Résumé/Préface : Massacre à la Tronçonneuse (1974) est considéré comme une véritable matrice de l’horreur moderne, une oeuvre tellement culte qu’elle a fini par éclipser le reste de la filmographie de son auteur. Pourtant, Tobe Hooper est loin d’être le réalisateur d’un seul film. Entre Poltergeist (1982), produit par Steven Spielberg dans le confort hollywoodien, et Mortuary (2005), son retour en grâce dans les salles, le cinéaste aura connu les affres de la série B et du marché de la vidéo, sans jamais se départir de son style, un mélange de macabre et de grotesque au service d’une vision critique de la société américaine. En quatre décennies, son oeuvre explore les terreurs de son époque et les angles morts de l’Amérique, du génocide indien à la guerre du Vietnam. Car, pour Tobe Hooper, ce qu’on enterre finit toujours par refaire surface ; le film d’horreur est avant tout politique.

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Les Territoires interdits de Tobe Hooper - couverture

Les Territoires interdits de Tobe Hooper – couverture

Comme toutes les bonnes monographies, celle-ci débute par une passion. À l’origine, il y a des images fixes, des photographies publicitaires annonçant la projection d’un film qui n’aura jamais lieu. Car entre la réalisation de Massacre à la tronçonneuse et sa sortie française, la censure est passée par là. Pendant des années donc, une génération de cinéphiles a dû pallier ce manque en recourant à leur imagination. La découverte du métrage sur grand écran en 1982 – soit huit ans après sa sortie initiale en Amérique – n’en fut que plus forte. À bien y réfléchir, le film de Tobe Hooper n’a jamais cessé de réapparaitre, d’évoluer ; en atteste sa ressortie en 2014 dans une version restaurée qui a permis de porter un nouveau regard sur cette Å“uvre essentielle. Pour Hooper aussi, Massacre à la tronçonneuse n’a jamais cessé de réapparaître, hantant sa filmographie à la manière d’une revenance insatiable. En cela, Jean-Baptiste Thoret à raison d’écrire dans sa préface que Massacre fut à la fois la « plus belle chance » et la « malédiction » de son réalisateur. L’intelligence de Dominique Legrand, romancier et essayiste, a donc été de considérer le film pour ce qu’il est : une pierre angulaire à partir de laquelle s’est édifiée l’ensemble d’une carrière. La thématique du territoire permet d’offrir une vision globale de la filmographie hooperienne, Legrand affirmant dès son introduction que celle-ci porte la griffe d’un auteur, c’est-à-dire la présence de problématiques formelles et narratives marquées par une constante récurrence. De fait, sa méthode se rapproche selon ses propres dires de celle de l’entomologiste, observant à la loupe chaque élément, scrutant chacune de ses facettes, pour ensuite mieux les raccorder à l’ensemble.

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Massacre à la tronçonneuse de Tobe Hooper

Massacre a la tronconneuse de Tobe Hooper

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Point de départ, Massacre fonctionne à la manière d’une corne d’abondance nourrissant de l’intérieur les films ultérieurs de Hooper. Soit que ceux-ci n’aient cessé de réactiver son discours, soit, qu’au contraire, ils soient apparus comme une réaction à celui-ci. À son caractère documentaire s’opposera l’exigence formelle des studios du Crocodile de la mort et de Lifeforce ; à sa singularité personnelle répondra l’hybridité identitaire de Poltergeist (dont Legrand analyse très bien les traits appartenant à Hooper et ceux propres à la personnalité de Steven Spielberg, son producteur). Dans le même temps, Funhouse, L’Invasion vient de Mars et bien sûr Massacre à la tronçonneuse 2 viendront reprendre et développer ses intentions premières. Eggshels, le premier long métrage de Hooper, redécouvert récemment, porte quant à lui les traces de l’horreur à venir.

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Mais si Massacre suscite des réactions contraires, il réunit l’ensemble des productions du cinéaste autour d’une approche commune que Legrand explore avec attention. Il y a d’abord les modèles artistiques : le cartoon, les EC comics, les films fantastiques de la Universal (le Frankenstein de James Whale, le Dracula de Tod Browning, Le Loup-garou de George Waggner), le Psychose de Hitchcock, le cinéma moderne européen, les romans de Faulkner, les mythes et les contes populaires. Ensuite, les références contextuelles : les révolutions culturelles des années soixante, puis leur progressif déclin dans les années soixante-dix, la guerre du Vietnam, et surtout l’assassinat de JFK à Dallas dans l’État de naissance de Hooper. Se dégage donc de son œuvre une violence sourde, intemporelle mais pourtant actualisée par les conséquences de l’évènement historique. Ce double caractère, à la fois centrifuge (ouvert vers l’extérieur) et centripète (sans cesse ramené vers l’intérieur, à un point d’origine perçu comme un moment traumatique), ouvre la réflexion à des développements plus universels mais toujours rattachés aux particularités des films envisagés (l’humanité de l’horreur, le grotesque, la question spatio-temporelle).

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Premier essai français consacré à l’ensemble de l’œuvre du réalisateur, l’ouvrage prolonge et renouvelle les réflexions amorcées par Jean-Baptiste Thoret dans son excellent Une expérience américaine du chaos (publié en 2000 chez Dreamland). La clarté de l’écriture de Legrand permet de lire ces Territoires interdits comme un roman structuré par des images mentales que le cinéma de Hooper n’a jamais cessé de matérialiser pour mieux en sublimer l’imaginaire sous-jacent.

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  • LES TERRITOIRES INTERDITS DE TOBE HOOPER par Dominique Legrand disponible aux éditions Playlist Society, Collection « Essai/cinéma » à partir du 21 février 2017.
  • Préface de Jean-Baptiste Thoret
  • 144 pages
  • Tarif : 7 € (version numérique) – 14 € (papier)

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