Cannes 2015/ Mad Max Fury Road de George Miller: critique

Publié par Guillaume Ménard le 14 mai 2015

Synopsis : Hanté par un lourd passé, Mad Max estime que le meilleur moyen de survivre est de rester seul. Cependant, il se retrouve embarqué par une bande qui parcourt la Désolation à bord d’un véhicule militaire piloté par l’Imperator Furiosa. Ils fuient la Citadelle où sévit le terrible Immortan Joe qui s’est fait voler un objet irremplaçable. Enragé, ce Seigneur de guerre envoie ses hommes pour traquer les rebelles impitoyablement…

 

♥♥♥♥♥

 

Mad Max Fury Road - affiche

Mad Max Fury Road – affiche

Mad Max, une franchise légendaire qui a donné au cinéma australien ses lettres de noblesse dans les années 80. Un succès qui s’expliquait par une audace folle et novatrice d’un réalisateur qui nous plongeait dans un monde post-apocalyptique. Un futur proche dans lequel l’essence est devenue une denrée rare que des pirates de la route tentent de s’approprier dans un déchaînement de violence. Plus qu’une nouvelle vision de l’avenir, George Miller a fondamentalement créé une mythologie stupéfiante, entre le revenge movie, la science-fiction, et le western version rock new-age. Incarné par Mel Gibson pendant trois films, le personnage de Max Rockatansky est à l’origine un policier de la route qui, suite au meurtre de sa femme et de son fils, se transforme en justicier du bitume. Après un troisième opus très mitigé, l’espoir de revoir le héros s’est éteint. Pourtant, trente ans après, George Miller revient avec un quatrième épisode aujourd’hui présenté au 68e Festival de Cannes, hors compétition. Beaucoup d’attentes et de curiosité, notamment de la part des fans de la première heure, considérant cet opus à la fois comme une suite et un reboot. Résultat, Mad Max Fury Road est une réussite totale et a littéralement emballé les festivaliers. L’introduction de cinq minutes donne le ton : un concentré de folie pure et d’action vertigineuse pour le régal de nos yeux qui enterre le scepticisme de rigueur.

 

Tom Hardy dans Mad Max Fury Road de George Miller

Tom Hardy dans Mad Max Fury Road de George Miller

 

Max, campé par un Tom Hardy, digne successeur de Mel Gibson, se fait poursuivre par une horde de pirates, issus d’une tribu gouvernée par Immortan Joe (Hugh Keays-Byrne alias Toecutter, l’ennemi de Max dans le tout premier opus). Une secte guerrière qui trouve refuge dans une citadelle creusée en pleine montagne, dans laquelle notre héros solitaire et taciturne va tenter d’échapper à ces « warboys » (kamikazes du désert pour qui mourir est un honneur prestigieux). La caméra multiplie les accélérés et les brisures d’axe pendant la traque, et plonge ainsi le spectateur dans un tourbillon paranoïaque et halluciné. Chaque plan donne le vertige et la démesure du visuel côtoie une bande sonore agressive. Le rythme continue crescendo, en opposant Immortan Joe à l’Imperator Furiosa (magnifique Charlize Theron), leader rebelle qui tente de fuir avec un groupe de femmes sous la gouverne de ce chef de guerre au masque cauchemardesque, qui va rencontrer Max et le jeune « warboy Nux » (Nicholas Hoult).

 

Hugh Keays-Byrne dans Mad Max Fury Road

Hugh Keays-Byrne dans Mad Max Fury Road

 

La citadelle est présentée comme un microcosme autocratique, régi par des lois terrifiantes qui dépassent la noirceur présentée dans les précédents films. Miller remodèle profondément son univers sans en trahir ses origines. Auparavant, l’enjeu principal constituait la quête du carburant, et révélait le besoin nomade des protagonistes qui voulaient déjà échapper à ce territoire désertique. Une recherche qui prend un double sens chez Max, tentant d’échapper avant tout à lui-même. Dans Fury Road, les ressources recherchées sont bien naturelles et l’essence n’arrive plus en tête de liste. Ainsi, on capture des hommes pour leur sang. Surnommés les Globulards, ils sont emprisonnés avec leur groupe sanguin tatoués sur le corps tandis qu’en parallèle, on tire le lait directement de la poitrine des femmes. Tout n’est donc que bétail dans ce monde impitoyable et cette déshumanisation déboussole dans la mesure où l’émotion chez Max reste un concept qu’il s’interdit toujours, malgré les assauts de ses souvenirs. Ici, les deux camps qui s’affrontent sont avant tout des survivants et le manichéisme est une notion qu’ils rejettent. Cependant, les réactions bourrues du héros provoquent agréablement le rire dans nombreuses situations, et en particulier avec Furiosa. Elle et les autres femmes sont des personnages brillamment écrits, profonds, forts et symboliques, révélant leur aptitude à rendre les coups dans un monde désillusionné.

