Synopsis : Banquier d’affaires ayant brillamment réussi, Davis a perdu le goût de vivre depuis que sa femme est décédée dans un accident de voiture. Malgré son beau-père qui le pousse à se ressaisir, il sombre de plus en plus. Un jour, il envoie une lettre de réclamation à une société de distributeurs automatiques, puis il lui adresse d’autres courriers où il livre des souvenirs personnels. Jusqu’au moment où sa correspondance attire l’attention de Karen, la responsable du service clients. Peu à peu, une relation se noue entre eux.
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Jean-Marc Vallée se fait au fil des années une place de choix parmi les meilleurs cinéastes internationaux du moment. C.R.A.Z.Y., DALLAS BUYERS CLUB (notre critique) et le poignant Wild ont en effet obtenu de nombreuses récompenses un peu partout dans le monde. Démolition, présenté en ouverture du Festival de Toronto en septembre dernier, pourrait suivre ce chemin. Le cinéaste québécois choisit cette fois le thème du deuil : violent, soudain et arrivé trop tôt, il frappe de plein fouet Davis (Jake Gyllenhaal), banquier d’affaires à la carrière florissante à New York, qui perd son épouse Julia dans un accident de la route. S’il se trouvait aussi dans le véhicule, il s’en sort indemne et doit faire face à ce tragique événement. Au lieu de se confier à ses proches ou à un thérapeute, il préfère se dévoiler dans des lettres de réclamation adressées à une entreprise de distributeurs automatiques. La rencontre avec Karen (Naomi Watts), responsable du service client, bouleverse dès lors son existence. Demolition dépeint avec intensité les réactions de son héros face à la perte de l’être aimé. À l’instar de ses précédentes œuvres, Jean-Marc Vallée évite les comportements classiques et les rebondissements attendus. Davis est un personnage complexe et fascinant, campé par un Jake Gyllenhaal toujours époustouflant ; il encaisse les coups durs de manière décalée et violente, bouscule les conventions et tente de faire table rase de son passé. Lui qui se montrait inattentif au monde qui l’entoure voit brusquement tout d’un autre œil, ressentant même des pulsions destructrices, d’où le titre du film. Il se pose d’ailleurs de terribles questions sur sa vie et sur la nature de sa relation avec Julia (Heather Lind). Jean-Marc Vallée retrace ainsi la métamorphose de son héros, qui passe d’un employé modèle froid à un homme révolté et sensible. Cette transformation s’opère essentiellement à travers Karen et Chris (Judah Lewis), son fils de 12 ans. L’étude psychologique poussée de ce personnage s’imbrique habilement dans une histoire dense et captivante ; Vallée aborde des thèmes forts comme le droit à la différence, la culpabilité et les rapports à l’autre. La musique pop-rock des années 60 et 70, à l’image de C.R.A.Z.Y. et de Dallas Buyers Club, renforce le propos. Demolition se révèle aussi poétique et onirique, un procédé cher à son réalisateur ; les nombreuses touches de lyrisme rendent l’intrigue et les personnages convaincants. Inattendu, haletant, émouvant, intelligent et sincère, Demolition parvient à nous absorber de bout en bout, jusqu’à son dénouement déroutant.
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Christophe Binet
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- DEMOLITION réalisé par Jean-Marc Vallée en salles le 6 avril 2016.
- Avec : Jake Gyllenhaal, Naomi Watts, Chris Cooper, Judah Lewis, C.J. Wilson, Polly Draper, Heather Lind, Malachy Clery, Debra Monk.
- Scénario : Bryan Sipe
- Production : John Malkovich, Lianne Halfon, Russell Smith, Molly Smith, Trent Luckinbill, Thad Luckinbill, Sidney Kimmel
- Photographie : Yves Bélanger
- Montage : Jay M. Glen
- Décors : John Paino
- Costumes : Leah Katznelson
- Musique : Susan Jacobs
- Distribution : 20th Century Fox
- Durée : 1h41
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