans

Avec plus de deux cents millions d’albums vendus et une carrière longue de soixante ans, Tina Turner laisse derrière elle… Lire la suite >>

Todd Haynes prépare une romance gay avec Joaquin Phoenix

Le réalisateur de Carol évoque son futur projet avec Joaquin Phoenix dans le rôle principal.       Alors qu’il… Lire la suite >>

Nos vidéos

Box OFFICE France

Titre Cette sem. Nbr Sem. Cumul
1 FAST & FURIOUS X 1 140 846 1 1 140 846
2 LES GARDIENS DE LA GALAXIE VOLUME 3 656 622 3 2 685 716
3 JEANNE DU BARRY 356 152 2 401 181
4 SUPER MARIO BROS. LE FILM 245 341 7 6 895 177
5 LES TROIS MOUSQUETAIRES - D'ARTAGNAN 121 665 7 3 218 866
6 L'EXORCISTE DU VATICAN 115 170 2 278 069
7 L'ARBRE A VOEUX 50 457 1 50 457
8 JE VERRAI TOUJOURS VOS VISAGES 38 333 8 1 109 357
9 HAWAII 35 245 2 107 070
10 EVIL DEAD RISE 35 120 5 587 288

Source: CBO Box office

Nos Podcasts