 

Tom Hardy et Charlize Theron dans Mad Max Fury Road

Tom Hardy et Charlize Theron dans Mad Max Fury Road

 

Une leçon sur le courage qui pour la première fois situe le justicier du désert comme un héros plus vulnérable, dont l’humanité se profile dans le regard. Les champs-contrechamps entre lui et Furiosa sont d’ailleurs beaucoup plus éloquents qu’un dialogue. Ce choix de mise en scène implique une envie singulière de revenir aux racines du cinéma qui privilégie le visuel aux dialogues. Des scènes à la beauté graphique exceptionnelle s’enchaînent à un rythme endiablé, pendant deux heures. Le directeur de la photographie John Seale sublime cette version de l’enfer, du bleu nuit onirique aux tons orangés évoquant un soleil meurtrier. L’aridité est parfaitement retranscrite, le désert s’invite au cinéma dans des expositions magnifiques et visionnaires. Les effets visuels en témoignent, avec pour exemple les tempêtes de sable surréalistes qui rappellent le travail édifiant de Brian Johnson sur l’Histoire sans Fin. De plus, les fonds verts, limités pour un tournage de cette ampleur, témoignent bien du savoir-faire old school de Miller et de cette volonté de s’inscrire visuellement dans le temps. Même constat pour la bande originale de Junkie XL qui compose ici un score épique, tour à tour prodigieux et terrifiant. Les scènes de poursuite sont ainsi servies à la perfection, encadrant la folie des véhicules, hybrides du monde ancien, assemblant mitraillettes, guitares électriques et tambours en fanfare. Une course guerrière, mais aussi musicale et chorégraphiée qui donne naissance à un ballet coloré délicieusement jouissif qui termine sa course avec panache.

 

Mad Max Fury Road

Mad Max Fury Road

 

Une danse sans répit pratiquée par un casting cinq étoiles, où Tom Hardy excelle en honorant l’héritage laissé par Mel Gibson. Charlize Theron est fantastique et parfaitement crédible dans ce rôle où l’intransigeance et la sensibilité sont traitées de manière juste, sans parler d’une condition physique impressionnante qui lui confère une aura guerrière méritée. Le reste du casting féminin est très bien, porté par les jeunes actrices qui confortent la richesse des personnages secondaires, incarnées par Zoë Kravitz, Rosie Huntington-Whiteley ou encore Riley Keough. Hugh Keays-Byrne fait de son rôle un ennemi charismatique. Ainsi, Miller, à 70 ans, prouve qu’il en a encore sous le capot, en délivrant un chef-d’œuvre à la beauté dantesque, un cauchemar abyssal à la puissance narrative explosive. Mad Max Fury Road est plus qu’une simple séquelle, c’est la renaissance d’une franchise et une date à retenir dans le cinéma d’action. Un road movie et western vrombissant et apocalyptique qui prouve encore à ce jour que le monde a besoin de héros, mais aussi et surtout d’héroïnes.

 

 

  • MAD MAX FURY ROAD De George Miller en salles le 14 mai 2015.
  • Avec : Tom Hardy, Charlize Theron, Nicolas Hoult, Hugh Keays-Byrne, Josh Elman, Zoë Kravitz, Rosie Huntington-Whiteley, Nathan Jones…
  • Scénario : George Miller, Brendan McCarthy et Nick Lathouris
  • Production: George Miller, Doug Mitchell, P.J Voeten,Bruce Berman, Graham Burke,Geneviève Hofmeyr, Iain Smith
  • Photographie : John Seale
  • Montage : Margaret Sixel
  • Décors : Colin Gibson
  • Costumes : Jenny Beavan
  • Musique : Junkie XL
  • Distribution : Warner Bros
  • Durée : 2h

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