Synopsis : Les aventures de Mowgli, un petit homme élevé dans la jungle par une famille de loups. Mais Mowgli n’est plus le bienvenu dans la jungle depuis que le redoutable tigre Shere Khan, qui porte les cicatrices des hommes, promet d’éliminer celui qu’il considère comme une menace. Poussé à abandonner le seul foyer qu’il ait jamais connu, Mowgli se lance dans un voyage captivant, à la découverte de soi, guidé par son mentor la panthère Bagheera et l’ours Baloo. Sur le chemin, Mowgli rencontre des créatures comme Kaa, un pyton à la voix séduisante et au regard hypnotique et le Roi Louie, qui tente de contraindre Mowgli à lui révéler le secret de la fleur rouge et insaisissable : le feu.
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Depuis 2010 et le succès au box-office d’Alice au Pays des Merveilles de Tim Burton, dont le second volet approche à grands pas, Disney poursuit sa longue route pavée de billets verts en transposant ses personnages animés en live action. Le dernier en date portait sur CENDRILLON (notre critique), dont la réinterprétation restait d’un classicisme aussi respectueux que désolant. Si on eut préféré qu’il suive les pas de MALÉFIQUE, qui dynamitait le conte de fées en jetant par dessus bord cette quête chimérique et poussiéreuse du Prince Charmant, la relecture de Kenneth Branagh a néanmoins conquis les critiques et le public. Car ces productions sont non seulement rentables, pour avoir déjà fait leurs preuves, mais aussi fédératrices, touchant un large public qui comprend le package enfants/adultes/parents et anciennes/nouvelles générations. Une manne financière assurée donc pour la maison Mickey, qui comble aussi de joie, au passage, le fortuné tonton Picsou. Disney entend donc bien continuer à exploiter cette source vive et Le Livre de la Jungle de Jon Favreau, mêlant animation et live action, répond au cahier des charges. Le scénario écrit par Justin Marks (Street Fighter, prochainement TOP GUN 2) s’autorise finalement dix à quinze pour cent de liberté sur les cent quarante six minutes. Il est plus fidèle au roman de Rudyard Kipling, paru en 1894, tout en gardant l’effervescence de la version animée sur celluloïd de Walt Disney en 1967. Si à ce titre on pouvait reprocher à Cendrillon d’être toujours soumise aux critères du conte ancestral et de cette figure fantasmée personnifiant un idéal de pureté, tout fonctionne à merveille dans cette nouvelle adaptation du Livre de la Jungle, qui sera suivie de celle d’Andy Serkis pour Warner Bros l’année prochaine.
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Le réalisateur des deux premiers opus d’Iron Man transcende cette histoire, ancrée dans l’imaginaire collectif, à travers une approche plus adulte, une action plus soutenue et des thématiques qui font écho aux problématiques contemporaines. Cette réussite, on la doit d’abord à son acteur principal âgé de 12 ans, Neel Sethi, qui semble être la pure réincarnation de Mowgli dans le dessin animé populaire, avec ses grands yeux noirs et ce corps chétif et agile. Ce jeune garçon, originaire de New York, qui a été auditionné parmi des milliers d’enfants potentiels à travers le monde, est impressionnant de spontanéité dans son expressivité et sa gestuelle. Ce petit d’homme bien réel se réapproprie les traits de personnalité de son héros élevé parmi les loups : précoce, curieux, intrépide, intelligent, débrouillard et sensible à son entourage. Il parvient à tenir seul à l’écran au milieu de toute cette faune animalière conçue en numérique. Une véritable gageure, renvoyant à la performance de Suraj Sharma, qui avait sept ans de plus dans L’Odyssée de Pi d’Ang Lee. Si la 3D immersive n’est finalement pas si nécessaire partout, saluons le travail d’orfèvre sur la conception des animaux, les décors, les contrastes et les images de synthèses photoréalistes de Weta Digital et MPC ; Bagheera et Shere Khan en tête. Du comportement à la texture des poils en passant par les mouvements des corps et les expressions faciales, tout est fascinant de précision et prend vie au coeur de toute cette luxuriance exotique.
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Si les voix de stars font partie intégrante de la stratégie marketing des dessins animés, celles significatives d’Idris Elba en tigre terrifiant, Bill Murray en ours bon-vivant mais ici plus roublard ou encore Scarlett Johansson en python hypnotique, renforcent le récit, l’action et l’atmosphère. Car la particularité de cette transposition en live action, au regard de la version animée, émane des messages qu’elle véhicule. Elle remet en exergue les thématiques fortes du conte initiatique universel de Kipling, qui faisait naître ses récits dans un contexte colonial. Ainsi, le propos et sa dimension mythique sont mieux développés sur l’identité, le passage à l’âge adulte, le respect de soi et d’autrui, la place de l’individu dans le monde, la tolérance, l’assimilation aux lois et coutumes ou encore l’importance de la communauté. On pense aussi à la symbolique de l’éléphant majestueux, considéré comme le maître des animaux et de la jungle, qui souligne ici toute une philosophie sur l’existence à volonté pédagogique. Autre point appréciable, l’oeuvre de Jon Favreau, dont on apprécie la mise en scène dynamique et enlevée, délaisse la comédie musicale au profit du film d’aventure. Seuls de brefs passages des chansons The Bare Necessities (Il en faut peu pour être heureux) et I Wanna Be Like You (Être un homme comme vous) sont fredonnés respectivement par Baloo et le roi Louie, laissant le champ libre à la bande originale ; le récit gagne vraiment en profondeur. Ainsi, tous ces éléments rassemblés font de ce nouveau Livre de la Jungle un voyage émotionnel, engagé et exaltant, au coeur de nos souvenirs d’enfance.
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- LE LIVRE DE LA JUNGLE (The Jungle Book) de Jon Favreau en salles le 13 avril 2016.
- Avec : Neel Sethi et les voix de Ben Kingsley, Bill Murray, Idris Elba, Scarlett Johansson, Lupita Nyong’o, Christopher Walken, Giancarlo Esposito, Emjay Anthony…
- Scénario : Justin Marks, d’après l’œuvre éponyme de Rudyard Kipling
- Producteurs : Jon Favreau, Brigham Taylor
- Directeur de la photographie : Bill Pope
- Montage : Mark Livols
- Musique : John Debney
- Distribution : The Walt Disney Company
- Durée : 1h46
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