Mini-série/ Show me a Hero: critique

Publié par Lucia Miguel le 10 octobre 2015

Synopsis: Plus jeune maire de Yonkers, dans l’état de New York, Nick Wasicsko se voit contraint par la justice de faire construire des logements sociaux dans un quartier majoritairement occupé par des blancs. Ses efforts pour appliquer cette décision vont déchirer la ville et paralyser le conseil municipal. Son avenir politique ne s’en remettra jamais!

 

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Show me a Hero - poster

Show me a Hero – poster

Francis Scott Fitzgerald écrivait : Montrez-moi un héros, et je vous écrirai une tragédie (show me a hero and I’ll write you a tragedy). Près d’un siècle plus tard, David Simon, auteur, journaliste et créateur de séries, emprunte l’expression et porte sur le petit écran cet héros fitzgeraldien. Basé sur l’ouvrage éponyme paru en 1999 de Lisa Belkin, ancienne journaliste du New York Times, Show me a Hero, est une mini-série de six épisodes, diffusés sur HBO. Elle se concentre sur le combat du jeune maire Nick Wasickso, incarné par Oscar Isaac, contre le racisme et la ségrégation, dans le but de faire construire des logements sociaux dans une zone essentiellement peuplée de Blancs issus de classe moyenne, complètement opposés au projet. David Simon change la ’victime’ de son éternel scalpel dans ce microcosme, dont l’action se déroule à Yonkers dans l’état de New York. Avec ce regard incisif toujours centré sur les rapports humains, il poursuit son exploration de la société américaine actuelle, après les dealers de drogue et la police de Baltimore dans The Wire (2002), le bataillon des Marines pendant la guerre d’Irak dans Generation Kill (2008) et la population de la Nouvelle Orléans après le passage de l’ouragan Katrina dans Treme (2010). Sa lucidité, son humanisme aussi, atteignent ici des sommets. Brillamment réalisé par Paul Haggis (Collision, Dans la vallée d’Elah), la séquence de l’attribution des logements sociaux est magistrale. Elle est présentée comme une loterie durant laquelle la chance représente l’unique moyen de changer de vie et d’obtenir un droit fondamental à l’être humain, à savoir celui d’avoir un toit. On comprend rapidement qu’aux États-Unis, la dignité de l’individu se résume au jeu de hasard (“Si votre nom est retenu, vous pouvez vous diriger à l’accueil et retirer un dossier”). Dans les visages des individus présents, l’espoir se lit autant que le désespoir. L’espoir, car pour une fois dans leur vie, ils sont gagnants, bien qu’ils ne savent pas encore où cela va les mener. Le désespoir, car ces mêmes logements représentent finalement la seule bouée de secours jetée par leurs représentants.

 

Oscar Isaas dans Show me a HeroOscar Isaas dans Show me a HeroOscar Isaas dans Show me a HeroCatherine Keener dans Show me a Hero

 

À travers une pléiade d’acteurs, Show me a Hero radiographie ainsi la manière dont les Américains sont amenés souvent à choisir un camp, en politique (démocrate ou républicain) et dans le rapport qu’ils ont avec leur voisinage (accepter ou non de cohabiter avec une population noire). Car les problèmes endémiques de la société américaine, à l’instar de la nôtre, proviennent de la méconnaissance, voire de l’ignorance, de l’autre. Ce racisme belliqueux, exprimé par les opposés au projet de logements, n’est pas ici un fait isolé. Il conditionne toute une structure et une hiérarchisation sociale à l’origine de différentes problématiques comme la délinquance et le trafic de drogue. Pour autant, le message de David Simon n’est pas si fataliste, il constate que le changement de mentalité est aussi possible. L’évolution s’incarne d’ailleurs à travers la figure de Mary Dorman (Catherine Keener), dame aux idées conservatrices qui, au contact de l’autre, finit progressivement par rejoindre la communauté qu’elle a toujours rejetée.

 

Les dialogues de David Simon, en collaboration avec William F. Zorzi, deviennent dès lors aussi puissants et transparents que les images. Ils parviennent à percer le réel qui se cache hypocritement derrière les apparences de toutes les sociétés modernes. Tout comme le monde politique, avec ses débats interminables et ses polémiques médiatisées, sont aussi brillamment auscultés. L’interprétation d’Oscar Isaac en jeune maire apprenti, à la fois solide et idéaliste, y est en outre pour beaucoup dans le succès de cette mini-série. Puisant ainsi son inspiration dans des œuvres littéraires, des enquêtes de terrain (à l’instar de celles menées par le créateur lui-même pour son livre Baltimore qui a inspiré la série The Wire) et des événements réels, David Simon devient progressivement le John Dos Passos du petit écran. Cet écrivain américain a en effet souvent examiner les bouleversements et les agitations du 20e siècle sur la politique et le mode de vie américain. David Simon n’est pas “l’homme le plus en colère de la télévision américaine”, comme les médias américains aiment le surnommer, mais un sociologue engagé qui cherche à soulever les problématiques capitales de la société occidentale.

 

Lucia Miguel

 

 

 

  • SHOW ME A HERO diffusée sur HBO puis sur OSC City du 16 au 30 août 2015.
  • Créateurs : David Simon et William F. Zorzi, d’après le roman Show me a hero de Lisa Belkin
  • Avec : Oscar Isaac, Catherine Keener, Alfred Molina, Winona Ryder, James Belushi, John Bernthal, Peter Riegert, Dominique Fishback, Ilfenesh Hadera, Clarke Peters, Natalie Paul, Carla Quevedo,Terry Kinney,…
  • Mini-série américaine de 6 épisodes de 52 min.

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Source: CBO Box office

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