Sortie DVD/ La trilogie de la guerre de Roberto Rossellini: critique

Publié par Charles Villalon le 4 février 2017

Synopsis : Les trois premiers longs-métrages de Roberto Rossellini sortent pour la première fois en DVD dans un coffret édité par Bach Films. C’est l’occasion de se pencher sur les débuts cinématographiques du fondateur du néoréalisme italien.

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La Trilogie de la Guerre de Roberto Rossellini -jaquette

La Trilogie de la Guerre de Roberto Rossellini – jaquette

La sortie en DVD de la trilogie de la guerre de Rossellini vient mettre fin à une invisibilité longue de 70 ans et permet de découvrir les premiers pas du grand maître italien Roberto Rossellini. De son œuvre antérieure à Rome, ville ouverte, on ne connaissait jusque-là que La Proie du désir, film aux accents rosselliniens indéniables mais qui avait été terminé et signé par Marcello Pagliero. Outre leur sujet, à savoir la Seconde Guerre mondiale du point de vue de l’Italie fasciste, ces trois films ont en commun d’avoir été produits avec le soutien du régime et d’avoir profité de la participation des différents secteurs de l’armée concernés. Il est donc tout à fait loisible de les considérer comme des films de propagande. Ce qu’ils sont, jusqu’à un certain point. Le premier long-métrage réalisé par Rossellini s’appelle Le Navire blanc. Il raconte l’histoire d’un jeune engagé qui tombe amoureux de sa « marraine », une de ces femmes dont la contribution à l’effort de guerre consiste à écrire aux jeunes soldats. Le jour où ils se sont donné rendez-vous pour une première rencontre, sa permission est annulée pour cause de départ au combat. Étrange objet filmique que ce premier essai à mi-chemin entre le film de propagande, le documentaire et la romance. Étrange par exemple qu’une production fasciste s’ouvre par une citation d’un film de propagande soviétique. C’est en effet par une série de plans empruntés au Cuirassé Potemkine que s’ouvre la filmographie de Rossellini. De manière générale, la façon qu’a Le Navire blanc de naviguer entre des registres si différents le pare d’une singularité parfois déconcertante. Le scénario, d’une facture classique, y est dilué dans ce qui apparaît comme l’impératif premier de la production, c’est-à-dire la présentation de la force de frappe militaire du régime. L’intrigue, qui resurgit de loin en loin et ne représente qu’une vingtaine de minutes sur les soixante-dix que dure le film, demeure belle et touchante, et les scènes d’hôpital entre le jeune appelé et l’infirmière sont une grande réussite. Notons également que la démonstration de force qui constitue le cœur du film n’est pas sans intérêt et que l’aspect documentaire en est même passionnant. Dans la première demi-heure, c’est une véritable exploration des entrailles du navire de guerre que nous offre Rossellini. Des images saisissantes qui à elles seules font le prix du Navire blanc.

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Le Navire blanc (La Nave bianca)

Le Navire blanc (La Nave bianca)

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Le réalisateur s’écarte d’avantage du standard propagandiste dans son traitement des personnages. Un pilote revient est à cet égard similaire au Navire blanc. Nous y suivons l’histoire d’un pilote de l’armée de l’air interprété par Massimo Girotti – resté célèbre pour son rôle de Gino dans Les Amants diaboliques de Visconti – qui est abattu en territoire ennemi puis fait prisonnier et qui cherche à s’évader pour reprendre le combat. Ce protagoniste, bien qu’habité par l’honneur et le sens du devoir, n’est pas un simple parangon de vertus militaires. Lui offrant une destinée plus personnelle qu’exemplaire, Rossellini ne se livre pas à une stricte fabrication d’héroïsme. Il se permet par exemple, dans chacun de ces trois longs métrages – dans les premières séquences, avant l’irruption du tragique – des scènes où la légèreté l’emporte sur la gravité de la situation et où les soldats, plutôt que de se répandre en serments lyriques sur le sens du devoir, se chamaillent et s’apostrophent dans une atmosphère de gaieté. C’est le cas par exemple de ce moment d’Un pilote revient où les officiers, qui s’apprêtent à partir en mission, s’amusent sur leurs vélos en slalomant entre les avions de chasse.

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L'Homme à la croix

L’Homme à la croix

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C’est le cas également dans l’ouverture de L’Homme à la croix, où les soldats se prélassent torses nus près d’une rivière, dans une atmosphère de vacances. L’homme à la croix du titre est un aumônier militaire en poste sur le front russe qui reste derrière les lignes ennemies pour porter secours à un blessé intransportable. Le film est un portrait vibrant de cet homme d’église qui exerce son sacerdoce au milieu des combats. Le visage de l’ennemi n’y est pas brossé sans nuance. Si le soviétique qui apparaît au début de l’histoire est une caricature hideuse d’un homme rongé par le mal, le personnage interprété par Roswita Schmidt, alors compagne de Rossellini, est dépeint plus subtilement. La jeune femme fait preuve de courage et d’idéalisme dans son combat contre les italiens. Elle sera toutefois apaisée par la vérité du Christ que lui délivrera le prêtre incarné par Alberto Tavazzi – acteur que l’on retrouvera dans Rome, ville ouverte. On jugera peut-être que le prosélytisme religieux se contente de prendre ici le pas sur la propagande politique, mais l’épisode ne manque ni de grandeur ni de brio. En outre, cette conviction n’est pas uniquement de circonstance, le catholicisme de Rossellini ayant été le moteur de nombre de ses grandes œuvres, au premier titre desquelles Europe 51Si cette trilogie a autant valeur de document sur la progression artistique de Rossellini que d’œuvre à part entière, elle offre néanmoins des moments cinématographiques forts qui augurent des chefs d’œuvres à venir.

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DVD : Cette édition, qui a le mérite de nous faire découvrir trois films rares, n’est pas irréprochable et semble même avoir été réalisée dans l’urgence. Les copies ne sont pas restaurées, et l’on se demande pourquoi l’image qui illustre le coffret d’une trilogie sur l’Italie en guerre nous montre une carte de l’Espagne… Côté bonus, ils se résument à deux interventions d’un universitaire, Jean Gili, l’une sur la trilogie, l’autre sur Rossellini. Une mise en contexte qui distille quelques informations sans être passionnantes.

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  • LA TRILOGIE DE LA GUERRE réalisé par Roberto Rossellini disponible en DVD depuis le 16 janvier 2017.
  • Le Navire blanc (La nave bianca) – 1941 – 1h09
  • Un pilote revient (Un pilota ritorna) – 1942 – 1h17
  • L’Homme à la croix (L’uomo dalla croce) 1943 – 1h18
  • Edition : Bach Films
  • Tarif : 20 € (DVD)
  • Durée totale : 244 minutes

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